Le gouvernement espère revenir à l’équilibre budgétaire d’ici trois à cinq ans, sans imposer de mesures d’austérité, a affirmé le président du Conseil du Trésor, Christian Dubé, à RDI économie. Un programme pour le moins ambitieux, commente Gérald Fillion, dans un article récent de Radio-Canada.
Alors que le Québec dégage des surplus budgétaires depuis 2014, qui ont même atteint 8,3 milliards de dollars (G$) en 2018-2019, le ministre des Finances, Éric Girard, prévoit un déficit de 12 à 15 G$ en 2020-2021. À titre de comparaison, cela représente 3,5 % du PIB du Québec.
Ainsi, revenir à l’équilibre budgétaire ne sera pas une mince affaire. À l’époque, Carlos Leitao, le prédécesseur d’Éric Girard, affirmait que la situation dans les finances publiques était catastrophique alors que le déficit de 2013-2014 s’est établi à 1,403 G$, ou à 2,8 milliards après la remise au Fonds des générations.
En 3-5 ans seulement?
Le ministre Girard parle d’un retour à l’équilibre budgétaire entre 2023 et 2025. Pourquoi miser sur une période aussi courte et comment y arriver dans un contexte économique aussi incertain que l’actuel? Surtout que le Québec devra relever deux défis majeurs, rappelle Gérald Fillion :
1) Amener son système de santé à niveau, il sera donc peu probable de réduire les financements en santé.
2) Réussir la transition écologique et atteindre les cibles de réduction de gaz à effet de serre. Impossible de passer outre puisque la prochaine grande crise pourrait bien être climatique…
« Si on décide de ramener le déficit à zéro et, donc, de diminuer la dette, ça veut dire que ça nous empêche d’investir de façon colossale et importante dans la lutte vers la transition écologique. Donc, c’est une autre dette qu’on va léguer aux générations futures, à nos enfants, à nos petits-enfants, en n’investissant pas aujourd’hui », affirmait l’économiste François Delorme, de passage à RDI économie.
Selon lui, réduire le déficit de 15 G$ en 3-5 ans seulement est une erreur. « Je comprends très bien, dit-il, que le gouvernement veuille revenir rapidement, de trois à cinq ans, à l’équilibre budgétaire. Mais je ne pense pas que ce soit nécessaire. Je pense que le gouvernement, sincèrement, se trompe de dette […], que l’objectif de ramener le déficit à zéro dans un horizon de trois à cinq ans est inapproprié », soulignait-il.
Des prévisions à revoir
Avant la crise, le gouvernement tablait sur une hausse moyenne annuelle de 3 à 3,5 milliards de dollars de revenus autonomes de 2019-2020 à 2024-2025 et une croissance des dépenses de 3,5 à 4 milliards annuellement.
Il est difficilement imaginable que le gouvernement puisse compter sur 3 milliards de dollars de revenus de plus par année pour réduire son déficit à zéro d’ici cinq ans, à moins d’une spectaculaire hausse de l’économie.
Ainsi les dépenses devront certainement être revues à la baisse. Et Christian Dubé et Éric Girard peuvent promettre de ne pas imposer de mesures d’austérité, ils devront toutefois prendre des décisions difficiles pour atteindre l’équilibre budgétaire.