Plus optimiste encore, la firme d’analyse énergétique Bentek Energy, du Colorado, prévoyait en septembre 2012 que les États-Unis seraient autosuffisants à 95 % dès 2022.
L’explosion de production a pris tout le monde par surprise. Alors qu’en 2005, les États-Unis importaient encore 12,5 millions de barils par jour (mbj), à la fin de 2012, ce chiffre était tombé à 7,5 mbj, selon l’EIA. En 2014, il devrait continuer à descendre et se situer à 6 mbj.
Un autre phénomène inattendu accompagne ce boom pétrolier : la consommation de carburant aux États-Unis plafonne.
Après avoir atteint un sommet en 2007, la consommation déclinera lentement et demeurera légèrement sous le seuil de 2007 jusqu’en 2040, prévoit l’EIA dans son rapport Energy Outlook 2013.
Quelle pénurie ?
Tous ces chiffres et toutes ces projections tiennent à l’explosion de sources d’énergie non traditionnelles, surtout le pétrole de schiste et le gaz de schiste.
En 2030, les sources non traditionnelles de gaz et de pétrole représenteront plus de 50 % de la production totale, alors qu’elles n’en représentaient que 4 % en 2005, selon l’International Energy Agency.
Grâce aux nouvelles techniques d’extraction, d’abord utilisées dans les dépôts de gaz, puis adoptées dans les champs de pétrole, on constate maintenant que le pétrole abonde.
«Notre Outlook montre à quel point les idées reçues d’hier peuvent être retournées, écrit Bob Dudley, chef de la direction de BP Global. Les craintes de pénurie de pétrole – auxquelles BP n’a jamais souscrit – paraissent injustifiées.»
On trouve de gigantesques réserves de pétrole de schiste aux États-Unis, tout particulièrement dans la région Bakken, où les réserves sont actuellement évaluées à 3,6 billions de barils (3 600 milliards), selon un article du Financial Times (17 janvier 2013).
La Chine, la Russie et l’Argentine disposent de réserves aussi grandes, et même plus grandes. Mais il faudra attendre encore plusieurs années avant de les exploiter pour de multiples raisons politiques, économiques et environnementales, faisait ressortir Daniel Yergin, président de Cambridge Energy Research Associates, dans une entrevue accordée à Bloomberg (29 janvier 2013).
Occasion à saisir ?
Ce boom pétrolier offre à l’investisseur avisé plusieurs occasions de profit. La façon la plus directe d’y avoir accès est d’investir dans des titres de petits producteurs qui, plus que Chevron ou Exxon, sont les acteurs de première ligne de ce nouveau Klondike.
Par exemple, Cimarex Energy (NYSE : XEC). Après avoir plongé à un creux de 47 $ en juin dernier, le titre est remonté à 70 $ à la mi-avril.
Évidemment, les titres individuels ne sont pas au goût d’une majorité d’investisseurs. Un fonds négocié en Bourse peut s’avérer un meilleur instrument de placement.
Par exemple, le Energy Select Sector SPDR Fund, qui suit l’indice du même nom de State Street, est investi dans une large variété de titres, allant de géants comme Chevron et Conoco-Phillips à un petit acteur comme Cimarex Energy, mentionné plus haut. La performance de ce fonds est de 11,58 % sur un an et de 14,48 % sur trois ans.
Cette façon d’investir dans les producteurs de la ressource n’est pas nécessairement la plus judicieuse, croit Carl Robert, vice-président et cochef des placements chez Sigma Alpha Capital, à Montréal. «Le prix du baril est sujet à bien des fluctuations et peut jouer sur les titres de façon inattendue», rappelle-t-il.
Il vaut mieux investir dans les entreprises en périphérie, plus susceptibles de profiter de façon plus stable et plus soutenue du boom pétrolier.
Un premier secteur est celui de la logistique et de l’infrastructure liée au pétrole. «Nos infrastructures, qui datent du siècle dernier, ont besoin d’être modernisées, dit Daniel Yergin. Nous avons besoin de pipelines et de logistique pour amener la ressource au marché.»
En effet, les nouveaux puits de pétrole «se trouvent dans des endroits où on ne s’attendait pas à une telle production, ajoute Carl Robert. C’est ce qui explique que l’infrastructure est inadéquate pour transporter le pétrole jusqu’aux marchés et que le débit des pipelines ne coule pas dans la bonne direction.»
Repérer les bons acteurs de ce domaine ne saute pas aux yeux. Par bonheur, il existe quelques FNB qui le font, avec beaucoup de succès, d’ailleurs.
Par exemple, le PowerShares Dynamic Oil & Gas Services Portfolio (NYSE : PXJ), qui investit dans des titres comme Weatherford International, Halliburton et Schlumberger, a eu un faible rendement de 1,07 % en 2012, mais plus substantiel de 6,48 % dans les trois années se terminant le 31 décembre 2012.
Par contre, le SPDR S&P Oil & Gas Equipment & Services (NYSE : XES) a eu la main plus heureuse. Il a offert un rendement de 8,27 % en 2012, et de 12,45 % sur trois ans.
Impact sur le Canada
Que va-t-il résulter de ce Klondyke pour le secteur pétrolier canadien ?
«Ce qui se passe de l’autre côté de la frontière donne du fil à retordre chez nous, affirme Yves Rebetez, président d’ETFinsight, à Toronto. Quand on trouve du pétrole là-bas, ça diminue l’attrait du nôtre.»
On le sait en raison de la saga des pipelines canadiens Northern Gateway et de l’inversement du pipeline de la ligne 9b, la production pétrolière des sables bitumineux cherche de nouveaux débouchés face à la concurrence croissante des nouveaux champs américains.
Cela entraîne une baisse des prix de la matière première, dont l’investisseur peut tirer profit, juge Josh Ehrlich, associé chez ETFinsight.
«Une fois qu’une solution sera trouvée [NDLR : dans 12 à 18 mois, prévoit Josh Ehrlich], cela permettra aux producteurs de récupérer des milliards de dollars, et c’est une perspective attrayante», signale-t-il.
Comment saisir cette occasion ? En investissant dans un des FNB canadiens qui suivent le secteur énergétique. Il faut toutefois croire en l’occasion proposée, car tous ces FNB ont connu des baisses assez nettes au cours de la dernière année, parfois au cours des deux dernières années.
On peut donc choisir : iShares S&P/TSX Capped Energy Index Fund (- 5,37 % en 2012), BMO équipondéré S&P/TSX pétrole et gaz (- 2,03 % sur un an), iShares Oil Sands Index Fund (- 6,22 % en 2012) ou First Asset Can-Energy Covered Call ETF (- 7,67 % sur un an).