Il y a plusieurs façons pour un conseiller de se préparer à l’arrivée du RVER, prévue pour juillet prochain, mais le premier devoir sur lequel ils devraient s’appliquer, croit le planificateur financier, Martin Dupras, est d’établir les différents profils » type » de clients et déterminer pour lesquels ce régime est utile.
En effet, tel que mentionné dans le premier article du dossier RVER de Finance et investissement, un représentant a intérêt à s’attarder aux critères fiscaux. Par exemple, dans le cas d’un investisseur qui a le droit au supplément de revenu garanti (SRG), Martin Dupras mentionne qu’il faut déterminer si l’impôt sauvé par le client à la cotisation va dépasser l’impôt à la sortie et si il existe un moyen de contrer certaines pénalités.
Martin Dupras est tout de même d’avis que le RVER constituera une option pertinente pour plusieurs clients : « Le candidat idéal est celui qui va gagner autour de 20 000 à 30 000 $. Celui-ci va probablement sauver en impôts. Il y a aussi celui qui gagne au moins 15 000 $ lors du décaissement à la retraite, car celui qui gagne en bas de ça, va perdre son avantage en remboursement du supplément de revenu garanti. »
Choisir l’épargne de choix parmi un large éventail
« Le RVER n’est pas la panacée de toutes les situations, c’est un moyen d’épargne parmi une grande gamme de produits. Étant donné qu’on se retrouve avec multitude de régimes de retraite, on ne fait que compliquer la vie du consommateur », est d’avis le planificateur financier Gaétan Veillette. Rappelons que les employés des entreprises visées par le projet de loi seront automatiquement inscrits au RVER de leur employeur, mais auront l’option d’en sortir.
« Aujourd’hui, la problématique est que le consommateur retrouve dans son relevé de portefeuille cinq, six, sept régimes d’investissement, REER, régime de conjoints, régime d’épargne étude, CELI, CRI, etc. Premièrement, comment le consommateur peut-il bien s’orienter là-dedans et deuxièmement, comment le gouvernement peut-il administrer une multitude de régimes comme ça ? », se questionne Gaétan Veillette. Selon lui, le flux financier entre les différents régimes se complexifie de plus en plus.
Il mentionne, entre autres, l’existence du Régime de retraite simplifié (RRS) qui « ressemble déjà beaucoup au RVER ». Le conseil financier est donc plus nécessaire que jamais, croit-il, pour orienter les clients à travers cette pléthore de produits.
De son côté, Nathalie Bachand, planificatrice financière et actuaire ne croit pas nécessairement que l’offre de plusieurs produits est le principal problème pour le client : « Ces régimes représentent un peu tous la même chose en bout de ligne. Le RVER s’adresse aux travailleurs de petites entreprises dont les revenus ne sont souvent pas excessivement élevés. S’il force l’épargne, ce n’est pas mauvaise chose, mais les gens passent en général plus de temps pour acheter un frigo que pour planifier leur retraite et ce n’est pas le RVER qui va changer ça », estime-t-elle.
Rapport qualité prix
L’autre question sur laquelle peuvent se pencher les conseillers d’ici la sortie du RVER est de déterminer si ce régime peut être combiné à d’autres options de placements épargne afin d’avantager l’investisseur.
« Ça va dépendre de ce qu’ils ont déjà de placé ailleurs. À placement et rendement brut équivalent, si quelqu’un a des REER avec une compagnie X dans des fonds équilibrés et qu’il se fait offrir un RVER de même acabit avec des frais de gestion 1,50% au lieu de de 2,25%, il y a de bonnes chances qu’il soit gagnant avec le RVER », explique Martin Dupras.
L’enjeu sera de savoir quelles seront les options de produits offertes par les émetteurs, dit-il. Pour le moment, le gouvernement n’a pas révélé quelles seront les contraintes exactes quant à la composition des portefeuilles.
Comme soulève Gaétan Veillette, plusieurs conseillers se disent inquiets que les bas frais de gestion du RVER exigés par Québec seront fixés au détriment de la qualité de l’offre pour les investisseurs.
« Le nombre de produits offerts pourrait être considérablement limité. Par exemple, on n’investira pas nécessairement dans les pays émergents dont les frais sont plus élevés parce qu’ils comportent une partie d’impôt étranger. Les restrictions ne seront pas toujours dans l’intérêt du client. Il faut se demander ce qui a le plus de valeur pour lui. Est-ce que c’est important pour lui d’avoir accès à un différent nombre de fonds, à une plus grande variété ? », exprime-t-il.
Martin Dupras note aussi que plusieurs conseillers, qu’il a rencontrés lors de formations qu’il donne sur la retraite, lui ont fait part d’une préoccupation. Ils s’inquiètent de voir des institutions financières vendre à rabais des produits clé en main aux employeurs, sans conseils adéquats et bénéfiques pour l’acheteur et les cotisants.
L’école du RVER
De nombreuses firmes offrent, depuis même avant l’adoption du projet de loi sur les RVER, des formations quant à l’arrivée de ce moyen d’épargne retraite automatique. Plusieurs de ces formateurs travaillent notamment en partenariat avec l’Institut québécoise de la planification financière (IQPF) et la Chambre de la sécurité financière (CSF) ou pour les institutions financières elles-mêmes.
Même si la Régie des rentes du Québec (RRQ) a mis un bémol sur l’importance donnée à ces classes, Gaétan Veillette est d’avis que plusieurs d’entre elles représentent de bonnes ressources pour les conseillers. « En général, il s’agit de formations intéressantes avec du bon matériel de référence », dit-il.
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