Toutefois, lorsque les règles deviennent plus compliquées, ce n’est pas nécessairement aussi facile de s’y retrouver.

Par exemple, au Québec, on ne peut nommer un bénéficiaire que sur un contrat de rente ou d’assurance.

Les produits détenus dans des institutions financières telles des banques ou des sociétés de fonds communs de placement ne peuvent faire l’objet d’une désignation de bénéficiaire.

Lorsqu’un individu désire voir échoir certaines sommes à des personnes en particulier, il doit désigner ces personnes comme légataires dans un testament.

Lorsque le bénéficiaire d’une rente ou d’une assurance est désigné dans un contrat émis par une société d’assurance ou de fiducie, les sommes sont généralement versées directement au bénéficiaire par l’institution financière.

Cette dernière doit cependant s’être assurée qu’aucun autre bénéficiaire n’a été désigné ultérieurement au contrat.

Lorsque ce bénéficiaire est le conjoint, il y a roulement automatique, à moins que le liquidateur ne fasse le choix de se soustraire à ce roulement, en vertu du paragraphe 70(6.2) LIR.

Les choses se passent donc généralement bien dans ce contexte.

Cependant, il est fréquent qu’aucun bénéficiaire ne soit désigné au contrat.

Comme nous l’avons vu plus haut, c’est le cas notamment pour les contrats émis par les sociétés de fonds communs de placement.

Dans ce cas, l’institution financière remet d’office les sommes à la succession, à moins que le contrat ne soit clairement identifiable dans le testament, auquel cas, les sommes peuvent être remises directement au légataire.

Il existe une date limite moins connue des conseillers financiers : le 31 décembre de l’année qui suit celle où survient le décès.

Cette date peut avoir des conséquences importantes.

Dans le cas d’un REER, c’est la date limite dont dispose la succession pour s’assurer de profiter pleinement du roulement au conjoint.

En effet, après cette date, si le REER a réalisé une plus-value, celle-ci sera imposable entre les mains de la succession.

Le REER peut cependant être roulé ultérieurement au conjoint sans autre conséquence.

Cependant, le cas du CELI est différent.

Premier cas : titulaire remplaçant

Si le CELI constitue un contrat de rente et que le bénéficiaire au contrat est le conjoint, ce dernier se qualifie à titre de titulaire remplaçant.

Un tel titulaire est un bénéficiaire qui a acquis tous les droits du titulaire décédé, y compris notamment le droit de révoquer toute désignation ultérieure d’un autre bénéficiaire.

Un titulaire remplaçant peut également faire l’objet d’une désignation dans un testament. Il s’agit alors que les conditions requises soient remplies à l’aide de dispositions testamentaires claires.

Un titulaire remplaçant qui reçoit les sommes du CELI de son conjoint décédé pourra les rouler totalement sans impact fiscal au moment où le transfert sera effectué, à moins que le défunt ne soit en situation de cotisation excédentaire.

Dans ce dernier cas, les cotisations excédentaires du défunt seraient réduites des droits de cotisation du conjoint survivant.

Deuxième cas : bénéficiaire désigné

Si le CELI constitue un contrat de rente ou un dépôt admissible et que le conjoint n’est pas désigné comme titulaire remplaçant, le CELI cesse d’exister et les gains après la date du décès sont imposables entre les mains de la succession.

Autrement dit, le CELI n’existe plus.

Si le CELI n’est pas un contrat de rente, il continue d’exister, à l’instar d’un REER, sous forme de fiducie non imposable, jusqu’au 31 décembre de l’année qui suit le décès (période d’exemption).

Les revenus générés et distribués entre la date du décès et la fin de la période d’exemption sont imposables entre les mains des bénéficiaires du CELI.

Après cette date, le CELI devient une fiducie non testamentaire qui sera imposée sur tout revenu non distribué, y compris les gains non distribués pendant la période d’exemption.

Si c’est le conjoint qui est bénéficiaire, il pourra transférer les sommes dans son propre CELI et profiter de cotisations exclues, c’est-à-dire ne réduisant pas ses droits de cotisation, jusqu’à concurrence de la juste valeur marchande (JVM) du CELI le jour du décès.

C’est ici que se trouve le plus grand danger.

Le conjoint bénéficiaire a 30 jours après la date du transfert – qui doit se faire pendant la période d’exemption – dans son propre CELI pour acheminer le formulaire RC240 à Revenu Canada.

Si le formulaire n’est pas acheminé dans les 30 jours, le conjoint survivant se retrouve dans une situation de cotisation excédentaire pour tout montant transféré excédant ses droits de cotisation.

Dans cette situation, une pénalité de 1 % du solde excédentaire est exigée.

Par exemple, un montant de 25 000 $ génère une pénalité de 250 $ par mois. Le contribuable reçoit une lettre lui expliquant qu’il est en faute et encourt une pénalité rétroactive… Imaginez lorsque les sommes accumulées dans les CELI seront de 250 000 $.

Revenu Canada dit toutefois que cette situation est courante – parce que peu de personnes connaissent cette règle – et qu’une lettre explicative accompagnant le formulaire pourrait permettre au contribuable d’éviter cette situation déplorable.

Ce n’est cependant peut-être pas la stratégie du siècle que de se fier à l’humeur des percepteurs…

*Directeur, planification financière et fiscale, Centre financier SFL, Cité de Montcalm