Affaire Marcoux: la CSF réplique à notre couverture

Dans sa couverture de la guérilla réglementaire opposant Michel Marcoux à la CSF, Finance et Investissement a soutenu en éditorial, en avril dernier, que « Deux condamnations, c’est bien, mais trois, c’est mieux ! », laissant entendre qu’il y aurait une deuxième, voire même une troisième condamnation pour Michel Marcoux.

 Puis, nos concurrents de Conseiller.ca publiaient un dossier sur l’affaire Marcoux. Dans sa réponse à Conseiller, la Chambre précise également  certains éléments rapportés par Finance et Investissement:

 «  Inflige-t-on une double peine à Michel Marcoux?

« Certains médias soulevaient dernièrement la question à savoir si Michel Marcoux aurait été jugé et sanctionné deux fois, pour les mêmes faits. Le principe de la chose jugée ne pourrait être soulevé pour empêcher une poursuite disciplinaire sur la base d’un jugement déjà rendu en matière pénale ou criminelle en relation avec les mêmes faits.

« Ceci est également vrai à l’inverse. Il s’agit de procédures différentes recherchant des conclusions différentes. L’objectif de la sanction disciplinaire n’est pas de punir le professionnel visé, mais de corriger un comportement fautif dans le but de protéger le public. En matière pénale, on vise plutôt la répréhension et la punition des actes illégaux.

« En outre, les sanctions qui peuvent être imposées sont aussi différentes en ce que, par exemple, contrairement au droit pénal, un comité de discipline peut imposer comme sanction la limitation et la suspension du droit d’exercer des activités professionnelles. Autrement dit, le fait qu’un membre de la Chambre fasse l’objet de poursuites pénales par l’AMF n’empêche pas la syndique de la Chambre de déposer une plainte disciplinaire contre lui, et ce, en relation avec les mêmes faits. L’inverse est aussi vrai.

«C’est pourquoi il est légalement possible que soient menées des procédures pénales et disciplinaires en fonction des mêmes faits. »

 Finance et Investissement alléguait, en éditorial, ce qui suit :

« Août 2012. Le comité de discipline de la CSF blanchit Monsieur de ne pas avoir «agi avec intégrité, compétence et professionnalisme», mais le reconnaît coupable d’avoir entravé une enquête de l’AMF. C’est la deuxième condamnation pour la même infraction.

« Mars 2013. La syndique de la CSF, Caroline Champagne, interjette appel du jugement du comité de discipline. Le comité aurait «erré en droit» en rejetant les chefs d’accusation portant sur l’intégrité. Un comité qui est pourtant composé d’avocats et de praticiens d’expérience.

« Ce serait l’équivalent d’une troisième condamnation. Quel gaspillage de temps et d’argent ! C’est le délire ! »

Nous écrivions en outre que :

« La syndique arrive à la conclusion que le fait d’accepter d’ouvrir un compte sous un pseudonyme est louche et probablement fait dans un but de fraude.

«Je suggère alors qu’on amende le Code civil, car tant le pseudonyme que le prête-nom y sont présentés comme parfaitement légaux (évidemment, je plaisante quand je parle d’amendement).

« Autres questions, que faisons-nous des actifs détenus par les grandes institutions financières canadiennes dans les comptes des paradis fiscaux ? Les autres firmes qui détenaient des comptes anonymes pour leurs clients dans l’affaire Dominion Investments ont-elles été inquiétées par les régulateurs ? »

Nous demandions enfin si Michel Marcoux n’était pas un peu victime de la petitesse de sa pratique:

« Pas sûr que la CSF s’obstinerait comme elle le fait sur le cas de Michel Marcoux s’il s’agissait de la Royale, de la CIBC ou de Desjardins. Pourquoi cet acharnement ? D’autant plus que le jugement de l’AMF est clair. Les clients n’ont pas perdu d’argent. Il n’y a eu ni fraude ni stratagèmes d’évitement fiscal, ni blanchiment d’argent, concluait le régulateur en 2008, après deux ans d’enquête.

« La syndique de la Chambre soutient quant à elle que Michel Marcoux savait, ou qu’il aurait dû savoir, que le fait d’ouvrir un compte à l’étranger sous un pseudonyme pouvait être l’indice d’un acte illégal. Les conseillers devraient-ils se transformer en enquêteurs au service de la CSF ? Décidément, quelque chose ne tourne pas rond dans ce dossier. »

À cet égard, la CSF rétorque :

« La Chambre prétend-elle à l’illégalité de l’utilisation de pseudonymes ou de comptes dans les paradis fiscaux?

« La Chambre ne prétend pas qu’il est illégal d’avoir des comptes offshore. […] Par contre, la Chambre par l’intermédiaire de sa syndique, prétend que lorsqu’un client sollicite les services d’un professionnel membre de la Chambre pour ouvrir un compte pour ses placements en lui demandant d’indiquer faussement que ce compte a tiers, ce professionnel, dont la conduite est encadrée par des normes déontologiques, ne peut se contenter d’exécuter la commande aveuglément et sans poser de questions, comme un commettant servile.

« Dans sa décision, le comité de discipline affirme d’ailleurs ce qui suit :

« Certes les représentants ont la responsabilité de s’assurer que leurs activités professionnelles s’exercent de façon à favoriser la confiance des consommateurs et à protéger l’intégrité de l’industrie et très certainement comme l’invoque la plaignante, ils ne peuvent simplement fermer les yeux lorsque les clients souhaitent recourir à leurs services pour faciliter la poursuite d’objectifs illicites ou illégaux » (par. 59).

« C’est la conduite professionnelle de l’intimé qui est visée par la plainte disciplinaire, quant à savoir s’il a enfreint ses obligations déontologiques, et non celle de ses clients, quant à savoir s’ils ont commis ou eu l’intention de commettre des infractions aux lois fiscales ou autres. »

[NDLR: Dans une première version de ce texte, le fait que la réplique de la CSF, contenant des réponses à notre couverture, s’adressait au concurrent, n’était pas explicite.]