Trois placements à contre-courant pour 2017
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Sa cuvée de 2016 a été fort rentable: les producteurs aurifères canadiens ont donné un rendement de 40,7%, les équipementiers américains de télécommunications ont gagné 29,6%, tandis que les fournisseurs américains de télécommunications ont grimpé de 33,4%.

Depuis que M. Roberge ajoute cette facette à sa stratégie, il y a cinq ans, ses placements à contre-courant ont procuré un rendement annuel moyen de 22,5%.

L’approche de M. Roberge consiste principalement à se déplacer tactiquement d’un secteur à l’autre, à l’aide d’indicateurs quantitatifs. Il y greffe des choix anticonformistes pour les clients institutionnels qui aiment consacrer une partie de leur portefeuille à des placements plus spéculatifs.

Pour ses idées hors des grands courants, M. Roberge se tourne vers des secteurs impopulaires dont les perspectives ont probablement atteint le fonds du baril, ce qui lui donne un bon rapport risque-rendement.

Les placements sélectionnés rencontrent deux critères: le potentiel haussier du rebond de leur industrie et un risque de baisse limité provenant d’une évaluation attrayante.

Investir loin des foules requiert tout de même un portefeuille déjà bien équilibré et diversifié, ainsi que des nerfs d’acier.

Ses trois choix sont des industries qui ont moins bien performé que les indices depuis trois ans.

1 – Les fournisseurs canadiens de services pétroliers et gaziers : l’année de la relance

Malgré un bond de 34% en 2016, les sociétés qui fournissent les équipements de forage ou qui effectuent les forages pour les pétrolières ont encore du carburant en Bourse, croit M. Roberge.

Même s’il n’est pas convaincu que 50$US soit le nouveau cours plancher pour le pétrole brut après les coupes de production décrétées par l’Opep, M. Rogerge estime qu’un nouveau régime de prix plus élevés devrait graduellement nourrir plus de forages à partir du printemps.

Les producteurs de shale américain à bas coût vendent leur production à l’avance au prix de 57$US le baril. Cette pratique protège les revenus ce qui est propice à l’activation de forages, donne-t-il en exemple.

La hausse de la production, des revenus et des bénéfices des producteurs devrait rejaillir sur leurs équipementiers en 2017. M. Roberge s’attend à une hausse de la demande au premier semestre, suivi d’une augmentation des prix au deuxième semestre.

Il est dans l’intérêt économique des producteurs de pétrole et de gaz de restaurer la santé de leurs fournisseurs, soutient le stratège.

Puisque les équipementiers ont radicalement charcuté leurs coûts pendant la chute du pétrole, toute hausse de la production par leurs clients devrait avoir un effet rapide sur leurs marges.

Signe de la débâcle du pétrole, les cours des équipementiers sont encore de moitié inférieurs à ce qu’ils étaient en 2014.

Et en dépit de leur rebond de 2016, leurs cours s’échangent à un multiple encore raisonnable de 1,6 fois leur valeur comptable, comparativement à une évaluation de 1,9 fois pour l’indice S&P/TSX, dit-il.

Le secteur atteint habituellement son zénith de performance lorsque les cours grimpent à plus de deux fois leur valeur comptable, précise aussi M. Roberge.

Les titres les plus en vue de l’industrie sont ShawCor (SCL, 34,40$), Precision Drilling(PD, 7,90$), Canadian Energy Services(CEU, 7,55$), Mullen Group(MTL, 19,69$), Secure Energy Services(SES, 11,33$), Pason Systems(PSI, 19,06$), Enerflex(EFX, 16,88$) et Energy Services(ESI, 9,65$) au Canada.

Aux États-Unis, M. Roberge suggère le fonds négocié en Bourse VanEck Vectors Oil Services(OIH, 34,68$).

2 – Les titres canadiens de l’aérospatiale : le retour des marchés émergents à la rescousse

Le secteur canadien de l’aérospatial a fait un peu mieux que la Bourse de Toronto en 2016, avec un gain de 19,6%. Cet élan devrait se poursuivre en 2017 grâce à plusieurs facteurs favorables.

L’augmentation de 6% du traffic aérien mondial et le taux de remplissage de 80% des avions gonflent les flux de trésorerie des transporteurs, ce qui leur donne les moyens de remplacer leurs avions.

Si la chute du cours du pétrole de 2015 a réduit l’urgence de se doter d’appareils moins énergivores, le rebond des cours du carburant devrait ramener cet impératif concurrentiel à l’avant-scène, croit M. Roberge.

Les commandes pour les gros porteurs semblent plafonner, mais celle pour les avions monocouloir devrait continuer de croître.

La demande pourrait même surprendre en 2017, en particulier dans les marchés émergents où les flux de trésorerie des transporteurs aériens ont bondi de 14% en 2016, ce qui est généralement de bon augure pour les commandes.

Le potentiel de mesures budgétaires de relance et d’une réforme des impôts aux États-Unis pourrait aussi prolonger le cycle des commandes d’avions.

Le risque à ce scénario concerne le bond du dollar américain qui diminuera la compétitivité de l’industrie américaine de l’aérospatiale à l’étranger.

Pour l’instant, les monnaies des pays émergents résistent relativement bien à la hausse du dollar américain, ce qui préserve un peu de leur pouvoir d’achat, explique M. Roberge.

Au Canada, le huard affaibli devrait aider les fabricants canadiens à rester concurrentiels dans les marchés mondiaux.

En même temps, tous les fabricants canadiens réduisent leurs coûts de main-d’œuvre et maintiennent des inventaires minimums.

Les indicateurs de demande et des coûts pointent donc vers une reprise dans les bénéfices en 2017.

L’évaluation de l’industrie, par rapport au S&P/TSX et à son propre historique, procure aussi une bonne «marge de sécurité ».

Le secteur canadien de l’aérospatial se négocie à un multiple de 0,4 fois les ventes. C’est 78% de moins que le multiple de 1,7 fois les ventes pour le S&P/TSX.

Au Canada, CAE(CAE, 18,39$), Bombardier(BBD.B, $), Magellan Aerospace(MAL, 18,33$) et Héroux-Devtek(HRX, 14,80$) sont les quatre principaux acteurs de l’industrie.

Bombardier semble notamment avoir tourné la page sur sa crise de liquidités et devrait recevoir des fonds frais d’Ottawa peu avant le budget fédéral.

Aux États-Unis, les investisseurs peuvent faire appel au fonds négocié en Bourse PowerShare Aerospace & Defense Portfolio(PPA, 42,27$US).

3 – Les fonds américains de placement immobiliers à capital fermé (REITs): l’inflation des loyers n’est pas terminée

Pour 2017, M. Roberge table sur une répétition de la dernière remontée des taux de 2004 à 2006, pour les fonds immobiliers américains.

Ces titres perdent de la valeur lorsque les taux augmentent parce que les distributions de ces fonds deviennent moins attrayantes par rapport aux rendements que procurent les obligations.

Si l’épisode de 2004 à 2006 est un bon guide, l’impact se fait surtout sentir au début de la hausse des taux, soit les premiers 100 points de base, dit-il.

Par la suite, les taux se stabilisent, même si l’inflation augmente, ce qui fait reculer les taux réels (taux nominaux moins l’inflation), un indicateur favorable pour les fonds immobiliers à capital fermé.

Entre 2004 et 2004, les taux ont explosé de 1 à 5,25%, mais cette fois, les taux américains à long terme devraient rester ancrer près de 2,5% en raison de l’effet de gravité qu’exerce la décision de la Banque du Japon de maintenir son taux repère de 10 ans à zéro.

Étant donné que les prix des maisons augmentent plus vite (52% depuis 2012) que les salaires et qu’il manque de maisons abordables, les Américains devraient rester nombreux à louer, ce qui est bénéfique aux propriétaires d’immeubles à revenu.

Un taux d’inflation supérieur à 2% est aussi bénéfique aux FPI américains, car il signale que l’économie se porte mieux, ce qui permet aux propriétaires immobiliers d’augmenter leurs loyers.

Les loyers augmentent déjà à un rythme de 3,9%, un taux qui ressemble à ceux des sommets de 2002 et de 2007. Les propriétaires ont toutefois encore de la latitude parce que le taux d’inoccupation de 6,8% est le plus bas depuis 1985.

Les FPI américains ont profité des bas taux des dernières années pour acheter des propriétés à bon prix, sans trop s’endetter. Le ratio qui compare le bénéfice d’exploitation de ces fonds aux dépenses d’intérêts (interest coverage ratio) est à un sommet en 20 ans.

Contrairement à la perception générale, les FPI ne sont pas chèrement évalués non plus, ce qui fournit encore une fois un bon coussin de protection.

En fonction de trois mesures d’évaluation distinctes (ratio cours-bénéfices, ratio cours-valeur comptable et le rendement de distirbution), les FPI américains sont 13% plus chèrement évalués que le S&P 500 comparativement à une plus-value moyenne de 26%, depuis 2004.