L’inukshuk représente aussi l’équilibre. En matière de gestion de patrimoine, cela veut dire planifier sa retraite tout en profitant de la vie. Et pour arriver à cet équilibre, aucune pierre n’est plus importante que l’autre, dit-il.
Avec son équipe de quatre conseillers, ce planificateur financier de Valeurs mobilières Desjardins à Rimouski a fait croître de 500 % depuis 2010 son actif, qui est passé de 42 M$ à près de 250 M$. Et ce, sans acquisition de bloc d’affaires. Il s’agit d’une croissance surprenante, compte tenu du fait que son bassin de clientèle est relativement restreint et dispersé sur un vaste territoire.
Finance et Investissement a voulu souligner cette performance en décernant à René Gagnon le prix du Conseiller émérite de l’année. Ce prix récompense une personne d’exception qui a marqué l’industrie financière par sa pratique et il est offert à un conseiller qui oeuvre dans l’industrie depuis au moins 20 ans.
Ces résultats ne sont pas l’affaire d’un seul individu, tient à souligner René Gagnon. Et c’est encore moins une affaire de gros sous.
«Ce n’est pas la croissance de l’actif qui me fait vibrer, dit-il. Ce qui m’importe, c’est beaucoup plus de m’assurer que les moyens de contrôle pour les clients ont été mis en place afin d’assurer une saine gestion de leur portefeuille.»
Approche multidisciplinaire
René Gagnon mise sur une approche multidisciplinaire. Chacun des conseillers apporte une expertise différente, de façon à offrir une planification complète et intégrée.
«Le courtage traditionnel s’attarde uniquement à la gestion de portefeuille. Chez nous, on accompagne le client dans une expérience qui touche tous les aspects de la planification financière. Au lieu d’une usine de fast food, nous visons à être un restaurant de fine cuisine», explique René Gagnon.
Un client a une coquille dans son testament ? On l’accompagne chez son notaire ou on lui en conseille un au besoin. Un autre client risque de se faire rattraper par le fisc en raison d’un changement de loi ? On le dirige chez un fiscaliste. «Nous ne sommes pas des exécutants, mais des consultants, et avec le temps, nous avons bâti un réseau d’experts solide», dit-il.
En 2014, l’équipe de René Gagnon a reçu une Accréditation Excellence avec mention spéciale du jury pour avoir présenté l’offre en gestion de patrimoine la plus complète et la meilleure approche consultative parmi la quarantaine d’équipes qui ont suivi cette formation chez Desjardins.
Cette approche a un coût. René Gagnon ne compte pas les heures quand il s’agit de ses clients, dont le portefeuille varie entre 500 000 $ et 1 M$. «Nous avons moins de clients, mais nous voulons les servir du mieux que nous le pouvons.» Sa clientèle compte actuellement 350 ménages.
La seule étape d’analyse de la situation du client, où tous les aspects de la planification financière sont pris en considération et mis en relation, peut prendre de 40 à 75 heures, tout dépendant de la complexité du dossier.
L’équipe de René Gagnon passera ensuite en moyenne de 18 à 24 mois à exécuter les recommandations, selon la priorité.
Ce service personnalisé lui vaut une bonne notoriété dans la région du Bas-Saint-Laurent. «Nos clients sont nos meilleurs ambassadeurs, de même que le réseau des caisses, qui nous envoie des gens. Nous ne faisons pas de sollicitation active», dit-il.
Pour lui, la valeur d’un conseiller se mesure à son empathie pour le client. «Ça prend de l’écoute. Il faut cerner les appréhensions de la personne, ses inquiétudes, et essayer de répondre à ses besoins au lieu d’imposer une solution.»
«Un homme d’équipe»
L’intérêt de ses clients passe avant tout. «À ses débuts, lorsque les conseillers étaient rémunérés à la transaction, il avait empoché seulement 10 $ de revenus en un mois !» raconte Vincent Hogue, vice-président principal, Courtage et Gestion privée du Mouvement Desjardins.
«C’est un être d’exception, ajoute ce dernier. Tout ce qu’il touche lui réussit. Et en plus d’être un excellent conseiller, c’est un athlète accompli, un champion de golf et un très bon joueur de hockey.»
Il aurait peut-être même pu faire carrière dans le golf – il joue autour de la normale de 72 – selon Vincent Hogue. Mais il a choisi le métier de conseiller, auquel il applique la même rigueur et la même précision.
«C’est un homme d’équipe, qui sait s’entourer des meilleurs éléments», remarque le vice-président, qui l’a connu lorsqu’il était conseiller en placement chez Lévesque Beaubien Geoffrion (maintenant Financière Banque Nationale), à Matane. Il s’est joint à VMD en 2004 et est devenu directeur du bureau de Rimouski en 2005.
Il a connu des embûches, notamment une séparation avec un associé, mais il a rebâti sa pratique grâce à ses bonnes relations avec le réseau des caisses. En 2010, il quitte son poste de direction et concentre ses énergies sur sa clientèle.
«Il a vite compris comment développer une synergie avec le réseau», dit Vincent Hogue.
Éthique et professionnalisme sont deux mots qui reviennent souvent dans le discours de ceux qui le côtoient. Son dossier de candidature contient des témoignages de clients qui soulignent aussi son sens de l’écoute et son empathie.
Miser sur l’efficience fiscale
René Gagnon a adopté bien avant l’heure la rémunération par honoraires dans un souci de transparence. Alors qu’en 2010, 75 % de sa rémunération découlait des commissions, aujourd’hui, elle vient à 90 % d’honoraires de gestion.
«Le client a le droit de savoir ce qu’il paie par rapport à ce qu’il reçoit. L’industrie manquait de transparence, mais grâce aux nouvelles normes, c’est en train de changer», dit-il. En près d’un quart de siècle, il constate à quel point le rôle de conseiller s’est transformé.
«On va vers le mieux. On est passé d’un rôle transactionnel, ou le conseiller contrôlait la quasi-totalité de l’information à un rôle de conseil. Nous avons aussi une responsabilité fiduciaire. Je pense que plus on va responsabiliser le conseiller en placement, meilleures les pratiques d’affaires seront.»
Les conseillers, dit-il, devront s’adapter aux besoins des clients et pousser un peu plus loin leur expertise. La fiscalité, par exemple, devrait être au coeur de leur pratique.
«On se bat pour un demi-point ou un point de pourcentage de rendement supplémentaire et on est prêt à changer de gestionnaire pour ça. D’un autre côté, on laisse souvent la moitié de notre rendement net sur la table, parce qu’on a n’a pas tenu compte de l’impôt au moment du décaissement», dit celui qui compte un fiscaliste dans son équipe.
Selon lui, tenir compte de l’aspect fiscal permet de diminuer le risque. «Quand le rendement net d’impôt est plus fort au moment du décaissement, vous n’êtes pas obligé de prendre d’aussi grands risques dans la gestion du portefeuille pour arriver à vos fins. Amener une économie fiscale plus importante permet de rassurer le client.»
Pour René Gagnon, chaque sou gagné compte, un enseignement qu’il tient de ses parents. «Nous travaillons souvent avec des chiffres hors du commun, ce qui fait que nous perdons la notion de la valeur de l’argent. Mes racines familiales me donnent un bon ancrage avec la réalité», dit ce père de deux enfants dont il est très fier.
Ces valeurs le suivent aussi dans son engagement communautaire. Il préside notamment la Fondation Vincent Lecavalier, qui vient en aide, entre autres, aux enfants malades et démunis.
«Nous avons la chance de travailler avec des gens qui ont des sous, mais de travailler pour des gens en difficulté, ça nous ramène sur terre», dit René Gagnon, qui tente aussi de sensibiliser ses clients à la philanthropie.
Travailler à l’extérieur des grands centres permet une plus grande proximité avec les clients. «Il ne se passe pas une semaine où je n’ai pas l’impression de changer les choses. Et ça dépasse la gestion de portefeuille pure et dure. Ça va de la personne qui a besoin de conseil parce qu’elle veut acheter un immeuble à logements à celle qui doit refaire son testament. Souvent, nous prenons part à des situations de redressement importantes qui ont un impact majeur sur le client.»
Pour lui, la profession de conseiller n’est pas près de disparaître. «À cause de la divulgation des frais, les clients vont en vouloir plus, et cette tendance-là va s’amplifier parce qu’à tarification égale, ils voudront plus d’expertise. Le conseil élargi va gagner en importance.»