La croissance des dépenses, qui, selon le ministre des Finances, Carlos Leitao, devrait être de 1,8 % cette année et de 0,7 % en 2015-2016, fait notamment sourciller Dominion Bond Rating Service ( DBRS) ainsi que Moody’s.
En entrevue, vendredi, le vice-président des finances publiques de l’agence torontoise DBRS, Travis Shaw, a souligné que la commission permanente de révision des programmes du gouvernement Couillard n’avait toujours pas vu le jour.
« Le nouveau comité devra trouver plus de 3 G$ d’ici 2015-2016 et cet objectif demandera des efforts considérables, ce qui soulève des questions quant à savoir s’il est réalisable », a-t-il expliqué.
Travis Shaw n’a pas voulu dire s’il pensait que Québec serait en mesure d’atteindre le déficit zéro dès l’an prochain, mais a ajouté qu’outre le contrôle des dépenses, la croissance économique sera un facteur déterminant.
« La performance n’a pas été au rendez-vous en 2013, ce qui a eu un impact sur les revenus l’an dernier ainsi que sur le budget », a affirmé le vice-président des finances publiques de DBRS.
Le ministre Carlos Leitao prévoit que la croissance de l’économie devrait s’établir à 1,8 % en 2014 pour ensuite atteindre deux pour cent l’année suivante.
De son côté, Moody’s se demande si le Québec, dont le déficit atteindra 2,35 G$ en 2014-2015, sera réellement capable d’atteindre l’équilibre budgétaire dès l’exercice suivant.
Le vice-président adjoint de l’agence new-yorkaise, Michael Yake, ne se gêne pas pour souligner que la province devra radicalement changer ses habitudes de dépenses pour espérer parvenir à son objectif, qu’il qualifie d’« ambitieux ».
« C’est ce qui ressort lorsqu’on regarde l’historique récent du Québec en matière de lutte contre le déficit, a-t-il expliqué. Au cours des quatre dernières années, le déficit n’a pas vraiment diminué dans la province. »
Michael Yake salue la décision de mettre sur pied un comité pour réviser les programmes, une mesure qui, selon lui, a permis de réaliser des économies dans d’autres provinces, mais il rappelle que ce comité n’a toujours pas été formé.
« Peu de détails ont été fournis sur les moyens qui seront mis de l’avant pour freiner la croissance des dépenses, a-t-il dit. Le budget dit que le gouvernement sera conseillé par le comité, mais nous ignorons les recommandations qui seront formulées. »
Le vice-président adjoint de Moody’s retient également que la dette brute du Québec devrait atteindre 54,9 % du produit intérieur brut (PIB) l’an prochain, alors qu’elle était estimée à 54,3 % au 31 mars dernier.
Selon lui, en raison des déficits accrus ainsi que des dépenses en infrastructures, le fardeau de la dette pourrait être appelé à grimper au cours des deux prochaines années, même si Québec désire inverser cette tendance.
« Nous nous questionnons parce qu’il continue à y avoir des déficits, a dit Michael Yake. On se demande à quel point les prévisions (du gouvernement Couillard) sont fermes en ce qui a trait à la réduction de la dette. »
Cote de crédit inchangée
La cote de crédit du Québec n’a pas été modifiée par DBRS _ A (élevé) avec une perspective stable ainsi que Moody’s AA2 avec une perspective stable.
« Nous n’avons pas (encore) apposé d’étiquette sur ce budget, mais le fait que nous n’ayons pas indiqué qu’il était négatif peut être interprété comme un signe », a souligné le vice-président adjoint de l’agence new-yorkaise.
DBRS prévoit rencontrer les représentants du gouvernement du Québec au cours du mois de juin. Une modification pourrait ensuite être envisagée. Moody’s a toutefois refusé de commenter sur ce dossier.
Fitch n’a pas commenté le budget déposé par le ministre des Finances du Québec, rappelant que la cote de crédit de la province demeurait inchangée. Standard & Poor’s a fait de même.
Toutefois, en décembre dernier, Fitch avait placé la note de crédit du Québec sous perspective négative, tout en maintenant sa note de AA-, lorsque le ministre des Finances de l’époque, Nicolas Marceau, avait annoncé un report de deux ans de l’équilibre budgétaire.