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L’augmentation proposée par le gouvernement fédéral du taux d’inclusion des gains en capital (TIGC), qui passera de la moitié à deux tiers, touchera la plupart de vos clients, et pas seulement les plus fortunés.

Certains de ces clients peuvent être désireux de vendre des actifs présentant d’importantes plus-values latentes avant le 25 juin.

« Il y a énormément d’incertitude en ce qui concerne cette période de deux mois pendant laquelle les gens vont potentiellement exécuter des milliards de dollars de transactions », analyse John Oakey, vice-président de la fiscalité chez CPA Canada, à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse.

Dans le budget fédéral de 2024, le gouvernement a proposé d’augmenter le TIGC à deux tiers sur les gains en capital réalisés au cours d’une année au-delà de 250 000 $ pour les particuliers à compter du 25 juin. Actuellement, le TIGC est de 50 % sur tous les gains en capital réalisés au cours d’une année pour les particuliers, et non seulement sur les premiers 250 000 $.

Mais une vente précipitée pourrait s’avérer peu judicieuse et inutile, prévient Aaron Hector, conseiller en patrimoine privé auprès de CWB Wealth à Calgary.

D’une part, de nombreux clients ne réalisent généralement pas 250 000 $ de gains en capital en un an sur les investissements de portefeuille qu’ils détiennent personnellement, ce qui signifie qu’il n’y aurait aucun avantage à déclencher les gains en capital plus tôt que prévu.

« Ils peuvent avoir des gains dans leur portefeuille qui dépassent largement ce [seuil], mais si vous l’examinez année par année, ce n’est pas comme si le portefeuille [entier] se retournait chaque année », constate Hector, qui a fourni à ses clients un rapport d’une page sur les gains en capital qu’ils ont générés au cours des cinq dernières années, ce qui, dans de nombreux cas, a apaisé leurs inquiétudes.

Aaron Hector a également averti que l’impôt minimum de remplacement, que le budget 2024 a également abordé, pourrait potentiellement créer des problèmes pour certains clients.

Par exemple, si un client réalise un gain en capital important avant le 25 juin pour éviter l’augmentation de l’impôt sur les gains en capital, il risque de devoir payer un impôt minimum de remplacement si la plus-value représente la majeure partie de ses revenus de l’année.

« Cela en surprendra certainement plus d’un », souligne Aaron Hector.

Les clients peuvent réaliser des plus-values à la suite de l’un des trois événements de la vie :

  • lorsqu’ils vendent un bien ayant pris de la valeur,
  • lors de la disposition présumée d’un bien s’ils quittent le Canada
  • et lors de la disposition présumée d’un bien en cas de décès.

« Si ces plus-values dépassent 250 000 $, ce qui peut se produire très rapidement en cas de décès, l’excédent est soumis à un taux d’inclusion de 66,7 % [en vertu des modifications proposées] », calcule Wilmot George, vice-président et chef d’équipe de la planification fiscale, de la retraite et de la succession chez CI Gestion mondiale d’actifs à Toronto.

Pour les sociétés et les fiducies, le taux d’inclusion plus élevé s’appliquerait à tous les gains en capital réalisés à partir du 25 juin.

« Dès que l’on commence à introduire des seuils et des taux d’inclusion différents pour les gains en capital en fonction d’un seuil, on ajoute de la complexité », avertit Wilmot George.

Le gouvernement n’a pas publié de projet de loi pour mettre en œuvre les changements dans le cadre du budget, ce qui rend encore plus floue la situation de la planification financière pour les clients. Dans le document budgétaire, le gouvernement a indiqué qu’il publierait dans les mois à venir des « détails supplémentaires sur la conception » du nouveau TIGC.

« La Loi de l’impôt sur le revenu est extrêmement compliquée, soutient John Oakey. Si vous ne connaissez pas les règles spécifiques, vous pouvez effectuer une transaction qui, lorsque les règles seront publiées, aura un résultat fiscal inattendu. »

Au moment d’effectuer la mise en ligne du présent article, la loi d’habilitation n’avait pas encore été déposée.

Le budget indique qu’il y aura deux périodes pour la réalisation des gains en capital en 2024. Avant le 25 juin, toutes les plus-values réalisées seront soumises au taux d’inclusion actuel de 50 %. Du 25 juin à la fin de l’année, les clients pourront réaliser personnellement 250 000 $ de plus-values supplémentaires avant d’être assujettis au taux d’inclusion plus élevé.

En fin de compte, les clients doivent tenir compte de la durée pendant laquelle ils prévoient de conserver un investissement, de leur taux de rendement attendu et du fait qu’ils s’attendent à être soumis au taux d’inclusion le plus élevé l’année où ils prévoient de vendre l’investissement, affirme Aaron Hector.

En général, plus un client prévoit de conserver son investissement longtemps et plus il s’attend à un taux de rendement élevé, moins il est judicieux de le vendre plus tôt que prévu, même en tenant compte d’un taux d’inclusion plus faible, assure Aaron Hector.

La réalisation d’un gain en capital plus tôt que prévu constitue un paiement anticipé de l’impôt, ce qui laisse moins d’argent disponible pour l’investissement, renchérit Wilmot George.

D’autre part, si un client prévoit de vendre un investissement dans les deux ou trois prochaines années et qu’il pense que le gain sur la vente éventuelle sera soumis au taux d’inclusion le plus élevé, il pourrait avoir intérêt à vendre avant le 25 juin.

Les clients dont l’espérance de vie est réduite peuvent également décider de réaliser des gains avant le 25 juin. « À leur décès, tout sera cristallisé à ce moment-là, et la succession devra payer une facture fiscale [liée à l’augmentation du TIGC] », explique Aaron Hector.

Les clients peuvent choisir de vendre un investissement pour cristalliser le gain en capital et le racheter immédiatement, ajoute Wilmot George. « Contrairement à une perte, où il faut attendre 30 jours pour racheter l’actif [afin d’éviter la règle de la perte apparente], dans le cas d’une plus-value, vous pouvez le vendre et le racheter immédiatement. »

Après le 25 juin, les clients peuvent choisir de vendre stratégiquement des actifs chaque année afin de ne jamais dépasser le seuil de 250 000 $, suggère Wilmot George.

En ce qui concerne les pertes en capital, Wilmot George note qu’il ne semble pas y avoir d’avantage ou d’inconvénient à choisir le bon moment.

Dans le document budgétaire, le gouvernement a déclaré qu’une perte en capital réalisée avant le changement de taux compenserait entièrement un gain en capital équivalent réalisé après le changement de taux.

Mais l’incertitude demeure quant à la manière dont les pertes reportées peuvent être réparties au cours de la première période et de la deuxième période en 2024, selon un rapport de RBC Gestion de patrimoine sur l’augmentation proposée du TIGC.

« Si la raison de la vente d’une immobilisation à perte est d’ordre fiscal, vous pouvez envisager d’attendre des précisions du gouvernement [dans le projet de loi] pour avoir plus de certitude avant de vendre », indique le rapport de RBC.

Les clients qui détiennent des investissements dans une société perdront l’accès au taux de 50 % sur tous les gains réalisés dans une société le 25 juin.

« Les sociétés clientes pourraient envisager de transférer leurs actifs à leur nom personnel plutôt qu’au nom de la société afin de bénéficier du taux d’inclusion de 50 % pour les gains allant jusqu’à 250 000 $ », commente Wilmot George.

Cependant, le processus d’accès aux liquidités d’une société implique plusieurs considérations, notamment si l’argent provient d’une entreprise active ou d’un revenu d’investissement, et sous quelle forme : salaire, dividende, paiement libre d’impôt à partir du compte de dividendes en capital ou remboursement de capital.

« Le propriétaire de l’entreprise devra s’asseoir avec son conseiller fiscal et faire les calculs pour voir ce qui est le plus logique », conclut Wilmot George.