Le ministère des Finances fédéral a aussi annoncé que le gouvernement et les quatre provinces avaient signé «un protocole d’accord qui officialise les modalités du régime».
«La publication des ébauches aux fins de consultation de la législation provinciale et fédérale proposée marque une autre étape importante de la transition vers le régime coopératif», a indiqué le ministère dans son communiqué.
Provinces au travail
Dave Wild, président de la Financial and Consumer Affairs Authority (FCAA), le régulateur de la Saskatchewan, a indiqué dans une récente entrevue avec Finance et Investissement que la préparation du transfert à un système national de réglementation des valeurs mobilières «occupait une bonne partie du temps» de l’équipe de la FCAA et que c’était «un projet important pour eux».
Il y a aussi du mouvement du côté de l’Atlantique. Par courriel, la Commission des services financiers et des services aux consommateurs du Nouveau-Brunswick (FCNB) a affirmé que le régulateur provincial a commencé à examiner son organigramme afin de s’adapter aux changements prévus «à long terme» par la mise en place du régime coopératif. Le courriel précise que la planification «en est à ses débuts».
La FCNB ajoute qu’en plus de la réglementation des valeurs mobilières, son mandat comportait des responsabilités en matière de réglementation visant l’industrie de l’assurance, les régimes de retraite, les institutions financières et les services à la consommation.
«Des plans à long terme sont en cours d’élaboration afin de s’assurer que la FCNB reste centrée sur son mandat plus large de réglementation une fois la responsabilité de la réglementation des valeurs mobilières transférée à la nouvelle entité nationale. Elle pourra prendre jusqu’à trois ans de plus afin d’y intégrer pleinement le personnel de la FCNB chargé de la réglementation des valeurs mobilières. Durant cette période, nous ne prévoyons pas de perturbation des activités de réglementation ni des fonctions de la FCNB», explique le service des communications de la FCNB.
Rappelons qu’en juillet dernier, le ministre des Finances, Joe Oliver, a annoncé que la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick avaient signé une entente de principe confirmant leur soutien au projet qu’Ottawa appelle maintenant le «régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux».
Après qu’il eut été débouté en Cour suprême pour sa première version du projet, le gouvernement fédéral n’avait pas mis la hache dans son projet initial, mais s’était plutôt attelé à le ficeler différemment, étant même prêt à accepter certaines demandes des provinces.
Par exemple, la Saskatchewan a obtenu la présence à Régina d’un régulateur en chef adjoint qui représentera cette province.
La signature de l’entente de principe a aussi attribué au Nouveau-Brunswick un régulateur en chef adjoint local.
Québec ne sourcille pas
Finance et Investissement a demandé aux autres régulateurs des marchés des provinces s’ils se préparaient déjà à l’éventualité d’un régulateur national des valeurs mobilières, qu’il soit en faveur ou non du projet.
Le porte-parole de l’Autorité des marchés financiers (AMF), Sylvain Théberge, a fait savoir par courriel que celle-ci «n’avait aucun commentaire à formuler sur ce projet qui pour le moment n’a encore aucune portée concrète». En ce qui a trait aux ébauches de loi, elles «ne constituent rien de vraiment nouveau par rapport à ce qui avait déjà été annoncé», selon l’AMF.
D’après la dernière entente de principe, le Québec aurait aussi un siège de régulateur en chef adjoint s’il acceptait de se joindre à une commission nationale.
Le ministère des Finances du Québec affirme également ne pas broncher devant ces ébauches de loi. Andrée-Lyne Hallé, l’attachée de presse du cabinet du ministre des Finances, Carlos Leitao, a simplement répondu par courriel que le ministère avait pris connaissance des nouveaux documents législatifs rendus publics par le gouvernement fédéral.
«La position traditionnelle du Québec dans le dossier est connue et demeure la même aujourd’hui. Pour nous, le système actuel de passeports dessert adéquatement les besoins des provinces et nous avons l’intention de défendre les compétences du Québec», écrit-elle.
Aucun autre régulateur provincial n’a offert de réponse. Daniel Laine, un avocat recommandé par le Bureau des valeurs mobilières du Nunavut pendant les vacances de son président Louis Arki, a refusé de préciser la position du territoire, mais a dit «qu’elle n’était pas nécessairement la même que celle du Québec», et que l’arrivée d’un régulateur national «impliquerait assurément plusieurs changements pour les régulateurs en valeurs mobilières provinciaux».
Coopérative synonyme de coopération ?
Dans son dernier éditorial, notre publication soeur Investment Executive se demandait si, paradoxalement, l’initiative dite coopérative lancée à l’époque par feu Jim Flaherty ne nuirait pas à l’harmonie des provinces si elles n’y coopéraient pas toutes.
Le texte soulignait aussi que la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick occupent «une place modeste dans les marchés financiers canadiens, 4 ou 5 % combinés […], tandis que l’Alberta représente 26 %, et le Québec, 14 % de ces marchés».
Pour sa part, Dave Wild, président du régulateur de la Saskatchewan, dit comprendre et respecter la décision du Québec de ne pas adhérer au projet d’Ottawa.
«Il s’agit d’une juridiction souveraine, et ils doivent prendre leurs propres décisions, note-t-il. De notre côté, nous allons continuer de viser un haut degré de collaboration avec les provinces ou les territoires non signataires, car les marchés financiers, eux, franchissent les frontières, et les investisseurs ne veulent pas de barrière qui empêche l’argent de circuler».
Dave Wild est d’avis qu’une fois sur les rails, l’entité coopérative nationale des valeurs mobilières convaincra d’elle-même les autres provinces et territoires de sauter dans le train. Pourtant, il admet que le système actuel ne lui posait pas problème.
«Nous étions satisfaits [en Saskatchewan] et tout fonctionnait bien ; le système de passeports, la satisfaction des acteurs des marchés de capitaux.»
En fait, celui qui a participé aux négociations entre le ministère de la Justice de la Saskatchewan et Ottawa explique que ces derniers ne considéraient pas ces discussions comme une réflexion sur le système actuel, mais plutôt comme une occasion de créer un meilleur système.
«Nous avons vu le potentiel d’élaborer des politiques plus rapidement et une occasion pour le Canada de parler d’une seule et même voix à l’international.»