Les gestionnaires d’actifs canadiens ciblent les petites sociétés de placement spécialisées dans les questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) afin de répondre à la demande croissante des investisseurs pour des produits d’investissement responsable (IR).
En décembre, la torontoise Financière Mackenzie a fait l’acquisition de Greenchip Financial, une société d’investissement spécialisée exclusivement dans l’économie environnementale. Greenchip, fondée il y a 14 ans, agit comme sous-conseiller du Fonds mondial d’actions environnementales Mackenzie depuis 2018 et gérera la partie actions d’un fonds équilibré mondial axé sur l’environnement que Mackenzie doit lancer en avril.
«[Greenchip] a apporté un certain style et une orientation valeur à l’investissement environnemental qui étaient absents de notre organisation», a déclaré Fate Saghir, responsable de l’investissement durable, responsable et à impact chez Mackenzie Investments, à Toronto.
En 2019, l’investissement durable a été défini comme un «catalyseur de croissance commerciale clé» chez Mackenzie, souligne Fate Saghir.
Cette volonté de prendre des mesures concrètes quant au secteur ESG n’est pas unique à Mackenzie. D’autres sociétés canadiennes du secteur de l’investissement ont fait de même dans les six derniers mois.
En novembre 2020, le gestionnaire de placements alternatifs ABT Capital Markets, de Vancouver, a acquis une participation de 25 % dans la société d’analyse et de recherche ESG Data Services afin de renforcer les services ESG offerts à ses clients.
En août de l’année dernière, la société torontoise Brookfield Asset Management a engagé Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque d’Angleterre et de la Banque du Canada, à titre de vice-président et responsable des investissements ESG et des fonds d’impact. Mark Carney, qui est également envoyé spécial des Nations unies pour l’action et le financement en matière de climat, aide Brookfield à développer des fonds ESG qui combinent «des résultats sociaux et environnementaux positifs avec de solides rendements ajustés au risque», selon la société.
Alors que les entreprises peuvent augmenter leurs capacités ESG par l’intermédiaire d’embauches ou de partenariats, Kendra Thompson, partenaire de la société de conseil Deloitte LLP à Toronto, est d’avis que les acquisitions dans le domaine ESG vont se poursuivre.
«L’acquisition est une voie pour l’accélération [de la croissance] et c’est aussi une voie pour le changement de culture», explique-t-elle.
Si de nombreux gestionnaires d’actifs proposent depuis longtemps des produits ESG en plus de leur gamme de fonds de base, ce n’est que récemment qu’ils ont commencé à mettre l’accent, à l’échelle de l’entreprise, sur l’acquisition de talents, de données et d’habiletés ESG, ajoute Kendra Thompson.
La demande des clients en matière d’ESG continue d’être motivée par les préoccupations liées au changement climatique et à la gouvernance d’entreprise, mais les questions sociales telles que la justice raciale ‘ qui a fait l’objet de mouvements de protestation mondiaux l’année dernière ‘ prennent de plus en plus d’importance, souligne Dustyn Lanz, PDG de l’Association pour l’investissement responsable (AIR), à Toronto.
«Avant 2020, le « S « d’ESG était négligé, mais nous assistons à un tournant, constate-t-il. Nous observons une certaine maturation du marché et je pense que les gestionnaires d’actifs reconnaissent qu’ils doivent pleinement considérer les trois [éléments de l’ESG].»
L’absence d’indicateurs non financiers, bien compris et universellement acceptés, destinés à mesurer l’ESG a été un obstacle clé à la croissance dans l’espace ESG, affirme Ian Russell, président et chef de la direction de l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières. Mais l’élaboration de paramètres ESG est sur la bonne voie.
Le CFA Institute, par exemple, prévoit publier une version préliminaire de ses normes de divulgation ESG pour les produits d’investissement en mai 2021. Ces normes devraient fournir aux investisseurs une plus grande transparence et une meilleure comparabilité des produits.
En mars, le règlement de l’Union européenne (UE) sur la divulgation de la finance durable est entré en vigueur. Les acteurs des marchés financiers de l’UE sont marchés financiers de l’UE sont désormais tenus de fournir des informations supplémentaires sur les produits ayant des objectifs ESG. Des réglementations similaires sont attendues au Canada, ce qui explique pourquoi les gestionnaires d’actifs «prennent actuellement de l’avance sur les réglementations [ESG] et les [exigences] de divulgation dont nous connaissons la venue prochaine», explique Fate Saghir.