La gestionnaire de portefeuilles de la région maskoutaine, qui ne portait récemment que le titre de conseillère en placements, a réussi cet exploit, non pas en copiant ses collègues masculins, mais plutôt en misant sur sa valeur ajoutée.
« Dans cette industrie, il faut avoir de l’écoute, de l’empathie et une certaine intelligence émotionnelle, des qualités que la femme possède souvent davantage, croit Anik Armand. La femme a également tendance à avoir un comportement beaucoup plus prudent. Beaucoup d’hommes ont, de leur côté, une tolérance au risque un peu plus élevé. Je pense qu’avec la crise de 2008 et les soubresauts du marché des dernières années, les clients n’ont plus envie de courir des risques indus et apprécient le côté beaucoup plus prudent de la femme », fait-elle valoir.
Avant tout, c’est sa rigueur qu’elle met de l’avant lorsqu’elle rencontre ses clients. « Ma business est réglée au quart de tour ! J’ai mis en place une procédure pour chaque étape » souligne-t-elle.
Solidarité vs adversité
Ses réussites n’ont pas été atteintes sans difficulté. Elle raconte qu’à son entrée dans l’industrie il y a plus de vingt ans, elle a aujourd’hui 44 ans, les femmes étaient encore moins nombreuses qu’aujourd’hui dans l’industrie et que le métier de conseiller était considéré par une majorité comme une « affaire d’hommes ».
« Lorsque je recevais des appels de nouveaux clients, il arrivait qu’ils me demandent d’être transférés à un homme. J’ai même déjà sollicité des groupes de femmes nanties de mon âge qui se sont consultées pour me répondre qu’elles me trouvaient très sympathique, mais c’était le travail d’un homme », rapporte-t-elle. L’anecdote date d’environ douze ans.
« C’est sûr que je n’étais pas tellement vieille, début trentaine, mais j’étais surprise que même des femmes ne veuillent pas m’aider. Dans une entreprise qui se développe en vase clos, il arrive que tu te sentes seule et que tu te questionnes sur tes capacités. »
C’est son passage en conformité auprès de la Banque Nationale et de VMD qui l’a aidée à reprendre confiance en sa façon de faire et sa capacité d’avancer comme conseillère en placements, pratique qu’elle reprend sous la bannière VMD en 2007.
Aujourd’hui, elle peut compter sur boîte à outils acquise au fil du temps et qu’elle n’hésite pas à partager avec ses collègues féminines. « Je viens de passer six heures avec une conseillère de Chicoutimi et je lui ai donné tout ce que j’avais ! », mentionne-t-elle.
Elle désire d’ailleurs former un groupe de soutien pour les femmes à l’intérieur de VMD. Anik Armand avoue néanmoins que la solidarité n’est pas toujours au rendez-vous entre les femmes dans l’industrie. Parfois, il y a un esprit de compétition qui prend le dessus.
« Chez Desjardins, il y a beaucoup de femmes, ça aide, car elles ont plus d’ouverture, mais parfois à compétences égales, il y en a qui vont prendre plaisir à choisir le beau monsieur. D’un autre côté, cela arrive aussi qu’à compétences égales un homme va choisir la belle femme », illustre-t-elle.
Espoir
Elle estime néanmoins qu’en général, à moins de patauger dans le même bassin, les femmes en finance désirent s’entraider et échanger. Anik Armand croit d’ailleurs qu’il est essentiel qu’elles le fassent, car la bataille n’est pas complètement gagnée.
« Depuis les 25 dernières années, je vois certainement une évolution. De là à dire que nous avons pris notre place… non ! Je suis allée au Cercle du président, un événement de reconnaissance des meilleurs producteurs de la firme. Sur 50 ou 60 conseillers, nous étions quatre femmes. ».
À la fin de sa carrière, elle espère pouvoir considérer qu’elle a contribué à promouvoir la place des femmes dans le domaine des valeurs mobilières. En ce sens, son objectif est d’amener d’ici dix ans son actif sous gestion à 1 G$.
Photo Bloomberg