Ce groupe formé d’Excel Gestion Privée, Groupe Cloutier Investissements, Mérici Services Financiers, Mica Capital, Multi Courtage Capital et Whitehaven Securities souhaitent entendre les partis qui se présentent aux élections québécoises du 1er octobre prochain.
Rappelons que le jour même de l’annonce des propositions réglementaires des ACVM touchant l’abolition des FAR, qui sont soumises pour consultation depuis la mi-septembre, le ministre des Finances de l’Ontario, Vic Fedeli, s’en est distancé. « Notre gouvernement ne souscrit pas à cette proposition sous sa forme actuelle », indiquait-il dans un communiqué du ministère des Finances ontarien.
« Les quatre porte-paroles en matière de finances des quatre grands partis politiques du Québec ont été contactés [mercredi] afin de solliciter leur avis sur la question », lit-on dans le communiqué du groupe de courtiers.
Selon eux, la disparition des fonds à frais d’acquisition reportés risque de limiter l’accès au conseil aux plus petits investisseurs, ce qui réduit l’attrait de la profession sur la relève du secteur du courtage indépendant car cela rend l’accès à la profession beaucoup plus difficile.
« Le gouvernement de l’Ontario a bien compris qu’éliminer les FAR, c’est enlever un choix pour le consommateur et faire très mal à la relève et principalement au secteur indépendant. Or, depuis quelques années, il y a une grosse autodiscipline qui a été faite par rapport aux FAR. La transition a été faite et intégrée : les conseillers n’utilisent plus de FAR avec les investissements élevés, avec les personnes âgées, ou avec ceux dont l’horizon temporel d’investissement est faible. Le ménage a été fait. On s’attend du politique qu’il reconnaisse ces efforts », indique François Bruneau, vice‑président administration ‑ Investissement, chez Groupe Cloutier Investissements, en entrevue.
« Tous les cabinets signataires s’entendent pour dire qu’un encadrement plus serré de l’utilisation des fonds à frais d’acquisition différés serait hautement préférable à une interdiction pure et simple. Selon eux, d’autres solutions alternatives pourraient être envisagées qui pourraient très bien répondre aux préoccupations des ACVM en lien avec les fonds à frais d’acquisition reportés tout en évitant les impacts négatifs importants d’une interdiction totale », lit-on dans leur communiqué.
Selon François Bruneau, parmi ces solutions alternatives, figurent les fonds avec récupération de commission pour lesquels ce serait les conseillers qui seraient assujettis aux frais de rachat, plutôt que les clients. Les ACVM devraient reconnaître qu’il y a un effort initial important lié à l’ouverture de compte d’un client et le conseiller doit être rémunéré pour cet effort, d’après lui.
Finance et Investissement a communiqué avec la Coalition avenir Québec et Québec solidaire, en fin de journée mercredi et jeudi matin, et ceux-ci n’étaient pas alors disposés à donner leur avis sur la question.
Le cabinet du ministre libéral des Finances du Québec Carlos Leitão a quant à lui répondu dans un courriel que : « l’AMF continue de travailler au sein des Autorités canadiennes des valeurs mobilières. Nous attendrons les recommandations de l’AMF. »
Nicolas Marceau, député péquiste de Rousseau et ex-ministre des Finances et de l’Économie du Québec, « étant retenu en toute fin de campagne électorale, il lui est malheureusement impossible de donner suite immédiatement à votre requête de manière étayée avec toute l’attention qu’elle mérite », a indiqué son adjointe de circonscription.
Les dégâts des FAR
En juin, les ACVM justifiait leur projet d’interdire les FAR en soulignant que « le fait que, dans l’option des frais d’acquisition reportés, la rémunération initiale soit plus élevée et provienne d’un tiers crée un conflit d’intérêts qui peut inciter les courtiers et représentants à favoriser cette option par rapport à d’autres qui pourraient mieux convenir aux investisseurs. »
Selon les ACVM, les FAR ont également déjà fait assez de dégât par le passé. En 2015, l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) révélait que des fonds avec FAR dont les calendriers de rachat étaient plus longs que l’horizon de placement ont été vendus à des clients, et des titres de fonds assortis de cette option ont été vendus à des clients de plus de 70 ans.
Bien que l’option des FAR semble, à première vue, avantageuse pour les clients puisqu’elle ne les oblige pas à verser une commission initiale, elle peut néanmoins modifier considérablement leur comportement en raison de la « pénalité » associée aux frais de rachats, écrivaient les ACVM dans un avis : « Cette pénalité peut dissuader fortement les investisseurs de demander le rachat de leurs titres ou de modifier la répartition de leurs actifs, même lorsque le fonds affiche systématiquement un piètre rendement, que survienne un besoin imprévu de liquidités ou que leur situation financière change. »
En juin, des courtiers avaient souligné que les FAR sont utilisés par des conseillers de la relève, pour des clients jeunes à qui les FAR conviennent. « Si on enlève cette source de revenus aux jeunes conseillers, on vient carrément empêcher l’émergence de relève dans le secteur indépendant. On vient étouffer le côté entrepreneurial dans notre domaine », déclarait alors François Bruneau, vice‑président administration ‑ Investissement, chez Groupe Cloutier Investissements.
Dans une analyse des coûts et des bénéfices de l’abolition des FAR publiée en septembre, les ACVM ont reconnu que ces changements seraient « plus importants chez les courtiers en épargne collective indépendants de petite ou de moyenne taille (qui n’appartiennent pas au groupe d’un gestionnaire de fonds d’investissement), qui dépendent davantage de l’option des frais d’acquisition reportés et dont l’envergure est moindre que celle des fournisseurs de services financiers intégrés. »
« Les clients de ces courtiers qui détiennent des [fonds d’investissement] souscrits selon l’option des frais d’acquisition reportés assument une partie du risque du courtier lié à l’embauche de nouveaux employés et paient les coûts qui s’y rapportent par l’intermédiaire du calendrier de rachat et des frais de rachat applicables. Si l’abrogation proposée est mise en oeuvre, les sociétés inscrites devront internaliser directement ces coûts et ces risques », écrivaient les ACVM.
Mis à jour le 28 septembre à 11h20.