Poignée de main de gens d’affaires.
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Former une équipe de conseillers peut apporter de nombreux avantages pour chacun des représentants qui en sont membres, dont celui d’améliorer le service à leurs clients. Or, ce mariage doit être célébré pour les bonnes raisons et fondé sur des bases mutuellement profitables, car le risque de séparation fait aussi partie de l’équation.

Subir un divorce professionnel entre deux conseillers n’est jamais drôle. Il risque plutôt d’être douloureux et coûteux. Ces dernières décennies, notre équipe a observé différents cas de rupture de liens professionnels entre groupes de conseillers. Des représentants poursuivent leur chemin sur des voies différentes en raison d’orientations stratégiques divergentes, d’accumulation de facteurs irritants, de méthodes de travail différentes, de conflits de personnalités, etc. Certaines séparations s’expliquent par la retraite d’un conseiller ou la maladie. Les raisons sont souvent variées et chaque cas est unique.

Sauf que, en général, ce divorce engendre des coûts multiples qui peuvent parfois être oubliés ou minimisés au moment de sceller l’union de représentants, souvent bien des années plus tôt.

Il en résulte souvent qu’un des ex-associés part chez un autre courtier, emportant une partie de sa clientèle, mais parfois pas toute. Même s’il peut recevoir un dédommagement de la firme de courtage qui l’accueillera, celui-ci risque d’être insuffisant pour couvrir le manque à gagner découlant de tous les efforts qu’il devra investir pour faire transférer chacun de ses clients vers la nouvelle firme de courtage. C’est sans compter le risque d’attrition d’une partie de la clientèle, qui préférera rester auprès de l’ancien courtier pour différentes raisons.

Les efforts du conseiller transfuge représentent pour lui un coût d’opportunité relatif au développement des affaires qui peut être grand considérant tout le travail nécessaire pour « atterrir » dans sa nouvelle firme. Le temps étant une ressource rare pour les conseillers, ce transfert chronophage peut lui faire perdre de précieux mois à faire croître ses affaires qu’il n’aurait pas perdus si le mariage avec son ex-associé avait perduré.

Même lorsque les ex restent dans la même firme de courtage ou auprès du même agent général, la situation n’est pas toujours simple ni exempte de coûts. Défaire l’équipe ou en former une nouvelle peut faire perdre un temps utile aux conseillers qui se séparent, ne serait-ce que pour communiquer le tout aux clients, orchestrer la séparation des comptes et effectuer toutes les tâches découlant de la réorganisation post-rupture.

À une certaine époque, un dirigeant d’une firme de courtage nous confiait qu’il défaisait autant d’équipes qu’il en faisait, certains conseillers apprenant à la dure qu’il n’y a pas juste des avantages à travailler en équipe.

L’idée ici n’est pas d’être rabat-joie ou de prôner l’indépendance des conseillers à tout prix. Au contraire. Comme l’indiquent éloquemment plusieurs textes de notre dossier Focus sur les conseillers, on découvre de nombreux bienfaits aux équipes.

Par exemple, les conseillers en équipe sont considérablement plus susceptibles d’avoir mis en place un plan de succession ou de relève documenté pour leurs activités.

Planification de la relève, offre de service bonifiée et étendue aux clients, spécialisations des tâches pour les conseillers, croissance accrue des activités de chaque conseiller, meilleure productivité : les avantages sont là.

Ce n’est pas étonnant que la moitié des représentants sondés à l’occasion du Pointage des courtiers multidisciplinaires et les trois quarts des répondants au Pointage des courtiers québécois de plein exercice soient regroupés en équipes. Les dirigeants de ces firmes ont raison de faire la promotion des équipes. Lorsque la chimie entre les coéquipiers est là et lorsque le mariage est fait pour les bonnes raisons, tout le monde y gagne : clients, conseillers, courtiers et industrie financière.

Le but de ce texte reste de montrer que ce genre d’union comporte des risques qu’on doit calculer et surtout éviter d’ignorer, même s’ils sont faibles. Il vise également à nuancer quelque peu les textes de ce dossier. Finance et Investissement prévoit d’ailleurs en publier d’autres sur le thème des équipes prochainement.

À l’occasion des deux sondages mentionnés précédemment, certains conseillers ont ciblé des raisons pour continuer de pratiquer en solo : plus grande simplicité, désir d’autonomie dans la prise de décision, absence de confiance envers les autres conseillers. « Je suis bien seul », résume un répondant.

Pourtant, bon nombre de conseillers qui travaillaient en solo l’hiver dernier étaient ouverts à l’idée de former une équipe avec d’autres représentants afin de planifier leur succession, croître plus rapidement et mieux servir leurs clients.

Loin de nous l’idée de tomber dans la psycho pop, mais les conseillers, en tant qu’entrepreneurs, doivent bien se connaître eux-mêmes avant de former une équipe et en comprendre les défis. Parmi ceux-ci, on note le risque de conflits de personnalités, de conflits de valeurs, l’échec sur le plan de la gestion des partenaires et employés.

« La nouvelle génération, c’est un défi pour les intégrer. Ils veulent être patrons tout de suite sans faire leurs classes », témoigne un conseiller.

Les firmes de courtage ont également un rôle à jouer afin de favoriser des mariages heureux et trouver des solutions pour qu’ils durent. Elles devraient contribuer entre autres à résoudre les conflits pour éviter qu’ils ne s’éternisent, favoriser la cohésion des équipes et épauler les conseillers afin de composer avec les inévitables enjeux de gestion des ressources humaines. Et dans certains cas, accompagner les conseillers afin de bien orchestrer leur divorce professionnel.

La bonne nouvelle est que les dirigeants des courtiers en sont conscients et accordent généralement du soutien en ce sens aux conseillers. Car pour eux aussi, il est bénéfique de composer avec des équipes fondées sur des bases mutuellement profitables.

L’équipe de Finance et Investissement