Ainsi, Montréal se hisse dans le palmarès bisannuel réalisé par le Z/Yen Group de Londres, think-tank à vocation financière . Quant à la Ville reine, elle est exclue du top 10 des places financières mondiales, une première depuis 2007, première année où le palmarès a été réalisé.
Toronto décline ainsi à la 12e place mondiale du palmarès qui est établi à partir de 96 indicateurs et de près de 2400 sondages réalisés auprès de professionnels des services financiers partout dans le monde. Jusqu’à l’an dernier, Toronto était toujours dans les 10 premières places financières mondiales.
Le palmarès couronne Londres en première position, suivie de près par New York, Hong Kong, Singapour et Zurich, villes occupant respectivement de la deuxième à la cinquième place.
Montréal, qui ne faisait même pas partie du Top 20 de la finance mondiale au début de la décennie, bénéficie de plus en plus de l’avantage canadien d’un système financier stable, bien réglementé. « C’est vu comme un endroit sécuritaire pour les investisseurs », relate d’ailleurs Mark Yeandle. Il est d’avis que le système réglementaire en vigueur, constitué de 13 commissions de valeurs, n’a aucune incidence sur la perception entretenue à l’Étranger par rapport au standing montréalais -et canadien.
Des avantages concurrentiels
« Nous remarquons que Montréal dispose de plusieurs avantages objectifs », explique Mark Yeandle, associé-directeur du Z/Yen Group et l’un des concepteurs du sondage. La qualité de vie, l’éducation et l’important capital humain, la force des institutions et la stabilité de l’environnement économique sont au nombre des avantages concurrentiels de la métropole.
À certains égards, Montréal se démarque: sur le plan de la gestion des investissements, la métropole est 14e mondiale. Au chapitre des services professionnels, la métropole est 15e. Sur le plan des services bancaires, par contre, elle arrive 22e ; pour l’encadrement réglementaire, Montréal se classe 19e ; pour l’assurance, elle est 33e au monde.
Cependant, dans les prochaines années, il faut que la finance montréalaise fasse des choix quant à ce qu’elle veut mettre de l’avant : « Veut-elle promouvoir son secteur de la gestion de placements, hisser une de ses écoles de finance au premier rang mondial, ou promouvoir son image de marque à l’étranger », demande Mark Yeandle.
Ce à quoi le président de Finance Montréal, Jean Houde, qui se dit « très heureux de la progression » de Montréal au classement, rétorque que « les choix ont déjà été faits ». Depuis qu’elle est en activité, la grappe financière planche sur quatre chantiers: les produits dérivés, l’entrepreneuriat, la retraite et les ressources humaines. Le président de Finance Montréal,
Le londonien spécialiste de l’analyse concurrentielle fait en outre remarquer que dans le peloton qui regroupe Montréal, Toronto (12), Vancouver (15) et Calgary (17), les différences sont infinitésimales. « C’est un classement très compétitif. Des différences de pointage, comme les 7 points sur une échelle de 1000 qui séparent Toronto de Montréal, signalent qu’il s’en faut de peu » pour qu’une place financière soit déclassée au profit d’une proche rivale.
Montréal, avec 689 points, en a récolté 22 de plus que le dernier classement, publié en septembre 2012.
Il y a cependant des problèmes structurels pour le secteur financier montréalais, qui l’empêche de mousser davantage son attrait comme endroit intéressant pour les investissements directs étrangers, que Montréal peine à attirer.
La connectivité de l’industrie -est-ce que l’éventail des services professionnels est suffisamment large pour servir l’industrie-, et l’image de marque du secteur sont quelques-uns des désavantages concurrentiels.
Par ailleurs, la faiblesse des investissement directs étrangers, un secteur financier sous-développé et l’efficience gouvernementale sont parmi les faiblesses qui sont perçues de l’étranger.
Problème d’image
« Montréal a vraiment un problème de promotion de son image à l’étranger », fait valoir Mark Yeandle, rencontré quelques minutes avant qu’il donne une conférence sur la place de Montréal dans le grand ordre des choses financières, à l’invitation du Conseil des relations internationales de Montréal.
D’ailleurs, lorsqu’il compile l’avantage réputationnel de Montréal -soit la différence entre le score accordé par les répondants et le score objectif obtenu-, la métropole essuie un revers. Ainsi, Montréal perd dix points au sondage par rapport à son score objectif, tandis que Toronto gagne 33 points.
À l’évidence, la stratégie marketing du Montréal financier fait défaut, postule Mark Yeandle. « On remarque que les financiers d’Europe et d’Asie sont les moins au fait de la stature de Montréal dans le monde financier. »
Une carence que constate d’ailleurs Jean Houde, de Finance Montréal. « C’est un aspect sur lequel il faut travailler », dit-il. Il est d’avis que les bons résultats de Montréal au classement permettront cependant à la communauté financière locale -et internationale- de « prendre conscience de l’importance de ce qu’on est comme centre financier ».
Place transnationale établie
Les avantages concurrentiels d’une place financière sont le résultat de plusieurs facteurs. Mais à long terme, alors que les centres financiers européens essuient le ressac des problèmes en zone euro et que l’Asie augmente son influence sur la finance mondiale, Montréal voit tout de même son statut être relevé d’un cran : ainsi, de centre financier national d’envergure, Montréal vient de franchir une étape dans le palmarès de Z/Yen en devenant « place transnationale établie ».
« La ville est tout juste à la marge de cette catégorie, mais c’est un progrès », note Mark Yeandle, selon qui la pente à remonter pour que cette position dure dans les années suivantes peut être difficile. Il reste que la spécialisation montréalaise en gestion de placements et en produits dérivés, conjuguée à la gamme de produits et services de son marché la font de plus en plus reconnaître ailleurs dans le monde comme un marché de classe mondiale. .
Chercheur cautionne contre un excès de pessimisme. « Les gens tendent à surestimer les facteurs négatifs de leur ville », remarque-t-il. Montréal, malgré tous les défauts qu’on peut lui trouver, reste un endroit qui est relativement bien positionné à l’international, conclut Mark Yeandle.