Résultat : la présidente Dilma Rousseff a promis 22 G$ pour les transports. Parallèlement, le Sénat votait pour attribuer une part plus importante des redevances pétrolières et gazières à l’éducation nationale. «Kroton Educacional, la société privée de services éducatifs la plus importante du Brésil, voyait sa capitalisation boursière augmenter de 7,3 %» pendant les derniers jours de juin, au lendemain des annonces gouvernementales.
L’éditeur de manuels scolaires Saraiva anticipait quant à lui une augmentation de son chiffre d’affaires de 16 %.
«Il se pourrait que les plus importantes manifestations survenues depuis deux décennies génèrent un « dividende de protestation » (protest dividend) pour les sociétés publiques, alors que la demande populaire pour des investissements en infrastructures, en santé et en éducation se fait de plus en plus pressante» selon le quotidien rose saumon de la City.
Bloomberg relevait quant à elle que les rendements des investissements privés se faisaient plus alléchants à mesure que les manifestations se poursuivent. Ainsi, les contrats de privatisation des autoroutes pourraient générer jusqu’à 20 % de rendement pour les investisseurs.
Ce qui monte doit redescendre
Autre continent, autre problématique : le Moyen-Orient peine à relever ses marchés, qui continuent de payer le prix de la tourmente du printemps arabe. En Turquie, les manifestations de la Place Taksim ont elles aussi influencé les cours. Les centaines de milliers de manifestants ont ainsi infligé des dommages importants aux rendements boursiers ; pour chacune des journées de manifestation du mois de juin, la Borsa Istanbul a perdu entre 5 et 10 % de sa valeur, rapporte le site financier CNBC.com.
L’économie turque, qui a crû de 8,2 % en 2011 – le deuxième meilleur indice de croissance du monde après celui de la Chine – ne risque cependant pas de vaciller, comme c’est le cas pour l’économie égyptienne, par exemple, qui performe moitié moins bien cette année que l’an dernier. «La Turquie continue d’être bien cotée par les agences de notation, et tant son économie que son secteur financier sont beaucoup plus résilients aujourd’hui qu’il y a dix ans», explique à CNBC.com le gestionnaire londonien Nicholas Spiro, spécialiste de la dette souveraine.
On ne peut pas en dire autant de l’Égypte, qui a vu sa croissance fléchir de 50 %, à 2,2 % au premier trimestre. «Le récent putsch qui a mis fin au régime du président Mohamed Morsi et le marasme politique risquent de pousser l’Égypte au bord du gouffre économique», écrivent les analystes du site de données boursières et économiques Tradingeconomics.com. Les titres égyptiens inscrits au EGX 30 perdaient ainsi 17 % pendant le mois de juin, et reprenaient l’essentiel du terrain perdu au cours des premiers jours de juillet, à la suite du départ du président Morsi.
C’est l’ensemble des parquets régionaux qui subissent les effets des troubles qui affligent la Syrie, l’Égypte, le Liban et la Turquie. Ainsi, le Kuwait 15 Shariah Index a perdu 25 % en juin. L’indice Dow Jones Islamic Market perdait 12 % durant la même période. Quant à l’indice Takaful, qui couvre le secteur de l’assurance dans le monde arabe, il essuie des pertes de 15 à 20 % de sa valeur d’une semaine à l’autre depuis le début février.
Et le printemps érable ?
Les manifestations étudiantes qui ont secoué le Québec au printemps 2012 ont eu elles aussi un impact sur le rendement des sociétés publiques québécoises. L’Indice Québec 30 a ainsi perdu 7 % de sa valeur pendant les jours qui ont mené à l’adoption de la Loi permettant aux étudiants de recevoir l’enseignement dispensé par les établissements de niveau postsecondaire qu’ils fréquentent (le projet de loi 78 déposé le 18 mai 2012 à l’Assemblée nationale), pour s’établir à 1 298 points. C’est sensiblement la même chute que celle qui avait été enregistrée pendant la même période en 2011, soit au cours des trois premières semaines du mois de mai.
Dans l’ensemble, cependant, les corrélations entre les mouvements boursiers et les manifestations sont relativement ténues, concluait une étude de l’Université Cornell portant sur les trois décennies allant des années 1960 aux années 1990. Ainsi, des manifestations ciblées contre des sociétés peuvent influencer la perception des investisseurs. «Sans déserter le titre, les investisseurs pourraient néanmoins estimer que la réputation de la société risque de coûter cher» et que le titre se négociera à la baisse.
«Nous remarquons cependant que les mouvements de protestation ont passablement plus d’incidence sur le cours du titre que les campagnes de boycottage. Si les investisseurs estiment que le boycottage ne nuira pas aux revenus de l’entreprise, ils n’agiront pas», conclut l’étude.