Une calculette en premier plan, derrière on voit des tas d'argent de plus en plus petits sur lesquels se trouvent des lettres et des chiffres formant le mot COVID-19.
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Depuis le début de cette pandémie, nous vivons des situations inhabituelles à plusieurs égards. Sous un angle financier et fiscal, voici quelques stratégies possibles dans un tel contexte.

D’abord, l’incertitude et la turbulence des marchés boursiers mènent à la réorganisation des portefeuilles de placement, ce qui entraîne pour certains investisseurs la réalisation de pertes en capital. Malgré l’aspect négatif du mot perte, la réalisation d’une perte en capital peut être fiscalement attrayante puisqu’elle permet de réduire un gain en capital imposable réalisé au cours de l’année ou dans les trois années précédentes en amendant les déclarations fiscales.

À défaut de pouvoir utiliser la perte, celle-ci est reportée et pourra réduire un gain en capital éventuel. Dans le pire des cas, elle devient une perte finale au décès venant réduire tout type de revenu imposable.

Malheureusement, une perte en capital reste emprisonnée dans une fiducie. Conséquemment, si des liquidités importantes se retrouvent dans une fiducie à la suite d’une transaction comme la vente d’actions d’une entreprise, il faut être conscient que si les sommes demeurent investies dans la fiducie, les bénéficiaires ne pourront pas se faire attribuer la perte. Il faut aussi se méfier des règles liées aux pertes apparentes qui refusent la perte en capital lorsque le même titre est acheté dans les trente jours civils précédant ou suivant la transaction par une personne qui nous est affiliée (par exemple, notre conjoint, une société que l’on contrôle…) Rappelons-nous qu’en jouant avec ces mesures, il est possible de transférer des pertes en capital à son conjoint avant de les réaliser.

Ne négligeons pas de considérer que toute transaction de valeurs mobilières doit toujours être convertie en dollars canadiens tant à l’achat qu’à la vente, en utilisant le taux de change en cours au moment de chacune des transactions pour faire ce calcul, et non pas un taux de change moyen. Conséquemment, il est fort possible que des investissements faits dans une devise autre que canadienne entraînent un gain en capital même si la valeur du titre a chuté.

Et si les placements sont détenus dans une société de gestion, assurez-vous que le solde du compte de dividende en capital (CDC) ait été cristallisé avant de réaliser une perte en capital. Au pire des cas et moyennant une pénalité, il peut être possible de faire un choix tardif de déclaration pour le CDC.

Prêt à taux prescrit

En raison de la fonte des taux d’intérêt et de celle du taux d’intérêt prescrit à 1 %, le moment est idéal pour mettre en place des stratégies de fractionnement de revenus avec les membres de sa famille. Lorsqu’un prêt à un conjoint ou à une fiducie familiale de fractionnement porte intérêt au moins au taux d’intérêt prescrit, les règles d’attribution sur le revenu ne s’appliquent pas. Lorsqu’il existe un prêt au taux prescrit à un taux supérieur à 1 %, il est important de le rembourser en bonne et due forme en faisant les mouvements de liquidités, et non pas simplement en modifiant le taux d’intérêt du contrat de prêt.

Pour que cette stratégie fonctionne, il est important de suivre la recette de mise en place avec précision. Idéalement, des liquidités seront transférées du prêteur à l’emprunteur et le contrat de prêt viendra ficeler le tout. Outre les modalités du prêt, le contrat peut aussi inclure une clause prévoyant ce qui arrivera en cas de décès du prêteur. À défaut, le prêt serait redevable à sa succession.

Pour mettre en place ce prêt, il peut aussi être possible de transférer un portefeuille existant (transfert en biens) directement du prêteur à l’emprunteur. Avant de procéder, une analyse minutieuse de la mise en place de la stratégie dans son ensemble et du portefeuille faisant l’objet du prêt est requise puisque ce transfert fera l’objet d’une disposition présumée entraînant la réalisation de gain en capital pour le prêteur et peut-être aussi de pertes apparentes (que l’on souhaite éviter).

Si le prêt est fait à une fiducie familiale de fractionnement, il est important de vérifier si l’acte de la fiducie a été conçu adéquatement pour la mise en place d’une telle stratégie. Il faut s’assurer que les fiduciaires ont le droit d’emprunter pour investir et qu’ils ont la flexibilité de distribuer des revenus de placement aux bénéficiaires, y compris aux enfants mineurs.

Il faut aussi vérifier quels sont les autres biens détenus par la fiducie. Par exemple, si la fiducie est actionnaire d’une société privée, il est possible que les règles de l’impôt sur le revenu fractionné (IRF) s’appliquent, ce qui pourrait contaminer la stratégie de prêt au taux prescrit.

Il faut aussi s’assurer que l’emprunteur paiera les intérêts au prêteur au plus tard le 30 janvier de l’année suivante, et ce, pour toute la durée du prêt.

Le contexte actuel est aussi propice aux réorganisations corporatives. Certains types d’entreprises sont en croissance fulgurante, tandis que d’autres voient la valeur de leur entreprise fondre.

Entre autres, c’est le moment d’analyser la pertinence de mettre en place un gel successoral, ou de défaire un gel fait par le passé, lorsque la valeur actuelle des actifs est inférieure à la valeur de ces actifs au moment du gel.

Bref, ce moment de grande turbulence économique sonne l’alarme, c’est plus que jamais le moment de revoir notre planification financière et fiscale.

Annie Boivin *

* Pl. Fin., D.Tax., TEP et vice-présidente, planification fiscale et successorale, Services Conseils, Gestion de patrimoine TD