«On revient aux vieilles amours», fait valoir François Bourdon, chef adjoint des placements, Fiera Capital. En juin 2009, explique-t-il, le TSX négociait aux niveaux actuels, tout comme le pétrole et les aurifères. «Depuis, le prix du pétrole a doublé et le prix de l’or a monté de 50 %. Les producteurs ont donc du chemin à rattraper.»
Puisque ces producteurs prévoient réduire les dépenses et privilégier les profits, leur production sera en baisse, ce qui entraîne une hausse des prix.
François Bourdon envisage ainsi une augmentation du prix du pétrole d’environ 10 %, et de l’or, de 10 à 15 %. Cela se traduit par une montée du métal précieux à 2 000 $ l’once, encouragée par l’éventualité d’une inflation accrue entraînée par la détente monétaire des banques centrales et par les troubles au Moyen-Orient.
Jean-Pierre Couture, économiste et stratège des marchés émergents d’Hexavest, garde plutôt à l’oeil le secteur des aurifères, car il voit les titres des producteurs d’or monter pour s’ajuster à la hausse du métal jaune. Bref, qu’il s’agisse de l’or ou des titres aurifères, l’ensemble du secteur mérite l’attention en 2013.
Nouveau géant pétrolier
La montée spectaculaire de la production pétrolière aux États-Unis retient l’attention de Carl Robert, vice-président et co-chef des placements chez Sigma Alpha Capital.
En 2013, la hausse de production en volume devrait être de près de 500 %, signale-t-il, s’appuyant sur des données de Mike Rothman, analyste de l’institut de recherche indépendant Cornerstone Analytics. Le phénomène est d’une ampleur telle que notre principal partenaire économique pourrait se hisser au rang de premier producteur mondial de pétrole en 2020, prévoit l’International Energy Agency.
Une telle perspective laisse présager une chute des cours du pétrole dans les années à venir. Par contre, tous les acteurs périphériques du secteur pétrolier – ceux qui en assurent l’infrastructure – pourraient voir leurs titres s’apprécier : constructeurs de pipelines, chemins de fer et camionnage, raffineurs, pétrochimie, plastiques, manufacturiers dépendants du pétrole.
Ces rebonds de l’industrie de l’or et du pétrole avantagent les États-Unis, au premier chef, ainsi que le Canada. Les États-Unis, en particulier, retrouvent la faveur, car leur économie «va continuer de s’améliorer et de progresser,» souligne François Bourdon.
C’est une lecture à laquelle adhère Jean Masson, qui relève la reprise immobilière et le retour, quoique modeste, de la confiance chez les consommateurs.
François Bourdon s’en tient pour l’instant aux secteurs de l’or et du pétrole, mais aussi des matières premières, plus particulièrement les denrées agricoles.
«Il y a eu une sécheresse flagrante aux États-Unis et on voit bien des difficultés climatiques ailleurs, dit-il. Historiquement, les stocks sont bas alors que la demande croît dans les pays émergents.»
De telles conditions feront monter les prix des denrées agricoles aux États-Unis et devraient également favoriser le Canada, qui bénéficie d’un éminent avantage structurel. «Ici, on a des terres et de l’eau», lance François Bourdon.
Jean Masson, quant à lui, favorise dans son ensemble le secteur des actions américaines, mais certainement pas celui des obligations, où les rendements sont déprimés par la politique monétaire de la Réserve fédérale. Toutefois, note-t-il, «parce que la reprise ne sera pas forte, il vaut mieux rester dans les secteurs défensifs : santé, consommations discrétionnaire et courante, services publics». Un de ses secteurs favoris rejoint le thème du pétrole : les pipelines.
Il ne prévoit pas des performances mirobolantes. «On s’attend à des rendements boursiers supérieurs de seulement 4 points de pourcentage à celui des obligations.» En clair, cela se traduit par un gain de 6 ou de 7 %, guère «génial», mais pas méprisable non plus.
Chine et consorts
Un dernier pays porteur se distingue : la Chine. La majorité des spécialistes consultés croient que l’Empire du milieu amorcera une remontée en 2013.
Sans être spectaculaire, elle entraînera beaucoup d’acteurs dans son sillage, et tout particulièrement le secteur des matières premières et de l’énergie au Canada.
Ce n’est toutefois pas la Chine elle-même qu’il faut viser, juge Carl Robert, mais plutôt tous les pays exportateurs, asiatiques surtout, susceptibles de profiter de sa vigueur retrouvée.
Jean Masson, de son côté, donne sa confiance aux pays émergents, sauf ceux du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine). Le thème qui retient son attention n’est pas celui des matières premières (ce qui favoriserait les pays du BRIC), mais celui de l’émergence de la classe moyenne et de tous les secteurs que ce phénomène tire à sa suite : téléphones mobiles, transformation alimentaire, électronique grand public, services financiers.
Quels pays cela met-il en jeu ? Surtout ceux de l’Asie du Sud-Est (Malaisie, Indonésie et Thaïlande), mais aussi le Chili.
Dans ce concert de pronostics pour 2013, Jean-Pierre Couture, contrarian émérite (voir notre article «Coup d’oeil contraire sur l’année»), lance la seule note discordante. Selon lui, aucun secteur ne sera «porteur» en 2013. Les deux secteurs qu’il privilégie, titres aurifères et pays du BRIC, lui semblent plus des domaines de résistance à un effondrement général que des secteurs de profits.
«Le consensus est très optimiste en ce moment, observe-t-il. Les stratèges croient que 2013 sera l’année où tous les problèmes se règleront et qu’en 2014, les marchés exploseront. Chez Hexavest, en tant que contrarians, nous pensons que tout le potentiel de croissance est déjà escompté.»