Le retour des obligations de sociétés
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Pourtant, malgré le scepticisme qui règne sur les marchés, Thomas O’Gorman, vice-président principal et directeur des titres à revenu fixe auprès de Franklin Bisset Investment Management à Calgary, avance que les obligations de sociétés sont plus attrayantes qu’elles l’ont été depuis des années.

« Quand nous examinons un placement quel qu’il soit, nous surveillons trois caractéristiques : les données fondamentales, les évaluations et certains facteurs techniques comme l’offre et la demande et la liquidité », dit M. O’Gorman, gestionnaire principal du Fonds d’obligations essentielles plus Franklin Bissett (2,4 milliards $ US). « Lorsque l’on pense au crédit des sociétés, ce cycle a été très long, en partie parce que les banques centrales travaillent dur pour soutenir les économies dans l’environnement qui a suivi la crise. Cela a permis à de nombreuses compagnies de se refinancer à des taux très bas. »

Du point de vue des données fondamentales, le secteur des sociétés dans son ensemble est en bonne santé, bien que l’espace de l’énergie et des matériaux connaisse des moments difficiles et que les défauts de paiement commencent à y apparaître, dit M. O’Gorman. « Nous faisons beaucoup de recherche ascendante et ne croyons pas que nous en sommes aux dernières étapes du cycle de crédit. Nous en sommes à la sixième ou à la septième manche — et certainement pas à la dernière. »

Toutefois, l’automne dernier, l’horizon a commencé à s’assombrir lorsque la Chine a soudainement dévalué sa devise afin de stabiliser ses exportations. Si l’on y ajoute une grande firme américaine de gestion de fonds qui a fermé en décembre son fonds d’obligations de sociétés aux rachats et l’effondrement du prix du pétrole brut, cela a créé un sauve-qui-peut chez les investisseurs. « Les écarts sont au plus bas depuis plusieurs années, dit M. O’Gorman, faisant remarquer que l’écart des obligations canadiennes cotées BBB a augmenté à 250 points de base (pb) par rapport aux obligations gouvernementales, contre 130 pb à leur point le plus bas plus tôt dans l’année.

« Ce marché était illiquide durant cette période et le sentiment général extrêmement négatif, se rappelle M. O’Gorman, qui s’est joint à la division de la société torontoise Placements Franklin Templeton en 2010 et gère maintenant environ 5 milliards $ de titres à revenu fixe.

De la fin février à la fin mars, les écarts du crédit se sont nettement resserrés, rattrapant le mouvement général d’élargissement du début de l’année, dit M. O’Gorman. Il a fait remarquer que les émissions axées sur les marchandises se trouvaient parmi celles offrant les meilleurs rendements. Cette catégorie d’actifs a néanmoins un long chemin à parcourir avant de récupérer ses pertes de 2015.

Les investisseurs devraient être conscients que puisque le rendement moyen des obligations gouvernementales sur 10 ans est de 1,22 %, l’écart en pourcentage du rendement tout compris est très élevé, dit M. O’Gorman. « Alors, lorsqu’un écart de rendement dépasse 70 % — ce qui était le cas en février — c’est une portion vraiment élevée du rendement qui est plutôt due à l’écart que seulement à l’indice sous-jacent. Toutes les fois où nous avons vu cela dans le passé, le crédit avait tendance à se surclasser. Et cette fois-ci, ce n’est pas différent. »

Les situations précédentes où le crédit est devenu bon marché incluent l’automne 2011, lorsque la crise de la dette souveraine européenne faisait rage et que la cote du gouvernement américain avait baissé, et également lors de la crise financière mondiale de 2008-2009. « Toutes ces situations répondaient à des facteurs différents, mais elles ont toutes poussé les écarts à des niveaux élevés. »

M. O’Gorman, qui travaille avec une équipe de six personnes à Calgary et qui est épaulé par l’équipe de titres à revenu fixe plus étoffée de Franklin Templeton (160 spécialistes du placement), a augmenté la pondération des obligations de sociétés du fonds à environ 57 % des actifs. Le reste est investi principalement dans des obligations provinciales.

Par ailleurs, il a appliqué une approche modérément défensive par rapport au risque lié au taux d’intérêt. La durée du fonds — une mesure de la sensibilité aux changements des taux d’intérêt — se situe à environ sept ans, contre 7,6 % pour l’Indice obligataire universel FTSE TMX Canada.

M. O’Gorman se concentre sur les données fondamentales des compagnies, comme la qualité de l’équipe de direction, la forte aptitude à générer des flux de trésorerie et un faible endettement. Il aime les obligations de qualité supérieure émises par certains protagonistes malmenés des ressources naturelles comme Canadian Natural Resources, Husky Energy et Cenovus Energy. « Les chutes boursières dans ce secteur ont été très exagérées », dit-il.

M. O’Gorman détient aussi des obligations émises par des fiducies de placement immobilier. « À un certain point, les FPI étaient meilleur marché que les titres de qualité supérieure du secteur de l’énergie. Pas à l’heure actuelle. Mais ils l’ont été pendant un moment durant la période moins risquée de la fin de 2015. » Smart REIT et H&R REIT figurent parmi les titres obligataires qu’aime bien M. O’Gorman.

Bien que le Fonds d’obligations essentielles plus Franklin Bissett soit resté à la traîne de son groupe de pairs l’an dernier et au début de 2016, M. O’Gorman est très optimiste. Il signale une amélioration du rendement due au rebondissement du secteur du crédit en mars. « Nous ne prenons pas ce risque pour rien, nous avons un gros avantage de rendement par rapport à l’indice de référence. Lorsque les rendements étaient à leur sommet, le nôtre était de 4 %, soit le double du rendement de l’indice, qui était de 2 %. Les écarts se sont réduits un peu et l’avantage de rendement est maintenant de 1,7 %. Mais le temps est de notre côté et cette conjoncture nous positionne bien pour que nous fournissions à nos investisseurs un bon rendement ajusté selon le risque. »