Depuis un certain nombre d’années, les gouvernements sont sensibilisés à la question de la retraite progressive. Afin d’encourager les personnes à reporter la date de leur retraite définitive, quelques mesures ont été implantées. Vu la pénurie de main-d’oeuvre qui sévit actuellement, il y a fort à parier que ces mesures seront maintenues et même bonifiées. Examinons-en quelques-unes.
Flexibilité sur la date du début de la rente du RRQ
C’est connu : le Régime de rentes du Québec (RRQ) offre une souplesse par rapport au moment où le client touche sa rente. Rappelons que la pénalité de 0,6 % par mois d’anticipation avant 65 ans est plus petite que la bonification de 0,7 % par mois de report après 65 ans.
Je veux notamment porter à votre attention qu’un report signifie rarement une augmentation de 0,7 % par mois, alors que la pénalité peut être rarement, elle aussi, de 0,6 % par mois. La raison est simple : la rente doit être recalculée avec une nouvelle période cotisable.
Cela signifie que, particulièrement dans le cas d’un report, des années à revenu nul compteront dans le calcul et, si ces années ne font pas partie des 15 % exclues, elles influeront négativement sur les prestations.
Dans le cas où une personne demande sa rente de retraite pendant qu’elle travaille encore, il faut savoir que le montant de sa rente augmentera même si elle est déjà au maximum. Pour une année de travail donnée, l’augmentation de la rente est de 0,5 % par année du revenu excédant 3 500 $ jusqu’au maximum des gains admissibles (MGA).
Il faut aussi être conscient du fait que si une rente anticipée est demandée, c’est autant d’argent qui n’a pas à sortir des comptes de retraite, par exemple le REER. Quand on calcule le point de «croisement» (âge auquel deux situations donnent des résultats équivalents), il faut considérer ce rendement. Ce point se situe souvent autour de 85 ans.
Finalement, il faut savoir que, après une entente avec son employeur, un employé qui a réduit son temps de travail peut contribuer au RRQ comme si son revenu n’avait pas été réduit, dans le but de bonifier sa rente.
Report possible du début de la PSV
Ce que j’ai écrit à propos du RRQ, on peut essentiellement le répéter pour la Pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) avec comme principale différence qu’il n’y a pas de cotisation. Par conséquent, une fois débutée, cette rente viagère est fixe à vie.
Il n’y a pas que la bonification possible de 0,6 % par mois de report qu’il faut considérer dans la PSV. La récupération, cet impôt indirect, peut avoir un grand impact, particulièrement pour les personnes ayant un revenu de retraite élevé même en retraite progressive.
Dans le cas de la récupération, il faut être conscient du fait qu’il s’agit de la récupération d’un montant imposable. Cela signifie que, même si le taux de récupération est de 15 %, il n’augmente pas les taux effectifs marginaux d’imposition (TEMI) de 15 % mais plutôt de 7,9 % à 9,4 %, selon le niveau de revenu.
Il faut faire des projections pour voir dans quelle mesure cette récupération doit absolument être évitée.
SRG : 3 500 $ de revenu de travail exempté
Pour encourager les personnes de 65 ans à plus faible revenu à demeurer sur le marché du travail, le calcul de la rente du Supplément de revenu garanti (SRG) exclut le revenu de travail (emploi ou entreprise) pour les premiers 3 500 $. Bien que ce montant ne soit pas très élevé actuellement, il serait facile pour le fédéral d’augmenter cette limite pour permettre aux personnes âgées de travailler davantage après 65 ans.
Revenu temporaire d’un FRV
Les clients qui ont un Fonds de revenu viager (FRV) souhaitent parfois y retirer de l’argent dans le but de financer leur retraite progressive. Une règle québécoise existe depuis 1997 et permet aux personnes âgées de 54 à 65 ans de retirer un revenu égal à 40 % du MGA d’un FRV, en plus, possiblement, d’un montant additionnel (revenu viager ajusté).
Ce pourcentage vient du fait qu’on a voulu remplacer l’équivalent du RRQ à 65 ans (25 %) et de la PSV (15 % lorsqu’on gagnait environ le MGA).
Les montants accumulés dans un FRV (qui est un FERR fiscalement parlant) proviennent, à l’origine, d’un régime de retraite. Ces sommes sont «immobilisées», c’est-à-dire qu’il existe des règles pour éviter de dilapider le capital accumulé trop rapidement. Lorsque l’argent sort d’un régime de retraite, il ne peut être décaissé que sous la forme d’un FRV, à moins d’exceptions. Sinon, il doit être transféré dans un compte de retraite immobilisé (ou un REER immobilisé au fédéral) où, encore une fois à moins d’exceptions, il ne peut être décaissé. Or, avant l’assouplissement de la règlementation, il était difficile, pour un préretraité bénéficiaire d’un régime de retraite, d’ajuster ses revenus adéquatement pendant sa période de préretraite.
Ce que les personnes en retraite progressive désirent, c’est de la flexibilité. Les FRV ont déjà eu l’obligation d’être convertis en rente viagère à l’âge de 80 ans. Ce manque de flexibilité a été décrié et cette règle a été abolie. Aujourd’hui, avec le revenu temporaire au Québec et la dé-immobilisation de 50 % au fédéral, les FRV sont plus flexibles et permettent d’effectuer des retraits plus variables.
Les personnes qui veulent se donner le maximum de flexibilité peuvent dé-immobiliser leur FRV chaque année avant la retraite pour transférer des fonds dans un REER. La règle est, en gros, que ce qui n’a pas été décaissé mais aurait pu l’être, peut être transféré dans un REER – avec une limite du revenu viager avant l’âge de 65 ans.
Revenu temporaire d’un régime de retraite
Le même principe de revenu temporaire s’applique dans les régimes de retraite. Si un employé, à moins de 10 ans de l’âge normal de la retraite du régime, prend sa retraite (complète), il pourra retirer de son régime le minimum entre 40 % du MGA de l’année et 70 % de sa diminution de revenu (si la valeur de son régime est assez élevée, évidemment). Tout l’argent retiré à ce moment viendra réduire la rente payable à 65 ans.
Il y a aussi la possibilité, pour les régimes qui le permettent, de profiter d’une rente progressive du régime. Dans ce cas, un participant, qu’il ait réduit son temps de travail ou non (selon l’entente avec son employeur), peut retirer des fonds de son régime tout en continuant d’accumuler des droits.
Dans les régimes à cotisation déterminée, l’employé a le droit de retirer jusqu’à 60 % du revenu viager qu’il pourrait retirer si l’argent était investi dans un FRV. Pour les régimes à prestations déterminées, une rente pouvant aller jusqu’à 60 % de la rente de retraite normalement payable peut être versée si certaines conditions sont respectées.
Crédit d’impôt pour travailleur âgé
Ce crédit provincial est offert aux travailleurs âgés de 61 ans et plus, et il croît jusqu’à l’âge de 65 ans. Il permet aux contribuables de gagner un revenu de travail (emploi ou entreprise) qui ouvre droit à un crédit de 15 %, annulant l’impôt du premier palier sur la portion admissible.
C’est l’excédent de 5 000 $ qui est admissible au crédit. Le montant varie entre 3 000 $ à 61 ans et 11 000 $ pour les personnes de 65 ans et plus.
Revenu de travail des faibles salariés bonifié
Crédit d’impôt remboursable, la Prime au travail a été instaurée au Québec afin d’aider les personnes à sortir de l’aide sociale. Cette mesure a par la suite été copiée par le fédéral (Allocation canadienne pour les travailleurs), qui l’applique dans toutes les autres provinces.
Le principe de ces crédits est que l’État bonifie le revenu de travail. Après un certain point, le crédit diminue graduellement jusqu’à disparaître complètement. Cette mesure permet de rendre le travail plus payant pour ceux qui font moins d’heures par semaine ou travaillent à un salaire plus faible. Bon nombre de personnes en retraite progressive peuvent ainsi en profiter.
* Directeur planification financière et optimisation fiscale, SFL Expertise