Cette transformation s’opère sur plusieurs fronts, dont celui de la gestion de patrimoine et d’une redirection vers des produits qui comportent moins de risques à long terme.
En janvier 2012, Standard Life s’est d’ailleurs retirée du secteur de l’assurance vie individuelle.
Au cours de la dernière année, Standard Life a aussi vendu plusieurs immeubles qu’elle détenait au Canada.
«L’ancienne Standard Life, c’est la compagnie d’assurance vie que nous étions lorsque nous sommes arrivés au Canada. De l’assurance vie, nous n’en faisons plus sous une forme individuelle, même si nous continuons à en offrir par l’intermédiaire de nos programmes d’assurances collectives.»
«Nous nous tournons vers des produits qui comportent moins de risques à long terme et qui demandent moins de capital, ajoute-t-il. Nous nous concentrons sur le regroupement d’actifs et les revenus basés sur les frais de gestion ou les frais administratifs.»
Charles Guay veut également faire de l’assureur un acteur plus dynamique sur le marché, notamment en ce qui a trait au développement des affaires.
Il souhaite instaurer une culture de haute performance et d’esprit commercial au sein de l’organisation.
«Auparavant, nous étions une entreprise qui attendait que les choses se passent. Nous sommes maintenant plus agressifs dans le développement de notre réseau de distribution et dans le secteur de groupe. Nous nous sommes trop longtemps fiés aux mêmes 200 à 300 conseillers pour vendre nos fonds distincts. Le terrain de jeu est tellement plus grand que ça.»
Par conséquent, Charles Guay souhaite instaurer une gestion plus agressive de la performance de l’organisation en réduisant notamment le nombre de processus manuels.
Depuis deux ans, Standard Life a automatisé près de 1 000 processus autrefois faits manuellement. Le but de Charles Guay est de bâtir une entreprise qui peut s’adapter facilement au changement.
«Les gens vont entendre parler d’une organisation dynamique qui se concentre sur l’avenir et qui voit trois, cinq, dix ans en avant.»
«De plus, nous faisons aussi beaucoup d’efforts pour que Standard Life soit présente dans sa collectivité, que ce soit à travers un engagement philanthropique ou par une présence dans les organismes de son secteur d’activité, comme l’Institut des fonds d’investissement du Canada ou l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes», précise-t-il.
Sans papier et sans murs
Ce désir d’efficacité est aussi visible dans les changements physiques que Charles Guay souhaite faire dans les bureaux de l’assureur.
Afin de tester le marché, Standard Life a récemment mis en vente deux immeubles montréalais qui abritent actuellement la grande majorité de ses employés.
Le but est de réunir tout le monde sous le même toit dans des bureaux à aire ouverte et sans papier.
«Rien n’est encore décidé, mais nous nous penchons sur la possibilité d’emménager dans une nouvelle construction qui sera située au 900, De Maisonneuve Ouest, au centre-ville de Montréal. Nous voulons que le nouvel environnement physique soit optimal et technologique.»
«C’est beau d’avoir des aires ouvertes, mais il faut aussi avoir des plafonds qui absorbent le son et un meilleur éclairage pour s’assurer que nos employés soient bien», note-t-il.
Charles Guay n’a pas hésité à tester lui-même le modèle qu’il souhaite faire adopter à ses employés et son propre bureau est en aire ouverte.
Finis les seize tiroirs qu’il avait autrefois dans son bureau à la Banque Nationale, l’ensemble de ses dossiers est maintenant regroupé dans cinq tiroirs.
Son objectif ? Réussir à tout faire entrer dans seulement deux tiroirs, soit ce qu’il pense donner à ses employés.
«Ma citation préférée par les temps qui courent est de Charles Darwin, c’est « l’être humain s’adapte ». C’est étonnant de voir à quel point !»
«Par ailleurs, le partage de l’information et la collaboration sont quelque chose que nous souhaitons développer. Ce que les gens découvrent souvent, c’est qu’il n’y a pas de raison de cacher des choses à d’autres employés d’une même entreprise et que, souvent, on peut aller plus loin grâce au partage de l’information», dit-il.
Homme de produits
L’adaptation, c’est un concept que Charles Guay connaît bien, lui qui a occupé plusieurs fonctions très différentes dans une variété d’entreprises du secteur financier durant sa carrière.
Toutefois, de RBC Dominion valeurs mobilières à Fidelity Investments Canada, en passant par la Banque Nationale du Canada, le fil conducteur de sa carrière est probablement son intérêt pour les produits de détail.
«J’aime toujours participer aux discussions des gens d’Investissement Standard Life, puisque j’ai occupé beaucoup de postes reliés au détail.»
«Toutefois, poursuit-il, nous n’avons pas besoin d’essayer d’imiter ce que nous avons fait ailleurs et, bien qu’il ne faille jamais dire jamais, je ne pense pas que nous allons essayer un jour de créer les Portefeuilles Méritage 2, puisque la version originale a déjà un parcours phénoménal.»
Il apprécie d’ailleurs particulièrement de bénéficier de l’expertise en gestion de portefeuille de sa maison-mère Standard Life, qui est présente partout dans le monde.
«La stratégie est de mettre en valeur Investissements Standard Life. Nous travaillons ensemble pour transformer son savoir-faire en produits qui prennent différentes formes comme des fonds distincts, des fonds communs ou des régimes de retraite.»
D’ailleurs, son expérience en produits de placement lui donne-t-elle aussi un point de vue particulier dans le débat sur la venue de nouvelles exigences en matière de réglementation en assurance, notamment sur le plan de la rémunération ? Oui et non, répond Charles Guay qui refuse de dire si un modèle est préférable à l’autre.
Rémunération
«Je trouve ça bien de voir un certain alignement entre la réglementation en valeurs mobilières et celle en assurance. Par contre, je crois qu’il faut se baser sur des principes et éviter d’imposer une manière trop stricte de faire les choses.»
«L’important, c’est d’avoir le client en tête et de lui fournir l’information pour qu’il prenne une bonne décision avec son conseiller», soutient-il.
Il prend notamment l’exemple de la réforme britannique de la structure de rémunération des conseillers.
On y a interdit les commissions intégrées aux produits financiers, tout en augmentant les exigences de formation continue des conseillers.
En vigueur depuis janvier 2013, la réforme aurait causé le départ de près de 20 % des conseillers de l’industrie.
«Dans les banques, on note que 44 % des conseillers ont quitté l’industrie après cette réforme, et depuis l’été, leur nombre commence tranquillement à remonter. Ces changements ont forcé beaucoup de conseillers à revoir leur modèle d’affaires et à se tourner vers les clients plus aisés.»
«C’est l’un des dangers de ce genre de réforme : abandonner les moins bien nantis, alors que ce sont justement ces clients qu’il ne faut pas laisser à eux-mêmes», continue-t-il.
En matière de rémunération, Charles Guay est partisan d’une approche qui laisse la chance au conseiller et à son client de s’entendre sur le mode de paiement qui leur convient le mieux.
«C’est bien d’avoir un cadre mieux défini, mais donnons la possibilité aux acteurs de le personnaliser en fonction des clients. Obliger tout le monde à fonctionner de la même façon, je trouve ça un peu paternaliste comme approche.»
La création d’une rente longévité à l’ensemble des Québécois ne lui apparaît donc pas comme une solution parfaite aux problèmes du système de retraite du Québec.
Il suggère plutôt de prendre exemple sur le Royaume-Uni, où une sorte de régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) avec un enrôlement automatique a été mis en place, et de miser sur l’éducation financière.
«Au Québec, le problème c’est que beaucoup d’employeurs ont un régime auquel bon nombre de leurs employés n’ont pas droit. Au Royaume-Uni, l’enrôlement automatique touche tous les employés et est refait tous les deux ou trois ans.»
«De plus, il faut parler davantage de littératie financière, mentionne-t-il. Des choses doivent être faites en amont pour que les gens fassent de meilleurs budgets, dépensent mieux et épargnent mieux. Tout ça devrait se faire à l’école, et non pas lorsqu’on travaille 60 heures par semaine et qu’on a davantage d’argent, mais aussi peu de temps et des enfants à charge.»
Standard Life s’engage d’ailleurs beaucoup dans la question de la préparation à la retraite et a mis en marche, en octobre dernier, sa campagne contre l’inertie financière.
Charles Guay croit fermement au rôle des institutions financières dans la promotion de l’éducation financière.
«Nous avons un rôle social à jouer, qui va au-delà de l’entreprise pour laquelle nous travaillons. Il a été démontré qu’avec la baisse des taux et la crise financière, beaucoup de gens sont restés sur la touche et ont beaucoup perdu au change. Toute une couche de la population aura un sérieux problème de qualité de vie à la retraite. La société doit se pencher sur ce problème.»