À cette occasion, il a illustré les effets de différents scénarios de rendements sur l’actif d’un client qui souhaite retirer, à partir de 65 ans, 9 000 $ par an d’un portefeuille de 100 000 $, citant ainsi une étude de cas élaborée par les chercheurs Moshe A. Milevsky et Thomas Salisbury de l’Université York et publiée en 2006.

Le premier scénario illustre un portefeuille qui a un rendement annuel constant de 7 %, le deuxième scénario, de faibles rendements dès le départ (- 13 %, suivis de + 7 % et + 27 %), et dans le troisième, de bons rendements dès le départ (+ 27 %, suivis de + 7 % et – 13 %).

Dans le premier scénario, les épargnes du client dureront jusqu’à l’âge de 86 ans, dans le deuxième, jusqu’à 81 ans, et dans le troisième, jusqu’à 95 ans. L’écart entre le meilleur scénario et le pire s’élève à 14 ans.

«Les conséquences d’une séquence de rendements négatifs ne sont pas négligeables, surtout si l’on considère le risque de longévité de plus en plus présent», remarque Carl Yergeau.

«Un haut taux de volatilité au début d’une période de décaissement aura une incidence majeure en valeur actuarielle à long terme sur un portefeuille», confirme Frédérick Bouchard, directeur retraite, investissements et stratégies financières, représentant en assurance de personnes et en épargne collective chez Services financiers Planica, à Québec.

Avoir une position défensive

Selon Carl Yergeau, l’inflation, la longévité et une séquence boursière de mauvais rendements au moment où un client décide de cesser de travailler sont les principaux risques pour le capital à la retraite.

En ce qui a trait au risque de volatilité et de corrections sur les marchés, «il faut s’assurer d’avoir une proportion suffisante du portefeuille en position défensive pour pouvoir se permettre de décaisser», mentionne Frédérick Bouchard.

Selon lui, un conseiller doit laisser la voie ouverte afin de pouvoir choisir la plus avantageuse, selon le contexte.

D’après lui, la rente viagère qui offre un revenu – souvent mensuel – garanti à vie, représente pour un client notamment une façon de s’acheter la tranquillité d’esprit, au lieu de risquer de subir les contrecoups des marchés.

Importante fiscalité

Idéalement, une rente devrait couvrir de façon périodique les dépenses fixes non négociables du retraité, comme la nourriture et les frais de logement, d’après Carl Yergeau.

Les revenus consacrés aux autres dépenses «à caractère variable», telles que les loisirs, devraient selon lui provenir du fonds enregistré de revenu de retraite (FERR), duquel un retraité a l’obligation de décaisser à partir de 71 ans, conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu.

Les portions consacrées à chacun des placements sont établies au cas par cas selon chaque client et selon le rendement nécessaire à ses besoins, mais avant tout, selon l’aspect de la fiscalité.

«La synchronisation des différents placements (non enregistrés, CELI, REER, portefeuilles corporatifs) au moment du décaissement est souvent oubliée. Pourtant, elle est beaucoup plus importante que toute la planification que je pourrais faire ou que tout rendement que je pourrais aller chercher. Il faut prévoir l’avenir de nos clients tant sur le plan fiscal que sur le plan financier», dit Frédérick Bouchard.

Pas toujours avantageux

Toutefois, actuellement, plusieurs conseillers évitent les placements garantis en raison de la faiblesse des taux d’intérêt.

«À cause des bas taux d’intérêt, nous recommandons rarement la rente. Nous privilégions plutôt des placements plus traditionnels, comme des fonds communs», indique Patrick Ducharme, vice-président, De Champlain Groupe Financier, conseiller en sécurité financière et représentant en épargne collective.

«Avant que les rentes ne deviennent intéressantes, il faudra plusieurs petites hausses de taux d’intérêt», ajoute-t-il. Patrick Ducharme affirme avoir quelques clients qui ont souscrit une rente viagère, mais ce sont des individus qui ont un portefeuille important et qui voulaient s’assurer d’une grande diversification de leur actif.

«Ce sont souvent des personnes âgées seules, qui ont une aversion au risque plus élevée que la moyenne», estime-t-il.

La clé de la sécurité

Frédérick Bouchard précise aussi de son côté qu’il n’y a pas de formule magique pour tenter de minimiser l’impact d’une séquence de mauvais rendements et qu’il existe également plusieurs stratégies complémentaires non traditionnelles telles que l’utilisation d’une marge de crédit hypothécaire. Règle générale, ces solutions dépendent de la situation financière du client.

«Il reste que quand nous expliquons ce qu’est la rente au client, nous la présentons comme l’outil qui offre les meilleures garanties sur le marché. Souvent, ça les tranquillise de diminuer la proportion de revenu fixe de leur portefeuille pour avoir une base de revenus assurés», raconte-t-il.

Carl Yergeau considère que les clients en bonne santé et dont l’espérance de vie notamment est plus élevée, réfléchissent davantage à l’option d’une rente. «L’assureur ne procède pas au bilan de santé de l’assuré, et fixe ses prix en fonction d’une longévité moyenne générale de la population», détaille-t-il.

Ainsi, un client qui vit plus longtemps que les autres affiche un rendement supérieur sur les sommes qu’il a consenties à un assureur pour sa rente.