Aequitas, en latin «équité», est la déesse du commerce dans la mythologie romaine.
L’ouverture des marchés boursiers nationaux à la concurrence des plateformes alternatives (Alternative Trading Systems, ATS), notamment pendant la décennie 1995-2005, en Amérique et en Europe, a mis fin au monopole des parquets. Alors que le New York Stock Exchange (NYSE) occupait 80 % des parts du marché des transactions sur les actions en 2005, le nouveau NYSE Euronext n’en détient plus que 26 %.
Même chose pour le Toronto Stock Exchange (TSX), qui contrôlait l’ensemble du volume des transactions au Canada vers la même époque, et qui n’en gère plus que 70 % aujourd’hui. Une douzaine d’opérateurs se partagent le marché canadien.
Haute fréquence
Au premier chef, l’avènement de la négociation à haute fréquence (ou algorithmique) brouille la donne sur les marchés. «Elle pénalise les investisseurs à long terme», selon Jos Schmitt, chef de la direction d’Aequitas Innovations, qui propose entre autres des services de négociation qui permettent d’éviter les désavantages infligés aux investisseurs institutionnels par la négociation par algorithme.
Dans un rapport publié en 2011, la Banque du Canada relevait que ce type de négociation, la High Frequency Trading (HFT) vise parfois à «fausser les signaux de prix sur les marchés afin de créer des occasions de gain pour la firme émettrice», en créant notamment de la fausse liquidité.
À qui profite la HFT ? On cite souvent des banques d’investissement, des maisons de courtage, des fonds de couverture et même des caisses de retraite. Mais pour une majorité de petits investisseurs et d’acteurs du monde boursier, les désavantages sont nombreux.
Certaines stratégies de négociation HFT créent une fausse liquidité sur les marchés, au détriment de la valeur des cours boursiers, pénalisant du coup les investisseurs à long terme.
Certains observateurs et portefeuillistes estiment même que cela augmente les coûts des fonds communs de placement.
La HFT serait responsable de la négociation d’environ le tiers des quelque 50 G$ de titres échangés chaque année à la Bourse de Toronto.
Jos Schmitt estime qu’il pourrait s’agir de 42 % pour l’Amérique du Nord.
De 2005 à 2011, soit depuis l’avènement de ce type de négociation, les ratios d’ordres par rapport aux opérations ont quadruplé, note la Banque centrale. En inondant les marchés d’ordres retirés dès qu’ils sont placés, les négociateurs HFT créent de fausses impressions de volume sur les marchés, causant des mouvements des cours acheteurs/vendeurs qu’ils exploitent à leur profit. Cela «entrave l’exécution des transactions aux prix affichés pour les autres participants», note la Banque du Canada dans son rapport.
Les régulateurs nord-américains planchent actuellement sur un resserrement des règles pour endiguer les pratiques qui minent la bonne tenue des marchés.
«Quand les places de marché privilégient le volume, elles peuvent nuire à la qualité de l’exécution pour ceux qui désirent réellement posséder quelque chose à la fin de la journée», explique Jos Schmitt, qui a quitté Alpha, la plateforme boursière détenue par la plupart des banques canadiennes, lorsque celle-ci a été absorbée par la transaction qui a fait passer le TMX aux mains du Groupe Maple, l’an dernier.
Financement pour les PME
Mais il y a plus. Outre des prix concurrentiels pour les données, Jos Schmitt veut également faire mousser le placement privé et le marché dispensé, tout en favorisant le financement des petites entreprises. «Les PME en quête de capitaux trouvent de plus en plus difficile d’obtenir du financement» auprès des marchés boursiers, observe Jos Schmitt. Entre autres axes de développement de son modèle d’affaires, Aequitas veut lancer un marché de titres dispensés accessible à la petite et moyenne entreprise.
Par ailleurs, en raison de l’acquisition de la plateforme Alpha, qui détenait 20 % du marché canadien, le TMX se retrouve à nouveau en position de monopole. «Nous voulons favoriser la concurrence sur le marché», ajoute Jos Schmitt. Il précise qu’Aequitas ne se contentera pas d’offrir les mêmes services que les autres parquets, «mais propose des services inédits et une valeur ajoutée».
D’ailleurs, le système de négociation sur le marché dispensé d’Aequitas fait l’objet d’une demande de brevet.
À la Banque Royale, à qui on a demandé ce qui motivait sa participation dans l’initiative alors qu’elle était absente d’Alpha et de Maple, le porte-parole Claude Lussier explique que «nous soutenons une initiative qui répond aux besoins de nos clients», en plus de favoriser la concurrence sur les marchés.