Le dernier budget du Québec a apporté quelques modifications à différents éléments fiscaux touchant les particuliers et les entreprises, dont les conseillers en services financiers doivent tenir compte. Voyons-en les grandes lignes.
Pour les particuliers
Le plafond du montant admissible au crédit pour frais de garde a été augmenté, passant de 9 000 $ à 9 500 $ pour les enfants jusqu’à six ans et de 11 000 $ à 13 000 $ pour les enfants handicapés. Mais surtout, ce plafond sera indexé annuellement au même taux que l’ensemble des paramètres fiscaux.
Le crédit pour dividendes a été modifié pour suivre l’évolution du taux des sociétés. Vu toutes les modifications proposées au fédéral et au Québec, vous voudrez peut-être consulter le tableau ci-dessous qui résume la situation pour les prochaines années.
On a instauré un nouveau crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation. À l’instar du Régime d’accession à la propriété au fédéral, pour être admissible, une personne, ou son conjoint, ne doit pas avoir été propriétaire d’un logement qu’elle habite au cours des quatre années civiles complètes précédant l’année où l’achat est fait. Le cas échéant, cette personne aura droit à un crédit de 750 $, soit 15 % du montant admissible de 5 000 $. Si plus d’une personne a droit au crédit pour la même habitation, par exemple deux conjoints, elles devront se partager le montant de 750 $.
Le bouclier fiscal a été bonifié pour l’année 2018. Rappelons que cette mesure vient réduire possiblement les impacts sur la Prime au travail ainsi que sur le crédit pour frais de garde lors d’une augmentation du revenu de travail en basant le calcul de ces deux éléments sur un revenu familial réduit. C’est le montant maximal de référence de la réduction possible qui a été bonifié, passant de 3 000 $ à 4 000 $.
Le montant admissible maximal du crédit pour travailleurs d’expérience a été bonifié de 1 000 $ pour chaque montant existant et l’âge d’admissibilité de ce crédit a été abaissé à 61 ans au lieu de 62. Le montant admissible maximal pour cette tranche d’âge a été fixé à 3 000 $.
Le crédit remboursable pour aidant naturel d’une personne majeure a notamment vu le critère de cohabitation éliminé, ce qui rendra plus de personnes admissibles à ce crédit. Le crédit remboursable pour la relève bénévole d’un aidant naturel, quant à lui, a également été bonifié, tant sur le plan du nombre d’heures de bénévolat requises que sur celui des montants admissibles.
Les critères pour le montant pour personne vivant seule seront modifiés afin que les petits-enfants et arrière-petits-enfants étudiants ne fassent pas perdre ce crédit aux personnes âgées.
Les crédits Réno-Vert et pour premier don important en culture ont été reconduits respectivement d’un an et de cinq ans.
Pour les sociétés
On attendait avec impatience la réaction du Québec par rapport aux mesures annoncées par le gouvernement fédéral, dans son dernier budget.
On restera encore sur son appétit pendant quelque temps, car il a été annoncé que l’harmonisation se ferait relativement aux mesures concernant le fractionnement de revenus avec les membres de la famille. Par contre, le gouvernement du Québec réfléchira encore sur l’harmonisation relative aux mesures sur le revenu passif dans les sociétés.
Cela signifie qu’il existera au moins trois possibilités en ce qui a trait aux impacts des revenus passifs :
Ajout de l’harmonisation avec les mesures fédérales. Cela voudrait dire qu’il existerait dorénavant trois façons pour une PME de perdre le «petit taux» :
º Moins de 5 500 heures de travail de la part des employés ;
º Capital versé, incluant celui des sociétés associées, de plus de 10 M$ ;
º Revenu passif, incluant celui des sociétés associées, de plus de 50 000 $.
Remplacement du critère de 5 500 heures par l’harmonisation avec les mesures fédérales ;
Aucune harmonisation.
Dans une prochaine chronique, lorsque Québec aura annoncé ses intentions en cette matière, nous analyserons les impacts des nouvelles mesures afin de donner un portrait juste de la situation.
Une surprise nous attendait toutefois au détour. La déduction pour petites entreprises (DPE) sera augmentée afin de réduire le «petit taux» sur le revenu d’entreprise jusqu’au taux actuel de 4 % des entreprises des secteurs primaire et manufacturier. Le tableau ci-dessous indique les taux d’imposition prévus au cours des prochaines années.
Finalement, le taux de cotisation minimal au Fonds des services de santé sera réduit graduellement, passant de 2,30 % actuellement (1,95 % à partir de la date du budget) à 1,65 % en 2022. Pendant ce temps, la masse salariale à partir de laquelle s’appliquera le taux maximal de 4,26 % passera graduellement de 5 M$ à 7 M$ en 2022.
L’impôt des actionnaires
Le tableau indique les taux d’imposition prévus pour les sociétés et les actionnaires se versant un dividende après un bénéfice net d’entreprise de leur société, selon que la société bénéficie de la DPE ou non, au fédéral et au Québec.
À noter que le gouvernement du Québec ne facilite pas la tâche des contribuables, des comptables et des fiscalistes (ni la sienne) en ayant modifié le taux du crédit pour dividende déterminé à compter du jour du budget. Bonne chance avec les feuillets fiscaux des gestionnaires de portefeuilles…
À noter également : le taux maximal des dividendes ordinaires en 2021… plus de 48 % et le taux combiné exorbitant si on perd le «petit taux» au Québec (notamment en ne répondant pas au critère de 5 500 heures) de près de 59 % !
On remarque donc que le budget du Québec a fait augmenter, en une seule journée, le taux combiné actionnaire/société de 70 points de base lorsque la DPE est perdue au Québec. Les taux de la dernière ligne du tableau étant très élevés, on devrait aussi faire l’exercice du calcul des paliers inférieurs. Avec cette distorsion dans l’intégration, on aura souvent intérêt à verser un salaire à l’actionnaire. Juste l’impôt «économisé» paiera une bonne partie, sinon la totalité, des charges sociales supplémentaires…
* Directeur, planification financière et fiscale, Centre financier SFL, Cité de Montcalm