Bienvenue dans l’ère de Big Brother ! On collige de façon un peu aléatoire le plus de renseignements possible sur chacun d’entre nous : transactions sur nos cartes de crédit, transactions bancaires, navigation Web, caméras de surveillance.
Ce sont ces renseignements qui composent les mégadonnées, ou données massives. Ces grands volumes d’informations sont impossibles à traiter avec les outils traditionnels de gestion des bases de données. On doit utiliser des ordinateurs de très grande puissance, dont le plus connu est «Watson», d’IBM.
Grâce à un ensemble d’algorithmes, le forage des données (data mining) permet ensuite d’explorer les mégadonnées et d’en extraire les éléments ciblés selon des critères extrêmement précis. Ces résultats sont fort utiles sur le plan commercial.
On sait tout de vous
Les achats que vous réglez au moyen de votre carte de crédit, les paiements par chèque que vous faites à vos fournisseurs, les sites Web que vous consultez et les réseaux sociaux sur lesquels vous échangez fournissent de précieux renseignements qui sont stockés dans les banques de mégadonnées.
En fait, votre institution financière possède deux sources pour constituer sa banque de mégadonnées : ses données internes, et les données externes disponibles publiquement. Dans certains cas, les institutions financières peuvent même s’approvisionner en données auprès de partenaires et de fournisseurs.
Les solutions qui offrent ce qu’on appelle «la vision client 360 degrés» sont parmi celles qui procurent le plus de valeur ajoutée dans le domaine des mégadonnées, selon des études d’IBM.
Cette vision optimisée permet d’améliorer considérablement la connaissance du client, grâce à l’incorporation de sources d’informations internes et externes.
Devancer des besoins
Prenons l’exemple suivant. Pierre est client d’une grande banque. Il y a une carte de crédit, une marge de crédit, un compte chèque et un compte d’épargne.
Pierre rénove actuellement sa cuisine, et il décide d’acheter de nouveaux couteaux. Son institution financière se rend compte qu’au cours des derniers mois, il a acheté des appareils ménagers neufs. Grâce à son activité sur les réseaux sociaux, elle sait qu’il aime cuisiner et qu’il apprécie les bons restaurants.
L’institution financière prévoit qu’il achètera prochainement d’autres articles pour sa cuisine. Par la même occasion, elle constate qu’il dépassera bientôt la limite de sa marge de crédit. Elle lui offre donc de l’augmenter avant qu’un magasin ne lui propose de financer ses prochains achats. La synchronisation (ou plus couramment le timing) est donc très importante.
La banque peut même lui offrir une garantie prolongée sur tous ces nouveaux appareils ménagers.
Par ailleurs, lorsque son compte d’épargne atteint un certain niveau, on lui propose des placements en fonction d’un profilage réalisé à partir de ses habitudes de consommation et de navigation sur le Web.
Début d’une tendance
L’exploitation efficace des mégadonnées est appelée à devenir le nerf de la guerre dans le secteur bancaire, souligne le Toronto Financial Services Alliance dans son rapport intitulé «Stategic Big Data: Why More Data is Better», publié à l’automne 2013 (http://tinyurl.com/lx9jxne).
Le rapport met en relief l’importance pour les institutions financières d’utiliser les mégadonnées pour demeurer au fait des habitudes de consommation de ses clients afin de répondre à leurs besoins de façon novatrice.
Les auteurs expliquent comment la Banque Scotia emploie les mégadonnées pour analyser le risque associé à chaque prêt, et ce, sans se servir de l’historique de crédit du client. D’ailleurs, on juge que l’historique n’est pas toujours pertinent quand il s’agit d’analyser le risque lié au prochain prêt qui sera consenti à un client.
Les institutions financières canadiennes commencent seulement à utiliser les mégadonnées. Elles le font surtout dans un contexte d’analyse de risque (Banque Scotia) ou pour prévenir le piratage informatique.
Cependant, les choses changeront au cours des cinq prochaines années. Le volet «vision client 360 degrés» prendra de l’ampleur et pourrait constituer une menace pour certains conseillers financiers indépendants.
À ce propos, avez-vous vu le film Moneyball (en français, Le stratège) avec Brad Pitt ? Il s’inspire du livre Moneyball: The Art of Winning an Unfair Game, de Michael Lewis, ou l’art de gagner à un jeu inéquitable.
Dans ma prochaine chronique, je vous donnerai des conseils pour tenir tête à ces géants.
laroseg@maisondigilor.ca