Les chances d’une réduction des taux d’intérêt de la Banque du Canada en juin semblent se rétrécir avec le dernier rapport sur l’emploi de Statistique Canada qui montre que l’économie canadienne a ajouté 90 000 emplois le mois dernier.
La création d’emplois a largement dépassé les attentes des prévisionnistes et constitue la plus forte augmentation de l’emploi depuis plus d’un an.
Le taux de chômage est demeuré stable à 6,1 % au pays en avril. Au Québec, l’emploi a augmenté de 19 000 — représentant la première hausse marquée depuis septembre 2023 — et le taux de chômage a progressé de 0,1 point de pourcentage pour atteindre 5,1 %.
Selon Statistique Canada, la hausse de l’emploi au pays en avril a été majoritairement attribuable au travail à temps partiel, qui a augmenté de 1,4 %, et au secteur privé.
Aux yeux de James Orlando, directeur économique de la TD, les chiffres de l’emploi ont été un « véritable choc » et ceux-ci « n’étaient même pas dans le domaine des prévisions de qui que ce soit ».
La hausse de l’emploi en avril constitue la plus forte augmentation mensuelle depuis janvier 2023.
Le rapport de vendredi intervient alors que les économistes s’attendaient largement à ce que la banque centrale commence à abaisser son taux directeur en juin ou juillet. La Banque du Canada a été particulièrement encouragée par les progrès réalisés en matière d’inflation et a signalé qu’elle se rapprochait d’une baisse des taux.
Mais les derniers chiffres sur l’emploi rendent les marchés financiers moins certains d’une baisse des taux d’intérêt le mois prochain.
La TD prévoit toujours une première réduction en juillet. D’après James Orlando, attendre jusqu’en juillet donnerait à la banque centrale plus de certitude qu’elle ne réduirait pas les taux d’intérêt prématurément.
« Cela donne simplement à la Banque du Canada un peu plus de temps pour s’assurer que l’environnement économique actuel (…) n’entraîne pas une hausse de l’inflation », affirme-t-il.
L’enquête sur la population active d’avril suggère qu’il y a peut-être un meilleur dynamisme économique au deuxième trimestre, ce qui pourrait se traduire par une hausse des dépenses de consommation, avance James Orlando.
Des emplois se sont notamment ajoutés dans les secteurs des services professionnels, scientifiques et techniques, des services d’hébergement et de restauration, des soins de santé et de l’assistance sociale, ainsi que des ressources naturelles.
L’emploi a cependant reculé dans le secteur des services publics.
Le salaire horaire moyen des employés a progressé de 4,7 % d’une année à l’autre le mois dernier, après avoir augmenté de 5,1 % en mars.
Se fier aux tendances à long terme
L’économiste en chef de BMO, Douglas Porter, considère également que le rapport de vendredi donne à la Banque du Canada « une certaine pause ».
Mais Douglas Porter croit que la banque pourrait choisir de se concentrer davantage sur les tendances à long terme, ce qui suggère qu’une stagnation de l’économie s’accentue.
Douglas Porter mentionne que BMO s’attend toujours à une première réduction des taux d’intérêt en juin, mais il précise que cette décision nécessiterait que le prochain rapport sur l’inflation montre des progrès significatifs.
Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a généralement mis l’accent sur les tendances plutôt que sur un rapport économique particulièrement fort ou faible.
Si l’on considère la situation dans son ensemble, il est clair que la hausse des taux d’intérêt a eu des conséquences néfastes sur la croissance économique et sur le marché du travail.
La croissance démographique a dépassé la création d’emplois au cours de l’année dernière, ce qui a fait grimper le taux de chômage d’un point de pourcentage. Il y avait 1,3 million de personnes au chômage en avril.
Par rapport à l’année dernière, le chômage est en hausse dans tous les principaux groupes démographiques, les jeunes étant les plus touchés, a indiqué Statistique Canada.
Bien que le rapport de vendredi ait modifié les attentes, les économistes affirment que le rapport sur l’inflation d’avril sera le facteur décisif lorsqu’il s’agira de décider si la Banque du Canada réduira ou non ses taux d’intérêt en juin.
« Si l’inflation montre une nouvelle tendance à la baisse, je pense que cela ouvre la porte à une éventuelle réduction en juin », soutient James Orlando à propos de la Banque du Canada.
« Mais ils doivent considérer les choses de manière assez globale. Et la durabilité de l’inflation, tombée à environ 2 %, dépend de l’économie qui ne reprend pas trop », ajoute-t-il.
L’inflation annuelle du Canada était de 2,9 % en mars, dans la fourchette cible de 1 à 3 % de la banque centrale. Les mesures de l’inflation fondamentale, qui excluent la volatilité des prix, ont également continué à baisser.
Le taux d’intérêt directeur de la Banque du Canada se situe actuellement à 5 %, soit son niveau le plus élevé depuis 2001. Sa prochaine décision sur les taux d’intérêt est prévue pour le 5 juin.