Au Canada, des firmes comme WealthBar Financial Services et Wealthsimple Financial offrent de tels services depuis l’automne dernier. Voici qu’elles prévoient aussi s’adresser aux conseillers et aux cabinets, en leur proposant d’offrir des services de base semblables à leur clientèle.
Elles suivraient ainsi l’exemple de la firme américaine Betterment Institutional, qui sert les conseillers depuis octobre 2014. La société a ajouté ce service à son site de base Betterment.com, qui vise directement les épargnants.
La réponse est très forte. En moins de quatre mois, l’entreprise a recruté 83 cabinets de conseil financier, souligne Joe Ziemer, directeur des communications de Betterment.
La firme new-yorkaise a même convenu d’un partenariat avec Fidelity Institutional Wealth Services, qui compte un réseau de 3 000 cabinets-conseils. «Fidelity fait depuis peu la promotion de Betterment auprès de son réseau et nous avons commencé à recruter des membres de ce réseau», précise Joe Ziemer.
En préparation au Canada
Au Canada, les sites de conseillers-robots n’en sont qu’à leurs débuts. D’ailleurs, ils n’offrent pas encore de services en français.
Cependant, un article paru dans le journal Les Affaires au sujet de Wealthbar.com «a suscité une réaction prodigieuse et nous a amené un grand nombre de clients», soutient Tea Nicola, présidente et fondatrice de WealthBar Financial Services, de Vancouver.
Elle annonce que son service sera disponible en français avant la fin de 2015 et qu’il sera appuyé par la présence d’au moins un conseiller au Québec.
Tea Nicola prévoit maintenant offrir ses services aux conseillers. Elle ne pas peut préciser quand elle le fera, mais dit que des discussions sont en cours avec des cabinets à ce sujet.
Pour sa part, Wealthsimple, de Toronto, commence à préparer une version de son site destinée aux conseillers.
La firme n’a pas sollicité de conseillers pour son projet. Ce sont plutôt «des conseillers qui ont communiqué avec nous pour nous dire que nos services leur seraient utiles», affirme le président Michael Katchen.
Services offerts
Voici le type de services que les conseillers-robots fourniraient aux clients des cabinets.
Le client d’un conseiller accéderait au site de conseiller-robot par l’intermédiaire d’une fenêtre exclusive, protégée par un mot de passe, aux couleurs du conseiller et de son cabinet. Il remplirait alors un questionnaire visant à établir son profil d’investisseur.
À partir de ce profil, le site proposerait un portefeuille approprié de fonds négociés en Bourse, dont il assurerait ensuite le rééquilibrage périodique, le réinvestissement des dividendes et l’optimisation fiscale.
Photo : Bloomberg
Pour ces diverses opérations, le fournisseur prélèverait des frais, pour lesquels ni WealthBar ni Wealthsimple n’ont encore fixé de niveau.
«Il s’agirait probablement d’un pourcentage prélevé sur le portefeuille des investisseurs», avance Tea Nicola. C’est le modèle utilisé par Betterment Institutional, qui prélève des honoraires équivalant à 0,25 % de l’actif du portefeuille du client du cabinet.
Les services de conseillers-robots ciblent essentiellement les conseillers rémunérés sur honoraires plutôt que par des commissions de suivi, précise Michael Katchen, «une pratique de rémunération vers laquelle tendent plusieurs conseillers».
Un service comme celui de Betterment présente le grand avantage de libérer le conseiller de certaines tâches, soutient Joe Ziemer.
Le conseiller peut ainsi consacrer plus de temps «au développement de sa relation avec ses clients et aux éléments où son expertise est essentielle : la planification financière, l’épargne-étude, la planification successorale», explique-t-il.
Avis partagés
Les conseillers à qui Finance et Investissement a parlé réagissent de façon différente à l’arrivée de tels services au Canada.
«Je n’utiliserais pas les services de WealthBar ; ils me font concurrence», tranche Lorenzo Pederzani, conseiller principal chez Patrimoine Hollis, une firme torontoise partenaire de Scotia Capital.
David Sung, président de Nicola Wealth Advisor, à Vancouver, ne voit pas les choses ainsi. «Les conseillers-robots sont habituellement présentés comme une menace pour les conseillers. Mais les conseillers devraient voir comment ils peuvent s’en servir pour renforcer leur pratique.»
David Sung pense que sa firme pourrait très bien avoir recours aux services de WealthBar pour ses clients qui ont un portefeuille modeste. (Précisons que Nicola Wealth Advisor a des liens avec WealthBar : son fondateur et président du conseil, John Nicola, est aussi conseiller chez WealthBar.)
«Le client qui possède un actif peu élevé nous coûte cher au départ. Mais son portefeuille va croître avec le temps, et à un moment donné, nous nous occuperons peut-être aussi de ses enfants. Une firme comme WealthBar nous permettrait de bien le servir, à un coût moindre», explique David Sung.
Même son de cloche chez Jason Boudreau, directeur de Vela Wealth Management. Cette firme de Vancouver s’adresse surtout aux épargnants nantis, mais les épargnants moins fortunés représentent de 10 à 15 % de sa clientèle.
«Nous pourrions réorienter ces clients vers un service comme celui de WealthBar, que j’aime particulièrement. Nous sommes en train de revoir nos façons de faire et c’est une solution que nous étudions», précise Jason Boudreau.
Jean-François Rémillard, représentant de courtier en épargne collective au Groupe Mathieu Turgeon, à qui nous avons présenté les projets en cours, juge que «c’est une bonne idée d’affaires».
«J’examinerais cela avec attention, afin de mieux segmenter ma clientèle ou pour filtrer les profils, ou même pour savoir si je suis le type de conseiller qui peut intéresser tel ou tel client.»