Le gouvernement veut donner à l’Agence du revenu du Canada (ARC) plus de temps pour réévaluer les déclarations des contribuables et le pouvoir d’imposer de nouvelles pénalités importantes si les contribuables ne fournissent pas les renseignements qu’elle lui demande.
Le budget fédéral 2024 proposait de modifier les dispositions relatives à la collecte de renseignements de la Loi de l’impôt sur le revenu afin « d’améliorer l’efficience et l’efficacité des vérifications fiscales et de faciliter la perception des recettes fiscales en temps plus opportun. »
Les nouvelles pénalités proposées et la prolongation de la période de réévaluation vont « piquer » les contribuables soumis à un contrôle, estime Hemal Balsara, responsable de la planification fiscale, de la retraite et de la succession chez Manuvie, à Toronto. « Si, en fin de compte, le contribuable fait l’objet d’une nouvelle cotisation, il devra non seulement payer l’impôt supplémentaire, mais il devra aussi payer la pénalité », continue-t-il.
Selon les propositions, l’ARC serait autorisée à émettre un nouvel avis appelé « avis de non-conformité ». Cet avis serait émis lorsqu’une personne n’a pas respecté les avis précédents de l’ARC ou les exigences en matière d’assistance ou d’information.
Notamment, l’ARC serait autorisée à prolonger la période normale de nouvelle cotisation pour la question liée à l’avis d’inobservation de la durée de l’avis.
L’ARC serait également autorisée à prolonger la période normale de nouvelle cotisation pour tous les contribuables qui ont demandé une révision judiciaire d’une exigence ou d’un avis émis par l’ARC. La prolongation couvrirait la durée du contrôle. C’est généralement le cas actuellement, mais les règles ne s’appliquaient pas à toutes les situations.
La proposition contenue dans le budget prévoit également deux nouvelles sanctions.
La première s’appliquerait à toute personne ayant reçu un avis de non-conformité et s’élèverait à 50 dollars pour chaque jour où l’avis est en suspens, jusqu’à concurrence de 25 000 $ (la pénalité serait annulée si l’avis de non-conformité était annulé). (La pénalité serait annulée si l’avis d’inobservation faisait l’objet d’un recours fructueux.)
La deuxième pénalité s’appliquerait lorsque l’ARC obtient un ordre de mise en conformité à l’encontre d’un contribuable, et serait égale à 10 % des impôts dus. La pénalité ne s’appliquerait que si l’ordre concerne des impôts dus de plus de 50 000 $ au cours d’une année, et vise à « inciter les contribuables à se conformer à la demande initiale d’information ou d’assistance », selon le budget.
Actuellement, la principale conséquence du non-respect d’une ordonnance de mise en conformité est une ordonnance pour outrage au tribunal, « qui prend du temps à obtenir et n’impose généralement pas un coût financier important au contribuable », selon le budget.
Si elles sont adoptées, les propositions créeront une grande incertitude pour les contribuables, étant donné que les litiges fiscaux peuvent prendre des années ou des décennies avant d’être réglés, a déclaré Osler, Hoskin & Harcourt dans un rapport publié le 16 avril.
L’ARC pourrait émettre un avis de non-conformité indépendamment du fait que le contribuable se soit finalement conformé à l’ordonnance ou que les informations recueillies aient donné lieu à des impôts supplémentaires à payer.
« Les propositions permettraient à l’ARC d’imposer des conséquences immédiates si un contribuable s’oppose à fournir certaines informations demandées ou à respecter le délai dans lequel elles ont été demandées, en plaçant la charge sur le contribuable de démontrer qu’il a fait tout ce qui était raisonnablement nécessaire pour se conformer ou que l’avis est déraisonnable, indique le rapport d’Osler. En conséquence, la pénalité peut conduire l’ARC à être plus agressive en émettant des demandes d’information ou d’assistance trop larges et potentiellement déraisonnables. »
En outre, les contribuables confrontés à des pénalités pourraient être découragés « de contester légitimement la portée des demandes de l’ARC, même lorsque la demande de l’ARC est déraisonnable, prévient encore le rapport Osler. On pourrait penser que la meilleure façon de traiter cette question est d’imposer une pénalité uniquement lorsque l’ARC obtient un ordre de conformité et que le contribuable ne s’y conforme pas, plutôt que d’autoriser une pénalité dans tous les cas où l’ARC obtient un ordre de conformité. »
Hemal Balsara estime que l’extension proposée des pouvoirs de l’ARC en matière de collecte d’informations est cohérente avec d’autres demandes de transparence accrue de la part des contribuables. Il a cité en exemple les règles élargies de déclaration des trusts, le régime des transactions à déclarer et à notifier, et le registre des bénéficiaires effectifs.
Les amendements proposés dans le budget prévoient également de permettre à l’ARC de :
- demander une ordonnance de conformité lorsqu’une personne n’a pas respecté l’obligation de fournir des renseignements ou des documents provenant de l’étranger
- demander que les renseignements ou documents requis soient fournis sous serment ou affirmation solennelle.
Toutes les modifications entreront en vigueur une fois que la législation les mettant en œuvre aura reçu la sanction royale.