« C’est particulièrement déplorable [de constater] que des organismes internationaux font écho à la volonté fédérale dans ce dossier », a déclaré e président et chef le la direction du régulateur québécois devant les membres du Cercle de la finance internationale de Montréal, jeudi.
« Dans tout le cadre des travaux concernant le développement de normes au niveau international, il n’y a absolument rien qui dit qu’il faut un encadrement centralisé dans un pays. En tout respect pour le Fonds monétaire international, je pense personnellement que ce serait beaucoup plus productif que l’on [se retrousse les] manches » et que les provinces continuent de collaborer à des initiatives comme le régime de passeport, auquel l’Ontario ne souscrit toujours pas par ailleurs.
La Cour suprême avait statué que le projet de loi fédéral sur la création d’un régulateur unique pour le Canada empiétait sur les compétences constitutionnelles des provinces en matière de réglementation des valeurs mobilières.
Mario Albert estime cependant que pour les grands dossiers d’importance systémique, l’apport fédéral est essentiel.
Il se désole cependant des manœuvres d’Ottawa, qui continue de solliciter des appuis pour son projet de régulateur unique.
« Ce que monsieur Flaherty semble proposer, c’est de changer la constitution », a déclaré Mario Albert, qui cache mal son exaspération face aux velléités réglementaires du gouvernement conservateur.
Le plan B des régulateurs
Pour contrer le mouvement, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont échafaudé un plan, expliquait Mario Albert à la commission des finances publiques l’hiver dernier. « Un premier élément de ce plan-là, c’est de tenter de créer, au Canada, une structure légale pour les Autorités canadiennes en valeurs mobilières », expliquait Mario Albert aux parlementaires le 13 février dernier.
Les ACVM existent, mais si peu. Ce n’est pas une corporation, ce n’est pas une entité légale, il n’y a pas de règle de gouvernance bien définie, bref, c’est une vue de l’esprit pour Jim Flaherty.
Selon Mario Albert, qui dit que le Québec joue un rôle important dans ce plan, « créer une entité légale au niveau des ACVM […].donnerait une existence plus concrète aux ACVM, une meilleure visibilité. Ça permettrait aussi de répondre aux critiques fédérales qui veut qu’on a simplement […] un encadrement qui est coopératif, donc ça viendrait cimenter un peu les travaux et la participation de chacune des provinces dans ce projet-là ».
En outre, il s’agirait de « renforcer les systèmes informatiques » afin d’améliorer la fluidité des informations entre les régulateurs et les assujettis.
Puis, il faut passer par « l’amélioration du système de passeport canadien. On le sait, […] le gouvernement fédéral critique les provinces en disant qu’il existe, au Canada, 13 régulateurs, que la réglementation n’est pas harmonisée, que c’est un… un merdier pour les émetteurs, là, d’émettre dans plus d’une juridiction », résumait Mario Albert.
C’est pourtant très simple : une entreprise qui veut émettre dans plusieurs juridictions au Canada fait affaire avec son régulateur principal, et peut ensuite émettre partout au Canada. Il y a bien quelques écueils avec l’Ontario, qui n’adhère pas au régime en principe, mais qui en pratique se montre plutôt affable avec les décisions des autres provinces, mais bon.
Autre partie du plan : la Cour suprême a reconnu le rôle d’Ottawa dans des dossiers, comme le risque systémique. Les ACVM vont donc « examiner la possibilité sur des sujets particuliers d’amener le gouvernement fédéral à participer à ces travaux: par exemple, ça pourrait être au niveau de «l’enforcement», au niveau de la répression des crimes financiers, on peut penser au niveau de la gestion des risques systémiques », explique Mario Albert.
Enfin, le plan des ACVM comprend une réflexion sur l’efficacité du développement réglementaire.
Sur le site du Bureau de transition canadien en valeurs mobilières, on peut lire que « le gouvernement consulte donc les provinces et les territoires, dont un certain nombre ont réaffirmé leur volonté de collaborer en vue de mettre sur pied un organisme commun de réglementation des valeurs mobilières ».
Mario Albert affirmait en outre que « pour nous, la nouvelle forme du projet fédéral est tout aussi inacceptable, tout aussi inconstitutionnelle que l’ancienne forme. Et je vous dirais que, de ce point de vue là, pour nous, on ne voit aucun fondement qui permettrait au gouvernement fédéral de s’immiscer dans le domaine des valeurs mobilières ».