«Sans quoi, la vocation disciplinaire qui est à la base même de notre organisme d’autoréglementation sera touchée», a-t-il ajouté.
La question du «chevauchement de juridictions sur le plan disciplinaire entre la CSF et l’AMF», dont fait état Luc Labelle date de quelques années.
Depuis 2011, la Loi sur la distribution de produits et services financiers (LDPSF), en vertu de l’article 115, permet à la CSF et à l’AMF d’entreprendre des procédures disciplinaires contre un même représentant.
Le premier régulateur peut le faire par l’entremise de sa syndique devant le comité de discipline de la CSF, et le second, par l’intermédiaire du Bureau de décision et de révision (BDR).
«Cette mesure est loin d’avoir été recherchée par la CSF», a indiqué Luc Labelle.
Il a ajouté que cette mesure pouvait «certainement créer des dédoublements de justice disciplinaire et occasionner de la duplication d’actions sur le plan des enquêtes et des mesures d’application».
«Il ne faut pas voir dans les propos de Luc Labelle l’indication d’éléments ou de discussions à caractère « nouveau » dans ce dossier», a indiqué le porte-parole de la CSF, Bruno Leblanc, dans un courriel à Finance et Investissement.
«Les doléances de la CSF en rapport avec les amendements à l’article 115 sont les mêmes depuis leur adoption, en 2011. La CSF a des échanges avec l’AMF de temps à autre sur cet enjeu ainsi que sur d’autres défis, qu’ils soient disciplinaires ou autres. Le problème de chevauchement de juridictions sur le plan disciplinaire demeure préoccupant et non résolu, d’où l’allusion de Luc Labelle dans son allocution au Cercle de la finance», a-t-il noté.
Même son de cloche chez le porte-parole de l’AMF, Sylvain Théberge : «Il s’agit d’un sujet sur lequel nous avons effectivement des échanges avec la CSF. Le dossier en est là», a-t-il écrit par courriel.
Retour vers le futur
L’article 115 de la LDPSF permet à l’AMF de saisir le BDR d’infractions déontologiques commises par un représentant en épargne collective si elle le juge opportun.
L’ancien ministre délégué aux Finances, Alain Paquet, déclarait en 2012 dans un article de Finance et Investissement que «l’article 115 de la loi 188 est amendé de façon à permettre à d’autres que l’AMF de déposer des plaintes devant le BDR. On pense notamment aux clients des cabinets de services financiers qui disposeraient ainsi d’une autre façon de se plaindre de leur conseiller.»
«L’objectif est que le BDR puisse avoir juridiction dans tous les domaines. À l’origine, les métiers de l’assurance [n’étaient] pas sous la juridiction du BDR. L’amendement apporté à l’article 115 corrige aussi cette lacune. Le second objectif est de permettre au syndic d’une chambre d’obtenir une radiation, le cas échéant», ajoutait-il.
De son côté, «la CSF s’inquiétait de la confusion que cela pourrait engendrer quant au rôle du syndic et du comité de discipline», mentionnait l’article.
Finance et Investissement a abordé le sujet avec Élise Renaud, avocate et associée chez Fasken Martineau. Celle-ci mentionne que son cabinet a justement éclairci la question des compétences disciplinaires dans une récente rencontre avec l’AMF.
«J’ai entendu parler des doléances de certains représentants par rapport aux »doubles sanctions », mais il faut faire attention. Il s’agit plutôt de pouvoirs scindés entre deux organisations. Il y a une différence entre une radiation de la CSF et une ordonnance de blocage ex parte de l’AMF pour faire bloquer des comptes afin de protéger les investisseurs, soit un pouvoir que la CSF ne peut pas exercer», explique Élise Renaud.