Cette observation est tirée d’une étude menée à l’initiative de Finance Montréal et dont les conclusions ont été rendues publiques jeudi. Avec cette étude, KPMG cherchait à évaluer l’impact de l’IA dans le secteur des services financiers à Montréal et à déterminer de quelle façon la métropole pouvait capitaliser sur son leadership dans le domaine afin de renforcer sa position et son attractivité sur le plan international.
Selon KPMG, « l’IA constitue une force transformative dans le secteur des services financiers, tant sur les processus, produits et services que sur les professions ».
La firme évalue que 20 % des entreprises utilisent une ou plusieurs technologies liées à l’IA de façon élargie ou centrale à leurs activités, et que les secteurs des télécommunications et des services financiers sont ceux dans lesquels cette adoption sera la plus marquée, avec une croissance prévue des dépenses en IA de 15 % annuellement pour les trois prochaines années.
Trois risques
Malgré tous, les différents leaders du secteur des services financiers montréalais ont identifié trois principaux risques au développement de l’IA dans le secteur, rapporte KPMG. Outre le faible intérêt pour les services financiers de la part des chercheurs, le rapport évoque une pénurie de talents en IA globale – un phénomène mondial qui n’est pas propre à Montréal – ainsi qu’un écosystème local de fintech qui n’a pas encore atteint une masse critique.
« Alors que le secteur des services financiers québécois emploie présentement plus de 150 000 professionnels, le bassin de talents déjà formé en IA ne sera pas suffisant par rapport à la demande pour ces compétences qui seront nécessaires de façon imminente », indique KPMG. Un risque susceptible d’entraîner un retard dans l’implantation des fondamentaux technologique au sein des institutions financières montréalaises.
Concernant l’écosystème fintech, KPMG constate un manque d’alignement entre les cycles de recherche, davantage menées à long terme sur des problèmes précis, et les demandes des institutions financières, qui concernent souvent davantage le court terme.
De même, compte tenu du fait que l’innovation et le développement de l’IA dépendent en grande partie de l’identification et du partage des problématiques par les institutions financières ainsi que de la disponibilité des données clients, les échanges ne sont pas toujours aisés puisque les relations sont souvent encore « embryonnaires dans l’écosystème montréalais ».
Cet état des choses prive en tout ou en partie les entreprises émergentes de données, ainsi que des problématiques et besoins des institutions financières. Il rend de ce fait « le développement de produits et services fintech plus difficile pour ces dernières » et nuit, ultimement, au développement vers une masse critique de l’écosystème fintech à Montréal.
Cette difficulté d’accéder à certaines données de l’industrie explique aussi en partie le désintérêt des chercheurs pour le secteur des services financiers, analyse KPMG.
On indique dans le rapport : « la faible adoption des technologies de traitement des données massives open source dans les banques canadiennes par rapport à certains leaders aux États-Unis et en Europe fait en sorte qu’elles ont plus difficilement accès à leurs données historiques ». En conséquence, le secteur de la recherche et les firmes en développement oeuvrant en « IA s’intéressent moins aux services financiers, faute de jeux de données pouvant servir de banc d’essai ».
Trois recommandations
« Bien que ces enjeux présentent des risques potentiels au développement de Montréal comme étant un leader mondial dans le domaine de l’IA appliquée aux services financiers, la métropole québécoise possède l’ensemble des ressources et leviers nécessaires afin de les atténuer », écrit KPMG.
Un consensus se dégage autour de trois recommandations pour accélérer l’émergence d’un pôle fintech IA à Montréal.
La première recommandation consiste à promouvoir la croissance d’un bassin de talents qualifiés en IA dans le secteur des services financiers. KPMG rappelle à cet effet que Montréal est notamment le premier pôle mondial de recherche universitaire en IA, avec plus de 250 chercheurs à l’Université de Montréal et à McGill seulement.
À cet effet, les initiatives retenues et mises en œuvre devront ultimement « s’imbriquer dans une stratégie plus large que l’IA dans le secteur des services financiers, et potentiellement tenir compte des besoins en main-d’oeuvre des autres secteurs ».
La deuxième recommandation consiste à identifier des problématiques communes et encourager la collaboration du secteur afin de promouvoir la recherche en IA appliquée au secteur des services financiers. Le but étant d’amener les institutions du secteur à adopter une approche davantage coordonnée.
« Le point de départ de cette initiative serait de regrouper différents représentants des sous-secteurs des services financiers dans le but de définir les quelques enjeux communs et en vertu desquels l’ensemble des institutions bénéficierait d’avancements de la recherche en IA ». KPMG illustre cette approche en évoquant la fraude, qui représente à la fois un risque pour les clients du secteur, de même qu’un risque financier et d’atteinte à la réputation pour les institutions financières et le secteur.
La troisième recommandation consiste à renforcer l’écosystème fintech IA à Montréal par la mise en place d’un dispositif de soutien au développement des jeunes pousses fintechs IA. Cette recommandation s’inscrit toutefois dans l’objectif plus large du développement d’un pôle fintech au Québec, l’IA étant un secteur dans lequel Montréal se différencie à l’échelle internationale.
KPMG souligne que des consultations menées auprès des acteurs de l’écosystème montréalais ont notamment démontré « l’importance de mettre en place des outils facilitant et encourageant la collaboration entre les fintechs et les institutions du secteur des services financiers ».