En consolidant sa position dans les provinces de l’Ouest, Desjardins entend faire un triplé : augmenter ses volumes et ses marges, renforcer ses assureurs, et faire croître le mouvement coopératif à l’extérieur du Québec.

Ainsi, les acquisitions de Western Financial Group, un courtier d’assurance, et de MGI, un gestionnaire de patrimoine, sont complétées par l’ajout du courtier à escompte Qtrade, explique Christiane Bergevin, vice-présidente exécutive aux partenariats stratégiques chez Desjardins.

Le récent partenariat conclu avec Coast Capital, une coopérative vancouvéroise qui administre près de 15 G$, vise notamment la manufacture de produits et leur distribution.

L’expansion de Desjardins dans les plaines de l’Ouest s’inscrit dans la stratégie «d’un déploiement accru de nos manufacturiers d’assurance, de fonds communs et de cartes de crédit», poursuit Christiane Bergevin.

Expansion canadienne

Desjardins doit sortir de ses frontières pour assurer sa croissance.

Régis par la réglementation provinciale, les caisses populaires et autres credit unions ne peuvent cependant ouvrir des succursales où bon leur semble à l’extérieur de leur province d’origine.

L’avancée de Desjardins sur le front ouest s’explique entre autres par «de faibles opportunités de croissance au Québec», remarque Louis Hébert, professeur de stratégie à HEC Montréal.

Selon l’universitaire, les parts de marché s’obtiennent à l’arrachée au Québec.

Déjà présente au Canada par l’intermédiaire de l’assurance collective, du financement au point de vente, du crédit à la consommation et des services de paie, la coopérative veut faire mousser sa présence dans les services financiers.

Un créneau où ses homologues canadiens sont faibles, selon les observateurs.

Depuis l’an 2000, une forte vague de consolidation a déferlé sur le mouvement coopératif canadien, qui a vu ses effectifs fondre de près de 500 coopératives.

Cette consolidation a permis aux coopératives de maintenir leurs parts de marché, notamment dans les dépôts, les prêts à la consommation et les services aux PME.

Avec près de 400 000 membres et 150 G$ d’actif, les coops canadiennes ne font pas le poids face aux banques à charte canadiennes qui administrent 3 600 G$. Les quelque 200 G$ d’actif apportés par Desjardins dans ses partenariats avec les coopératives canadiennes ne seront pas de trop.

Face à une concurrence accrue des banques et des assureurs vie au chapitre de la gestion de patrimoine, les coopératives financières n’ont pas les reins assez solides pour concurrencer les banques sur ce terrain.

Alors que les banques à charte «recentrent certaines de leurs activités dans l’Ouest», les coopératives financières doivent renforcer leur position, analyse Marc-André Pigeon, directeur des politiques financières à la Credit Union Central du Canada (CUCC).

La CUCC représente les quelque 400 coopératives financières situées à l’extérieur du Québec.

«Notre part de marché, en terme d’actif, est relativement stable dans le temps. Mais c’est certain qu’il y a une concurrence de la part des banques. Elle est par contre inégale selon les provinces. Au Manitoba par exemple, les coopératives dominent le marché des services bancaires», poursuit Marc-André Pigeon.

Il reste que la capacité des banques à se financer sur les marchés leur permet d’offrir des produits difficiles à concurrencer.

«On n’a qu’à penser au marché hypothécaire résidentiel, où les banques ont l’avantage», relate Bohdan Leshchyshen, analyste financier et administrateur de la coopérative d’économie ukrainienne Buduchnist, en Ontario.

Gestion de patrimoine

Si les coopératives sont réputées solides en matière de liquidité et de capital de première catégorie, Desjardins apporte néanmoins un appui solide en matière d’accès aux capitaux permettant le développement de l’offre et des services.

«Par l’intermédiaire de la Caisse centrale et de nos services de trésorerie, nous travaillons effectivement avec les credit unions pour leur permettre de déployer des produits et services», signale d’ailleurs Christiane Bergevin.

La concurrence, dans les services bancaires au détail, passe maintenant par la gestion de patrimoine, tous ont les mêmes défis : augmenter la part de portefeuille des clients.

«Les membres nous adorent, nous dépassons les banques de loin côté satisfaction de la clientèle. Là où nous avons des progrès à faire, c’est du côté de la gestion de patrimoine», explique Marc-André Pigeon.

C’est donc un autre axe de développement pour Desjardins dans l’Ouest.

«C’est une chose d’avoir des produits, mais encore faut-il que les gens en succursale soient formés pour les proposer et faire augmenter les ventes», signale Christiane Bergevin.

Les alliances avec QTrade et Coast capital, notamment, permettront à Desjardins «d’optimiser la distribution» des produits et services hors Québec, ajoute-t-elle.

Enfin, un brin de philosophie guide les pas de Desjardins dans l’Ouest.

«Nous croyons que le mouvement coopératif doit grandir. Pour y arriver, il faut se doter de produits [et de services] de premier ordre», ce que les alliances permettent, conclut Christiane Bergevin.