Mais en 2007, la Financial Services Authority (FSA) du gouvernement britannique a établi trois niveaux d’hypothèse admissibles : 5 % (hypothèse basse), 7 % (moyenne), 9 % (haute).
Depuis, à la lumière de la crise financière et à la suite de la production d’un document de consultation commandé à la firme PricewaterhouseCoopers, la FSA a revu ces hypothèses à la baisse, soit 2 %, 5 % et 8 %, taux qui entreront en vigueur à partir d’avril 2014.
Autoréglementation
Aucune réglementation gouvernementale ne plafonne les projections de rendement ni au Canada ni au Québec.
Toutefois, plusieurs organismes d’autoréglementation régissent les pratiques de leurs membres.
L’Association canadienne des organismes de contrôle des régimes de retraite (ACOR) dans sa «Ligne directrice no 3», datée de mai 2004, n’interdit pas spécifiquement le recours à des projections et n’établit pas non plus des normes d’hypothèses de projection.
Par contre, elle exige de ses membres qu’ils fournissent aux participants des outils d’aide à la décision : calculatrices et outils de prévision, modèles de répartition de l’actif, outils de planification, etc.
Contrairement à ce qui a cours au Royaume-Uni, À l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC), les projections de rendement sur 20 ou 30 ans sont tout simplement bannies.
«Aucun de nos membres ne fait de projections quant à la performance d’un fonds, affirme Sara Clodman, directrice, affaires publiques, à l’IFIC. Les seules indications de rendement portent sur la performance passée d’un fonds ou d’un autre. Et normalement, cette performance est établie selon les rendements après déduction des frais.»
De plus, une note précisant que «les performances passées ne sont pas garantes des performances futures» doit accompagner la publicité.
Évidemment, de telles règles n’ont pas la même force de contrainte que des lois, fait ressortir Pierre Saint-Laurent, président de la Canadian Chartered Alternative Investments Analysts (CAIA) et professeur émérite à HEC Montréal.
«Un membre qui ne se conforme pas à ces règles d’éthique, dit-il, sera seulement banni de son association ; il n’ira pas en prison.»
Période creuse
Il reste que les conseillers financiers n’ont souvent pas le choix de faire des projections à l’intention de leurs clients individuels. Quels rendements raisonnables peuvent-ils faire valoir ?
Depuis six ans, l’Institut québécois de la planification financière (IQPF), le premier et le seul encore au Canada à le faire, produit annuellement des Normes d’hypothèses de projection.
Les normes proposées en 2013 sont de 7 % pour des actions canadiennes, de 4,25 % pour des titres à revenu fixe et de 3,25 % pour des titres obligataires à court terme.
«À une époque, il y avait beaucoup d’agressivité dans les taux de rendement utilisés, rappelle Martin Dupras, président sortant de l’IQPF et membre du comité des Normes d’hypothèses de projection. Mais je crois très sincèrement que cette époque est révolue. On observe plus de prudence en général chez tous ceux qui sont appelés à faire des projections.»
Il faut dire que jusqu’en 2000, les rendements boursiers justifiaient qu’on fasse miroiter des rendements très attrayants.
De 1990 à 2000, les rendements moyens du S&P 500 pour des périodes de dix ans se sont établis entre 13,93 % et 17,46 % (selon des calculs historiques présentés par le site http://financeandinvestments.blogspot.ca)
Ces moyennes de dix ans n’ont évidemment pas toujours été aussi belles.
Par exemple, durant la décennie des années 1950, elles ont oscillé entre 1,24 % et 8,18 %.
Pendant la décennie allant de 1936 (première année pour laquelle une telle compilation est possible) à 1945, elles s’étalent de – 0,89 % à 9,35 %, les rendements étant négatifs en 1938 et en 1939.
La lecture pour la décennie allant de 2000 à 2009 ressemble beaucoup à celle des années 1930. Les rendements commencent à 17,46 % en 2000 et déclinent ensuite inexorablement pour terminer à – 0,95 % en 2009.
Les années suivantes affichent une remontée : 1,41 % en 2010, 2,92 % en 2011 et 7,2 % en 2012.
Évidemment, comme l’affirme l’IFIC, «les performances passées ne sont pas garantes des performances futures».
Cependant, cette longue histoire boursière semble justifier des projections de l’ordre de celles que mettent en avant la FSA et l’IQPF.
Si on considère que le rendement historique de la Bourse s’est situé entre 7 et 8 %, les projections de l’IQPF, entre 4,5 et 7%, semblent tout à fait raisonnables et justifiées, juge François Dupuis, vice-président et économiste en chef au Mouvement Desjardins, dont l’équipe prépare une étude sur les rendements boursiers anticipés pour les dix prochaines années.
«La moyenne des rendements boursiers des pays industrialisés pourrait être d’environ 5 %, dit l’économiste, et on peut tenir compte du fait qu’un pays producteur de matières premières, comme le Canada, pourrait donner un ou deux points de pourcentage de plus.»