Une consultation aura lieu sur le sujet cet automne, laquelle promet d’être animée si on en croit plusieurs acteurs de l’industrie et de la société civile qui ont déjà pris position. Espérons que nos amis de l’Autorité qui auront à organiser cette consultation sauront profiter de leurs vacances estivales, car il n’y aura pas de repos superflu en vue de ce qui s’annonce!
L’enjeu des commissions intégrées est important à plusieurs égards et je crois qu’il sera impératif de faire entendre la voix ou les voix de l’industrie lorsque le moment sera venu, cet automne.
Mais voilà, cette consultation n’aura lieu qu’à compter de septembre, au mieux, alors qu’au moment même de publier l’Avis 81-330 le 21 juin dernier, les ACVM ont publié un projet de modification du Règlement 31-103 donnant ainsi suite à la consultation sur les réformes ciblées qui s’était terminée en octobre 2016. Ce projet est connu sous l’appellation de « Réformes axées sur le client »
Par son degré d’avancement, ce projet de modification règlementaire en est donc à la dernière étape de consultation officielle avant d’être adopté et d’avoir une valeur légale. Il a également un impact majeur sur la conduite professionnelle, le comportement des personnes physiques et les structures d’encadrement des courtiers inscrits dans le domaine des valeurs mobilières, potentiellement autant sinon plus que le mode de rémunération ne pourrait en avoir.
Et pourtant, il est passé sous le radar de plusieurs, beaucoup trop concentrés sur la réforme des modes de rémunération, comme si l’arbre cachait la forêt. Cela constitue possiblement une erreur majeure qu’il est, heureusement, encore temps de corriger.
Le projet de réformes axées sur le client prévoit tout un train de mesures variées destinées, aux yeux des ACVM, à rehausser le standard professionnel des inscrits et à permettre au client de bénéficier de meilleurs conseils ainsi que d’une meilleure protection.
Un peu comme il est difficile d’être contre la tarte aux pommes, on s’imagine mal quelqu’un pour s’élever contre des principes aussi nobles et fondamentaux.
Mais voilà, un principe c’est important, mais ce n’est rien sans mesure pour en assurer l’application. C’est là où la situation devient plus problématique avec ce projet règlementaire, car il entraîne une responsabilité accrue à bien des égards, tant et si bien qu’il est permis de se demander comment, en pratique, il sera possible de conjuguer le tout avec une saine conduite des affaires.
Sans doute qu’on sera tous d’accord pour que cesse la valse des vice-présidents ou des mentions « membre du club du président » sur la carte d’affaires d’un conseiller. Quand il y a tellement de vice-présidents qu’on préfère demander qui ne l’est pas ou que ces vice-présidents ne dirigent, en réalité, parfois rien de plus que leur brocheuse et leurs crayons, il est évident que ce titre est galvaudé. Pour ce qui est du club du président, c’est la plupart du temps un titre relié au volume de vente qu’une réelle reconnaissance de la qualité du travail accompli. À ce compte, il existe aussi une chaîne de supermarché qui a ses choix et son club du président…
Mais au-delà de ces mesures plus consensuelles et relativement simples d’application, des questions de mise en application concrètes surgissent lorsqu’on aborde certaines attentes du texte règlementaire sur la connaissance du client, la connaissance du produit, la convenance, la gestion ou l’évitement des conflits d’intérêts, ou encore d’ententes d’indications de clients.
Encore une fois, je souligne que les principes qui soutiennent ces mesures sont nobles et reçoivent l’appui d’une large majorité. Mais il est indéniable qu’une application de ces principes ne sera pas facile ou optimale pour tous et pourrait mener certains inscrits à faire des choix déchirants ou devoir réévaluer littéralement leur modèle d’affaires.
Par exemple, les obligations en matière de connaissance du client et de convenance sont rehaussées d’une manière telle que certains inscrits pourraient en venir à trancher que les seuls clients pour lesquels ils sont en mesure de remplir les obligations et d’en tirer un revenu suffisant pour demeurer en affaire sont les clients aisés et ainsi délaisser les clients des marchés de masse.
Les restrictions en matière de référencement pourraient forcer certains groupes intégrés à revoir leurs politiques de référencement des clients entre leurs différentes branches, rendant ainsi caduc tout un modèle d’affaires.
Les nouvelles exigences en matière de connaissance du produit et d’évaluation de ces mêmes produits pourraient pousser certains inscrits à volontairement restreindre leur offre afin de mieux contrôler leur environnement et leurs obligations de suivi nouvellement rehaussées.
Ce ne sont là que quelques exemples et chaque inscrit pourra, à la lecture du projet, se donner une meilleure idée des impacts sur sa propre organisation. À ce sujet d’ailleurs, je vous suggère fortement la lecture du projet d’instruction générale qui est beaucoup plus loquace et détaillé.
Mais il demeure certainement que cette réforme modifiera profondément la structure de l’industrie, des relations avec nos clients et de toute l’infrastructure qui l’encadre.
Et comme cette consultation, elle, est déjà en cours et se terminera le 19 octobre prochain, je suggère à tous de nous décoller le nez de l’arbre des commissions intégrées et de regarder la forêt qu’il cache actuellement.
Nous aurons amplement le temps de nous y recoller à compter du 20 octobre…