Revenu Québec s’attaque à nouveau aux agents généraux dans le litige qui oppose les parties concernant l’application de la Loi sur la taxe d’accise. Ces derniers mois, l’autorité fiscale québécoise, qui administre cette loi au Québec, a effectué une série de vérifications fiscales chez les agents généraux. Au moins un agent général a même reçu un avis de cotisation.
« J’ai reçu mon avis de cotisation et on parle de millions, confirme Yan Charbonneau, président directeur général de AFL Groupe financier à Finance et Investissement.
« S’il n’y a rien qui se passe, il y a plusieurs agents généraux qui vont être dans le trou », a-t-il ajouté.
Tel que l’indiquait récemment Finance et Investissement, l’épreuve de force est de nouveau engagée entre les agents généraux et assureurs et les autorités fiscales concernant l’application de la Loi sur la taxe d’accise. Dans ce dossier, les premiers s’opposent à l’interprétation que font les secondes de la nature de leur revenu d’assurance. D’après le fisc, le service d’intermédiaire entre les clients et les assureurs serait taxable, si bien que les agents généraux devraient percevoir la taxe sur les produits et services (TPS) et la taxe de vente du Québec (TVQ).
Malgré les négociations qui ont eu lieu ces dernières années entre les parties, Revenu Québec est donc revenu à la charge. Le dossier, qui perdure maintenant depuis 2016, est donc loin d’être clos.
Pour les agents généraux, recevoir un avis de cotisation place une épée de Damoclès fiscale au-dessus de leur tête. Ils peuvent payer la note, au péril de leur situation financière, puis s’y opposer dans ce qui risque de se transformer en litige fiscal qui traînera devant les tribunaux durant des années. Ils peuvent aussi refuser de payer cette facture fiscale inattendue, puis voir cette dernière gonfler au fil du temps à mesure que s’ajoutent les pénalités et les intérêts.
Devant cette menace pour leur survie, les agents généraux risquent aussi de se tourner vers les assureurs afin de leur faire payer la note ou à tout le moins, partager celle-ci. Chose certaine, ce genre d’avis de cotisation relance leurs efforts de lobbying auprès des autorités fiscales notamment par l’intermédiaire de l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP) et de l’Association canadienne des agences indépendantes de courtage d’assurance vie (CAILBA). Le premier groupe défend les intérêts des assureurs et le second, ceux des agents généraux.
Absurdité fiscale?
MICA Cabinet de services financiers a été le premier agent général au Québec à recevoir un avis de cotisation dans ce dossier en 2016, d’après son président, Gino-Sébastian Savard.
« On a parlé à nos confrères agents généraux du reste du Canada. CALBA et l’ACCAP s’en sont mêlés. On avait engagé un spécialiste de PwC pour nous défendre dans ce dossier. Finalement, ils ont laissé tomber leur cotisation », raconte-t-il.
L’actuel différend fiscal connaîtra-t-il le même dénouement? Difficile à dire. Toutefois, une défaite des agents généraux bouleverserait l’industrie.
« Ça me donne toujours des frissons quand ils reviennent avec ce dossier, parce que [leur position] n’a pas de bons sens. Il faudrait que les assureurs changent complètement la façon de nous payer », dit Gino-Sébastian Savard.
Selon lui, les autorités fiscales et les ministères des Finances du Québec et du Canada semblent souffrir du syndrome de la main gauche qui ne parle pas à la main droite. « D’un côté, on est considéré comme des institutions financières et on paie des taxes en conséquence. D’un autre, il y en a qui disent qu’on ne procure pas de services financiers et on donne du service administratif taxable. On dirait qu’ils ne se comprennent pas eux-mêmes », indique-t-il.
Considérant que ce risque fiscal menace la survie des agents généraux, il appelle les gouvernements à collaborer avec l’industrie afin d’instaurer des règles claires et prévisibles pour celle-ci. « Ne brisez pas ce qui fonctionne », souligne-t-il.