Clients en deuil
Il est crucial que le conseiller comprenne l’état de deuil dans lequel bon nombre de ses clients peuvent se retrouver, met de l’avant Luc Doyon, psychologue industriel et coach dans les milieux financiers de Drummondville.
La bonne performance des portefeuilles au cours des deux dernières années n’a pas effacé la méfiance et le deuil en matière de finance qu’ont suscités les deux krachs de 2000 et 2008.
Un client qui porte ce deuil et qui a cette méfiance risque d’être tout particulièrement choqué par la découverte des frais qu’il paye à son conseiller quand la règlementation imposera que ceux-ci soient affichés de façon évidente.
«Ceux qui traînent encore les blessures de 2008 et qui n’ont pas vu leur conseiller s’occuper d’eux à ce moment-là» risquent de retomber en crise, prévient Luc Doyon.
Or, il importe au plus haut point que le conseiller «décèle si son client est en crise ou pas», d’après Luc Doyon.
Une crise entraînera deux réactions opposées. Il y a les clients qui vont «péter une coche», comme le dit Luc Doyon, quand la découverte évidente de ce que leur coûtent les services de leurs conseillers «fera déborder le vase». Le représentant devra vite composer avec la situation et trouver «les mots qui calment les maux».
Ce type de client volubile et rageur est toutefois moins dangereux que l’autre, le client silencieux, secondaire, qui contient sa colère «et qui va simplement partir sans rien dire pour se trouver un autre conseiller».
Outils relationnels
Avant d’en arriver à ce point de confrontation, le conseiller bien avisé aura cultivé la sphère des relations avec ses clients – par intérêt personnel, bien sûr, mais aussi par empathie pour la situation de ses clients.
Deux qualités sont requises au départ : la proactivité et la transparence.
Devant les changements à venir, le conseiller a tout intérêt à prendre la situation en main, à rencontrer ses clients et à leur expliquer la structure des frais, laquelle convient mieux à tel client et pourquoi.
«Ces clients seront beaucoup moins surpris au moment de voir leur rapport de placement», (conforme à la nouvelle règlementation en 2016), avance Sara Gilbert.
Le conseiller «relationnel» dispose de plusieurs mécanismes pour animer et intensifier le lien avec ses clients.
En vue des changements de réglementation qui s’annoncent, la première chose à faire est «de s’asseoir avec ses clients et de bien leur faire comprendre quelle est l’offre de services, et comment elle se démarque de celle des concurrents, particulièrement de celle des banques», propose Sylvain De Champlain, président de De Champlain Groupe financier et associé chez Virage Coaching.
La fréquence et la qualité du suivi auprès des clients sont également cruciales et peuvent emprunter différentes voies qu’énumère Sylvain De Champlain : appels téléphoniques, lettres financières, courriels, rencontres, cadeaux à Noël.
«Les meilleures pratiques au Canada communiquent de 10 à 12 fois par an avec leurs clients, rappelle-t-il. Imaginez le conseiller qui appelle seulement une fois par an pour rappeler de contribuer au REER !»
Sylvain De Champlain invite également les conseillers à mettre au point des événements susceptibles d’enthousiasmer leurs clients.
Il donne l’exemple de la conférence téléphonique à la grandeur de l’Amérique du Nord – il compte des clients aux États-Unis – qu’il avait mise en place pendant la crise de 2008.
Un gestionnaire de portefeuille, engagé à plus de 1 000 $ pour une demi-heure, a expliqué aux clients le fil des événements, ce à quoi il fallait s’attendre et comment réagir. L’effet fut wow!
Il ne faut pas savoir être seulement proactif, mais aussi réactif. «Dans quel laps de temps rappelez-vous, surtout quand les marchés chutent ?» demande Sylvain De Champlain.
«Ceux qui ont donné la priorité à l’aspect humain et à la relation sont calmes et sereins devant la venue de la règlementation, observe Luc Doyon. Les autres se rendront compte qu’un mensonge de plus ne passera pas.»
En somme, les changements de la réglementation créeront des occasions de prospection pour des conseillers dotés de fortes aptitudes relationnelles.