Afin de calculer quel pourcentage du revenu de retraite devra être converti en rente, il faut toutefois s’assurer de bien évaluer le budget et les projets de son client à sa retraite. On additionnera des dépenses obligatoires telles que le loyer, l’épicerie et autres frais de base du client, selon François Forget, planificateur financier et directeur administratif de Stratégie financière Impact.
« On veut couvrir les dépenses qui ne sont pas compressibles, dit-il. Ce que je dis au client c’est qu’il faut couvrir les besoins alimentaires de base avec les sources de revenus les plus sûres possibles. Le reste des sommes pourra être mis dans un FERR, un FRV ou un autre type d’investissement.»
Le fait de combiner, dans un portefeuille, une rente à une portion exposée au marché permettra de subvenir aux besoins variables du client, mais aussi de le protéger contre l’inflation, comme l’explique Frédéric Bouchard, conseiller en sécurité financière et directeur associé chez Planica Services financiers.
« Avoir une rente indexée peut être très coûteux. La portion « actions » du portefeuille permettra au client d’indexer la valeur de son épargne à la progression du niveau des prix, note-t-il. C’est certain que l’indexation, et l’inflation, sont des sujets chauds lorsqu’on parle de rente à un client.»
Selon l’Institut C.D. Howe, les clients moins fortunés reçoivent déjà la majorité de leur revenu de retraite de sources gouvernementales. Les clients de la classe moyenne seraient donc ceux qui auraient le plus avantage à utiliser des rentes, surtout maintenant qu’ils peuvent moins souvent compter sur des régimes de retraite à prestations déterminées (PD).
« En moyenne en 2008, les Canadiens âgés de plus de 65 ans avaient environ 15 000$ par année en revenus garantis pour la vie. Il faut toutefois faire attention à cette statistique puisqu’elle devrait chuter au fur et à mesure que les nouveaux retraités, qui ont de moins en moins accès à des régimes de retraite PD, arriveront à la fin de leur vie active», écrit l’Institut C.D. Howe dans son rapport intitulé Annuities and Your Nest Egg.
Le problème successoral
Beaucoup de raisons expliquent que les clients n’aiment pas nécessairement les rentes, l’un de ces facteurs est l’idée que, à leur mort, leur succession n’aura pas accès aux sommes qui ne lui auront pas été versées à travers des primes. Or, l’argument successoral n’en est pas un, selon Daniel Laverdière, directeur principal, Planification financière et conseil, à la Financière Banque Nationale.
« Je devrais assurer ma retraite avant de penser en laisser à ma succession. La rente sert à me couvrir contre mon risque de longévité et je devrais accepter que si je meurs tôt, ce sera tant mieux! En fait, mourir tôt c’est un peu la meilleure des retraites puisque je n’aurai jamais manqué d’argent», nuance-t-il.
Pour atténuer cette impression de perte, le conseiller peut suggérer une rente garantie ou une rente réversible au conjoint. La rente garantie offre, si le détenteur meurt avant une période prédéterminée, le versement de la différence entre le prix de la rente initiale et ce qui aura été versé en primes. Par exemple, un client paie une rente 150 000$ et reçoit des primes de 1000 $ par mois. S’il meurt au bout de 12 ans et que la rente est garantie 15 ans, il aura reçu 144 000 $. La compagnie d’assurance fera alors un chèque de 6000 $ à la succession du rentier décédé.
« Ça permet d’éviter les scénarios catastrophe de mort précoce et de rassurer le client, note Daniel Laverdière. Toutefois, une rente cinq ou dix ans ne protège pas beaucoup le conjoint survivant. Pour un couple, il est préférable d’opter pour une rente réversible qui couvre le risque de longévité de deux personnes. »
Pour sa part, la rente réversible, à la mort du premier rentier, continuera simplement d’être versée au conjoint survivant.
Pour éviter que le client boude la rente simplement parce qu’il croit que ce produit ne lui permettra pas de laisser d’argent à sa succession, Frédéric Bouchard suggère de régler la question avec de l’assurance vie si le client en a les moyens.
« Léguer de l’argent, libre d’impôt, via un produit garanti comme une assurance vie élimine du processus décisionnel le facteur successoral. On évite la réflexion de » je perds mon argent et mes héritiers n’auront rien »», dit-il.
Une autre option à proposer à un client qui s’inquiète de l’impact de l’achat d’une rente sur sa succession est, s’il en a les moyens, de lui proposer d’acheter une rente plus élevée que ses besoins réels. «
J’utiliserai les sommes dont je n’ai pas besoin chaque mois pour payer ma prime d’assurance vie dont ma succession sera bénéficiaire, suggère Daniel Laverdière. C’est toutefois seulement si le client a assez d’argent pour combler les deux besoins.»
Photo Bloomberg