plusieurs avions en papier. Trois suivent une voie linéraire, le dernier, le seule rouge coupe la route des autres pour suivre un autre chemin
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En théorie, les séries de fonds négociés en ­Bourse (FNB) devraient avoir des rendements très semblables dans leurs deux véhicules respectifs – un FNB doublé d’un fonds commun de placement (FCP) –, tous deux ancrés dans un même portefeuille ­sous-jacent. En pratique, cette similitude ne se vérifie pas toujours.

Depuis l’apparition de la première série FNB dans les dernières années de la décennie 2010, le secteur n’a cessé de gagner en popularité, leur nombre atteignant 234 séries en septembre 2024 selon ­Valeurs mobilières ­TD. Un FNB est un fonds d’investissement indépendant alors que la série FNB est une catégorie de titres cotés sur une Bourse, offerte par un fonds commun de placement traditionnel. D’un même portefeuille d’actifs, un manufacturier tire différentes séries, dont une négociable en Bourse : la série FNB. « ­Ce qui était auparavant deux solitudes, les FNB passifs et les FCP actifs, tend de plus en plus à se RAPprocher », souligne Elliot Johnson, chef des investissements à Evolve ETFs.

Le rapprochement entre FCP et FNB peut suggérer que les deux outils maintiennent une Gestion active. Ce n’est pas nécessairement le cas, prévient ­Erika ­Toth, directrice, distribution des FNB à BMO Gestion mondiale d’actifs. « ­Les 22 séries que nous offrons sont gérées activement, et c’est le cas chez la plupart des fournisseurs », ­dit-elle. On peut avoir affaire à un FCP qui est une collection de FNB, ­explique-t-elle, chacun suivant un indice précis ou obéissant à une Gestion automatisée par algorithme.

Un produit structuré en deux formats

« ­Nous avons été les premiers FNB à lancer en 2018 une catégorie attenante de FCP », affirme Elliot Johnson. Un de ces fonds, le Enhanced Yield Bond Fund, qui affiche le symbole très éloquent ­BOND dans sa version FNB, est un portefeuille construit autour du FNB 20+ Year Treasury Bond (TLT) d’iShares auquel le Gestionnaire ajoute une couche de protection d’options.

« ­Cette stratégie de couverture d’option est la part active, explique le Gestionnaire, où nous vendons des calls (options d’achat) pour augmenter le rendement du portefeuille. Ces ventes s’appliquent à environ 50 % des actifs en portefeuille. Nous récupérons ces primes d’options sur une base quotidienne et nous les négocions un peu hors cours sur des durées d’un mois. On sacrifie ainsi un peu des gains à la hausse de façon à offrir un rendement stable. »

La stratégie a été « un succès pour nous, lance Elliot Johnson. Depuis son lancement il y a un an, nous avons récolté 293 millions de dollars ». La série a été populaire autant dans sa version couverte et non couverte contre le risque de devises que dans ses séries A et F de fonds communs. L’initiative des banques centrales a beaucoup favorisé cette stratégie : « ­Sans les baisses de taux d’intérêt, nous n’aurions probablement pas connu le même succès », note Elliot Johnson.

Un fonds de couverture à l’origine en deux versions

À l’inverse du produit d’Evolve, le Credit Opportunities Fund de Purpose ­Investments a débuté sa carrière en 2013 en tant que fonds de couverture. Assez rapidement après que la nouvelle catégorie des fonds alternatifs liquides eut été admise au Canada, la société a créé en 2019 une version de son fonds conforme à cette nouvelle catégorie qui correspondait à un FCP. Puis, en 2021, la série FNB du même portefeuille a été lancée, offrant une valeur liquidative quotidienne en ­Bourse sous le symbole CROP.

Les fonds alternatifs liquides se distinguent par leur capacité à réaliser des ventes à découvert et utiliser le levier de l’endettement. Le ­Credit ­Opportunities ­Fund investit dans des titres de dette (obligations d’entreprises à haut rendement ou de qualité investissement, prêts bancaires, titres en détresse), parfois aussi dans des actions privilégiées, mais sans effet de levier, uniquement en vendant à découvert certains titres ou certains secteurs.

Par exemple, en 2020, lors de la chute des contrats à terme sur le pétrole en territoire négatif, le fonds a vendu à découvert le baril de pétrole West Texas Crude tout en achetant les obligations de compagnies pétrolières. « ­Notre couverture s’est avérée très profitable, même si nous avons perdu sur les obligations des firmes pétrolières, explique Sandy Liang, directeur des titres à revenu fixe chez Purpose. Nous visons à donner des rendements totaux semblables à ceux des actions, mais avec moins de risque. »

Les deux outils de placement, le fonds commun et le FNB ­CROP, sont tous deux ancrés dans la même stratégie du fonds de couverture original, qui n’a pas changé depuis sa création en 2013. « ­Les deux fonds sont des alternatifs liquides, sauf qu’on peut les acheter soit en tant que fonds commun, soit en tant que FNB », insiste Sandy Liang.

Élargir le bassin d’investisseurs potentiels

Pourquoi cette double personnalité ? ­Chacune correspond aux besoins d’investisseurs différents. « J’ai des clients qui ne veulent pas acheter des FNB, seulement des FCP, affirme Elliot Johnson, et vice versa. » ­En offrant deux outils de placement greffés au même tronc d’un portefeuille commun, les manufacturiers de fonds « peuvent ainsi avoir accès à un plus grand nombre d’investisseurs, soutient Erika ­Toth. Les conseillers, par exemple, préfèrent acheter des FCP et n’ont pas à se préoccuper d’écarts ­achat-vente en fin de journée, alors que c’est ce que d’autres recherchent. Aussi, les FCP facilitent les prélèvements systématiques de revenu, ce qu’on ne peut pas faire avec les FNB ».

Entre les deux formats FNB et FCP, « la performance devrait être très semblable », avance ­Erika ­Toth. On peut voir de minces différences entre les deux types de fonds, explique-t-elle, à cause du coût rattaché à l’écart cours ­acheteur-vendeur pour le FNB et le ratio de frais de transaction pour le FCP, mais elles devraient être minimes. À cela, il faut aussi rattacher les frais de Gestion des différentes catégories de FCP.

C’est ce qu’on constate pour le fonds de Purpose Investments. Sur un an au 29 novembre 2024, le FNB a donné un rendement de 15,62 % ; sur trois ans, de 4,41 %. La série F de l’équivalent FCP a donné 15,59 % et 4,26 % pour les mêmes périodes, la série A, 14,69 % et 3,25 %. Du côté des fonds de Evolve, les écarts peuvent être un peu plus grands, mais ils tiennent essentiellement aux différentes stratégies de couverture de change. Ainsi, le FNB avec couverture du dollar canadien a donné un rendement de 3,56 % sur un an au 30 novembre 2024, alors que le FCP équivalent (EVF401, série A) a donné un rendement de 3,58 %, et le FCP de série F, un rendement de 2,63 %.

Cependant, les résultats de certaines séries FNB peuvent diverger de façon inattendue. Par exemple, le FNB ­SIA ­Fonds ciblé d’actions canadiennes (ZFC) de BMO Gestion mondiale d’actifs présente les résultats suivants au 30 novembre 2024 : 1 an : 16,07 % ; 3 ans : 7,17 % ; 5 ans : 7,08 %. Le FCP équivalent de série F, pour sa part, affiche 1 an : 16,82 % ; 3 ans : 5,03 % ; 5 ans : 7,14 %. Pour tous deux, le ratio de frais de Gestion (RFG) est de 0,83 %. Par ailleurs, le FCP de série A affiche pour 1 an 15,6 % ; 3 ans, 3,94 % ; 5 ans, 5,77 %. Ici, on peut supposer que le ­RFG de 1,9 % peut faire une différence sensible.