Parlons tout d’abord de l’impact des changements démographiques sur nos finances publiques. Les revenus gouvernementaux risquent de ne pas être au rendez-vous. Une croissance plus faible du produit national brut (PNB) et une proportion accrue de retraités (qui ont des revenus plus faibles que durant la vie active) sont deux arguments appuyant mon hypothèse.

D’ailleurs, lors de son budget, l’ex-ministre des Finances, Nicolas Marceau, a dit que le Québec n’avait pas un problème de dépenses mais de revenus. Les dépenses gouvernementales dans le domaine de la santé devraient aussi croître plus vite que l’économie malgré les efforts du ministère de la Santé.

En effet, la tranche de gens de 50 ans et plus dépense en moyenne cinq fois plus per capita que celle des 50 ans et moins. Il va sans dire que c’est la première qui croît le plus rapidement en nombre. Le gouvernement devra aussi revoir beaucoup de ses programmes pour les adapter à une population différente. Ce ne sera pas facile, notamment en raison de la tendance des gouvernements à ajouter des programmes sans enlever les anciens.

Les gouvernements, ayant une durée de vie très courte, préfèrent, sauf lorsqu’ils n’ont pas le choix, éviter les changements brusques de politiques qui pourraient aliéner les électeurs. Donc, malgré des déclarations publiques pro-austérité du gouvernement, je crains plutôt une augmentation de la dette publique. Nous seront chanceux si celle-ci n’augmente pas plus rapidement que le PNB.

Politique monétaire

La politique fiscale étant presque paralysée, on a recours à la politique monétaire pour tenter de relancer la croissance. Les autorités monétaires ayant clairement plus peur de la déflation que de l’inflation, les taux d’intérêt sont gardés le plus bas possible pour le plus longtemps possible. Des interventions sur les taux d’intérêt de plus long terme sont même devenus acceptables (assouplissement monétaire).

Le but est de pousser les gens à dépenser ou investir capital et de diminuer leur épargne dans l’espoir que ca va repartir l’économie. En effet, pour que nos finances publiques retrouvent leur santé, l’économie doit croître à un taux plus élevé que le taux d’intérêt de long terme.

Le succès de cette politique est, au mieux, mitigé. En effet, la croissance de cette reprise est décevante. Par contre, nous avons, jusqu’ici, évité une période de déflation. À ce stade, la conclusion est simple : les taux d’intérêt resteront plus bas que nos attentes et probablement pour plus longtemps que la majorité des experts prévoit.

En choisissant cette voie, les autorités s’orientent vers le choix qui fait le moins mal. C’est normal de choisir cette option, car les autres choix ne sont pas très attirants ou pas totalement sous notre contrôle. Ces options prennent différentes formes d’ajustement qui doivent passer par des mécanismes plus douloureux.

On peut augmenter notre productivité en réduisant le coût de main d’oeuvre, ce qui n’est pas populaire, ou en dévaluant notre devises, avec des effets secondaires non-désirés comme un appauvrissement relatif de notre population. On peut augmenter les revenus gouvernementaux à travers des taxes, appropriation ou la vente d’actifs. C’est ce que la Grèce fait et personne, jusqu’à présent. ne louange le succès économique de cette politique.

Rupture du contrat social

La démographie vieillissante, jumelée aussi au nombre total croissant de la population, va forcer les gouvernements du monde entier à revoir les promesses faites à la population. L’atteinte d’un niveau de vie élevé (le contrat social sous-jacent dans bien des pays) pour tous, alors que la croissance économique décroit et que la dette accumulée a atteint des sommets historiques, est remis en question.

Une conclusion simple et cartésienne est que les gains relatifs de richesses des habitants des pays pauvres doivent être nourris par les pertes relatives des pays plus favorisés. L’idée que la croissance de la tarte totale sera suffisante pour que tous y gagnent est évidement séduisante, mais m’apparait utopique.

On est dans une période où les gouvernements et la population devront réinventer le contrat social. Ça me semble inévitable même si ce n’est pas très sympathique. Retarder le processus va seulement le rendre plus douloureux et les pays qui se prêteront a l’exercice le plus rapidement et sérieusement possible se retrouveront dans une position très avantageuse a la sortie du tunnel.

 La démographie est une tendance lourde qui ne peut être renversée à court terme par des actions traditionnelles. Donc, vaut mieux s’adapter que tenter de résister. Darwin nous a bien expliqué que ce n’est pas le plus fort qui survit mais celui qui s’adapte le mieux.

 

 

Ce texte provient du Stratège, une publication de l’Association de planification financière et fiscale (APFF), et a été écrit par Pascal Duquette.