Le gouvernement du Québec impose aux institutions financières une surtaxe temporaire de 125 M$ par an, et abolit le taux réduit de la taxe sur le capital des sociétés d’assurance applicable aux primes d’assurance de personnes, mesure qui rapportera 128 M$ par an.
La surtaxe se traduit ainsi par une hausse de la contribution temporaire relative à la taxe compensatoire des institutions financières. Originalement, elle était établie en fonction de trois assiettes d’imposition, soit le capital versé, les salaires versés et les primes d’assurance payables ou taxables, selon le cas.
Cette mesure touche plusieurs cabinets en services financiers, dont Mica Services financiers. «Je trouve qu’ils ratissent large avec le terme « institution financière »», déplore le président du courtier, Gino Savard.
Ce dernier évalue à 16 000 $ par an le coût supplémentaire de cette taxe pour son entreprise. Le cabinet payait déjà 27 000 $ par an sur une masse salariale de 3 M$.
Selon le spécialiste des finances de la firme, Mica fait plus précisément partie de la catégorie «toute autre personne» de la mesure pour laquelle la taxe compensatoire temporaire passera de 0,9 % à 1,44 % en 2015.
Hausse d’impôt
Pour les banques, les sociétés de prêts, les sociétés de fiducie et les sociétés faisant le commerce des valeurs mobilières, le taux de la contribution temporaire pour les salaires versés passe de 2,80 % à 4,48 %.
«C’est normal que tout le monde participe, mais notre cabinet a pas mal contribué dans les dernières années. En 2013, on nous a empêchés de récupérer la taxe sur nos intrants selon le régime de la taxe de vente du Québec, une mesure qui nous a coûté environ 50 000 $ par année. C’était déjà énorme. C’est peut-être exagéré qu’ils s’attaquent encore à nous», soutient Gino Savard.
Même son de cloche chez Guy Duhaime, président du Groupe financier Multi Courtage : «Nous avions déjà été essorés par le retrait du crédit sur les intrants pour la TVQ, entre autres. Cela a représenté une augmentation d’impôts effarante pour nous… des milliers de dollars. Cette nouvelle imposition sur la masse salariale est une autre tuile qui nous tombe sur la tête», fait-il valoir. Depuis 2013, la perte du remboursement de la TVQ payée sur les achats des institutions financières coûte quelque 250 M$ par an à l’industrie selon le ministère des Finances.
Guy Duhaime mentionne que le cabinet tentera de diminuer l’impact de cette mesure sur son budget. Cependant, avec une vingtaine d’employés et une masse salariale d’environ 400 000 $ (excluant certains postes de direction), il croit qu’elle pourrait lui coûter environ entre 7 000 $ et 8 000 $ de plus.
La mesure ne touche cependant pas tous les courtiers. «Essentiellement, elle vise les grosses institutions, mais il existe des nuances pour certains courtiers associés à ces institutions. Toutefois, seules les sociétés qui payaient déjà cette taxe implantée en 2013 seront davantage imposées», a précisé Jacques Delorme, responsable des relations avec les médias au ministère des Finances du Québec.
Il s’agit d’une situation de cas par cas, explique-t-il. «Nous ne voulions pas toucher les petits. Il ne faut pas faire peur aux petits cabinets. Nous insistons pour dire que personne de nouveau n’est touché.»
En outre, la mise à jour économique du gouvernement de Philippe Couillard n’épargne pas les assureurs. La taxe sur le capital qu’une société d’assurance doit payer sur une prime de prestation du vivant versée par l’assuré passe de 2 à 3 %.
On parle notamment de l’assurance vie, de l’assurance maladies graves et de l’assurance invalidité. Il en va de même pour une prime taxable versée à l’assureur ou à son agent dans le cadre d’un Régime d’avantages sociaux non assuré (RASNA).
De plus, le taux de la contribution temporaire pour les primes d’assurance et les sommes établies à l’égard d’un fonds d’assurance passera de 0,30 % à 0,48 %.
Ristournes touchées ?
La taxe temporaire sur la masse salariale pour les caisses d’épargne et de crédit augmente, passant de 2,20 % à 3,52 %. Cela représentera 32 M$ de plus à payer pour le Mouvement Desjardins pour 2015-2016, fait savoir son porte-parole, André Chapleau.
«Il y aura un impact sur la rentabilité globale et la compétitivité du Mouvement Desjardins», souligne-t-il.
Quant à l’augmentation de la taxe sur le capital des primes d’assurance, elle coûtera 22 M$ à la filiale d’assurance de personnes de la coopérative en 2015 et durant les années suivantes. En somme, les mesures d’austérité du gouvernement Couillard auront un effet de plus de 50 M$ sur le budget de Desjardins.
«Ces mesures s’ajoutent à toutes sortes d’obligations qui nous sont imposées dans le cadre des accords de Bâle III qui touchent notre capitalisation», a expliqué André Chapleau.
Ce dernier mentionne que le mouvement coopératif pourrait avoir à gérer ses finances «plus rigoureusement», mais indique qu’il est trop tôt pour savoir comment elle va contrebalancer cet impact. Il n’a pas exclu que les ristournes aux membres puissent être réduites.
Clients touchés et épargnés
La mise à jour économique augmente également le fardeau fiscal de certains clients. En faisant passer de 20 % à 10 % le taux de conversion des crédits d’impôt pour cotisations syndicales et professionnelles, Québec économise 112 M$ par an. Le gouvernement puise également 135 M$ par an dans les poches des automobilistes grâce à l’abolition du taux réduit de la taxe sur les primes d’assurance à l’égard de l’assurance automobile. L’impact moyen annuel pour les utilisateurs de véhicules de promenade est de 20 $, et pour les véhicules utilisés à des fins commerciales, de 28 $.
Québec épargne toutefois certains clients, notamment lors du transfert des biens agricoles ou de pêche à la relève.
Le ministère des Finances a annoncé une hausse de l’exonération cumulative du gain en capital de 800 000 $ à 1 M$ applicable lors de la vente d’une entreprise agricole ou de pêche.
Le gouvernement, qui estime que cette mesure pourrait bénéficier à environ 400 agriculteurs et pêcheurs chaque année, fait état du fait que 40 % des exploitants agricoles ont 55 ans et plus et «qu’il peut être difficile pour les futurs acheteurs, souvent les enfants des exploitants actuels, de réunir les capitaux nécessaires pour financer une transaction de cette envergure».
La réduction de l’impôt à payer sur le gain en capital pourra atteindre 25 750 $. Le gouvernement estime ainsi dépenser annuellement 10,1 M$. La mesure est applicable à compter de l’année 2015.
Elle est bonifiée d’une aide additionnelle introduite dans le cadre de la formule vendeur-prêteur de La Financière agricole du Québec.