Cependant, les représentants en épargne collective et en assurance de personnes qui désirent vendre seulement leur bloc de clients ou une partie de celui-ci pourraient avoir à facturer des taxes de vente à l’acheteur.
Comme une bonne majorité des représentants reçoivent des commissions réalisées sur la vente de produits, il existe une idée préconçue selon laquelle l’ensemble de leurs revenus n’est pas taxable. «C’est vrai pour les commissions sur les ventes, qui sont exonérées, mais celles qui sont faites sur le référencement de clients sont taxables», précise Mathieu Goulet, vice-président, Finances, de Mica Services financiers.
Ce n’est pas tout. Les honoraires facturés aux clients sur la gestion de leurs fonds communs de série F et sur les services de planification financière sont également taxables. Tout service de nature plus administrative qui ne requiert pas de permis d’inscription devient taxable, selon Mathieu Goulet.
«Par exemple, en épargne collective, dès qu’on réfère un client où qu’on lui offre un service général de planification financière, il y a des taxes», dit-il.
Au moment de la vente, le représentant devrait donc facturer à l’acheteur les taxes sur la portion de la clientèle qui lui procure ce type de revenus.
«L’erreur typique commise au moment de rédiger le contrat de vente est de ne pas procéder à cette évaluation de la fourniture taxable générée par la clientèle vendue et de négocier sans facturer les taxes au représentant acquéreur, en une seule et même clientèle, considérant qu’elle est homogène», explique Mathieu Goulet.
Facture fiscale dans le détour
Le risque lorsqu’on procède ainsi, ajoute cet expert en fiscalité, c’est que les autorités fiscales auront dès lors beau jeu de présumer que l’ensemble de la clientèle vendue est taxable, augmentant du même coup le produit de disposition global du montant des taxes applicables.
«C’est la responsabilité du vendeur d’évaluer s’il y a potentiel d’appliquer des taxes ou non sur ce qu’il vend. S’il ne le fait pas, le fisc pourrait conclure qu’il ne s’est pas bien préparé et assumer que tout est taxable», dit Mathieu Goulet.
Comme c’est au vendeur qu’incombe la responsabilité de faire ses remises de TPS et de TVQ, c’est lui qui devra réclamer à l’acheteur les taxes qu’il a omis de lui facturer lors de la vente. C’est sans compter les avis de cotisation qui s’empilent, les pénalités qui s’appliquent en cas de retard, et les intérêts qui s’accumulent !
«Les risques de litiges augmentent aussi, car l’acheteur peut faire valoir que s’il l’avait su, il n’aurait pas payé le prix demandé… On s’engage dans une série de problèmes qui font grimper la facture !» indique l’expert en fiscalité.
Mireille Gagnon, avocate et première directrice principale, Taxes indirectes, chez Raymond Chabot Grant Thornton, suggère aux représentants qui prévoient vendre, et même aux autres, d’isoler la clientèle générant des activités taxables du reste de la clientèle. «Dans un contrat de vente, on pourrait présenter la ventes en deux fournitures distinctes : taxables et exemptées.»
Actuellement, la Loi prévoit que la vente d’un bloc d’affaires qui a généré 0,1 % de revenus taxables est assujettie aux taxes. «Un si faible pourcentage peut venir contaminer l’ensemble du book», souligne Mireille Gagnon.
Pour éviter des tracas, le représentant vendeur aurait tout intérêt à vendre l’entreprise dans son entièreté, selon Mireille Gagnon : «Quand on est capable de vendre les actions de son entreprise ou encore tous les actifs de celle-ci, on peut éviter des coûts de taxe importants à certaines conditions».
TPS ou TVQ ? Tout dépend de la date
Avant le 1er janvier 2013, les services financiers étaient exonérés au fédéral en TPS et détaxés au provincial en TVQ. Cela veut dire que le représentant qui vendait son book de clients n’avait pas à facturer de TPS, et que la TVQ qu’il facturait à l’acheteur pouvait ensuite être réclamée par ce dernier dans ses dépenses d’intrants.
Ce n’est plus le cas depuis le 1er janvier 2013, date à laquelle le gouvernement du Québec a harmonisé la TVQ à la TPS fédérale, explique Mireille Gagnon. Le vendeur doit facturer de la TVQ à l’acheteur sur la portion taxable de ses revenus, et ce dernier ne peut plus la réclamer.
À l’heure où les représentants sont de plus en plus nombreux à vouloir passer le flambeau à la relève, il deviendra crucial pour eux d’évaluer leur pratique d’affaires pour éviter ces pièges fiscaux.
Pour le moment, une bonne partie des représentants en épargne collective reçoit des commissions, mais l’industrie se dirige peu à peu vers un modèle de rémunération à honoraires taxables, notamment avec la vente de fonds de série F.
«Le conseiller peut en tirer certains bénéfices dans ses affaires courantes, mais il doit avoir en tête que ça peut contaminer l’ensemble de la clientèle qu’il veut vendre s’il ne se prépare pas correctement», dit Mathieu Goulet.