Sachant que plus de 40 % des Américains ne paient pas d’impôt et que le nombre de citoyens en situation économique précaire a beaucoup augmenté depuis la crise amorcée en 2008, l’alignement républicain vers le libertarisme économique de droite ne m’apparaît donc pas comme une prise de direction politique avantageuse.
Besoin d’une crise
L’incapacité des Américains à résoudre ce problème est inquiétante.
Les bonzes des marchés financiers s’entendent tous pour dire que la situation fiscale américaine est très simple à régler. Le problème n’en est pas un de dépenses, mais de revenus.
Il pourrait être réglé facilement par une réforme de la fiscalité. On parle ici de réduire les impôts des sociétés et d’augmenter la portion individuelle grâce à une révision du rôle de l’impôt sur le revenu individuel et des taxes directes, comme des taxes sur les ventes ou sur l’énergie.
En observant les politiciens se camper derrière leur idéologie, on est en droit de s’interroger sur la probabilité de mise en place d’une telle réforme.
Je suis aujourd’hui plus que jamais convaincu qu’une solution est impossible tant que la situation ne tournera pas à la crise. Comme je l’ai déjà lu quelque part : le changement survient uniquement lorsque le statu quo devient plus difficile que le changement.
Moindre résistance
Selon moi, cette incapacité à gérer la dimension politique pour le bien de la stabilité économique va se traduire dans des choix faciles, comme la dévaluation de la devise ou l’inflation.
Comme disait Edwin Lefebvre, dans son livre Reminiscences of a Stock Operator, les marchés sont comme l’eau qui coule sur le sol, ils choisissent toujours la voie où ils rencontreront la résistance la plus faible.
Dans ce cas-ci, le problème est que la moindre résistance est définie du point de vue politique, et non du point de vue économique ou financier.
Jusqu’à la prochaine fois
Rien n’est réglé, les politiciens américains vont donc devoir bientôt recommencer de plus belle. Comme quoi, la politique américaine est un peu comme un roman savon à la télévision : on peut manquer plusieurs épisodes, mais on ne perd pas le fil de l’histoire.
Du point de vue du placement, ceci renforce ma vision par rapport aux marchés des titres à revenu fixe. Il faut privilégier le court terme, même si les taux sont bas, car nous ne sommes pas compensés pour le risque d’inflation ou de devises.
Les obligations en devises étrangères sont aussi dangereuses, car il y aura tentative de dévaluation de monnaies compétitives.
L’or, l’argent et autres commodités ont une place dans un portefeuille en tant que protection contre l’inflation et contre la dévaluation des devises. Les obligations qui incluent une protection contre l’inflation (Treasury Inflation-Protected Securities, ou TIPS) peuvent s’avérer intéressantes selon les prix.
Les entreprises multinationales ayant un bilan solide et qui produisent des biens et des services de base doivent être privilégiées.
Ces sociétés pourront de facto gérer les risques liés aux différents gouvernements, puisqu’elles ont une capacité à générer des profits dans les pays de leur choix. De plus, elles détiennent des actifs et des passifs dans plusieurs devises et bénéficient de cette diversification.
*Gestionnaire de portefeuille jusqu’en 2012. Maintenant directeur de la Fondation HEC Montréal