La planification financière traditionnelle implique la collecte de nombreuses informations, des examens détaillés et un engagement mutuel de la part du conseiller en service financier et du client. Un processus aussi rigoureux est souvent réservé à ceux qui ont suffisamment d’actifs ou de complexité pour que ce type d’engagement en vaille la peine pour le conseiller.
Pourtant, nombreux sont ceux qui ont besoin d’une orientation financière. Seulement 57 % des Canadiens estiment pouvoir atteindre leurs objectifs financiers (une baisse de 10 points par rapport au sondage précédent de 2018), et 71 % n’ont pas recourt à un planificateur financier professionnel, révèle un sondage réalisé en 2020 par FP Canada.
« Beaucoup de gens ignorent ce qu’est la planification financière ; ils savent simplement qu’ils ont beaucoup de questions auxquelles ils n’ont pas de réponses, note David O’Leary, fondateur de Kind Wealth, une société de planification à honoraires basée à Toronto. Ils supposent que personne n’est en mesure de les aider. »
Ceux qui n’ont pas suffisamment d’actifs pour susciter l’intérêt d’un conseiller ont peut-être raison de penser ainsi. Mais la « light planning » – ou la planification synthétisée, un concept qui a gagné en popularité avec l’essor des robots-conseillers – pourrait être une solution.
La planification synthétisée « n’est pas centrée sur le produit ; et bien sur la planification, mais elle se fait sans engagement aussi soutenu pour le conseiller et le client que ce qui est requis selon les voies traditionnelles », explique Preet Banerjee, fondateur de MoneyGaps, de Toronto, qui propose un outil en ligne de planification financière synthétisée accessible aux conseillers. AltruWisdom, de Calgary, est une autre plateforme offrant de la planification synthétisée, pour sa part directement aux consommateurs, sous forme d’abonnement.
Ainsi, plutôt que d’offrir un plan financier complet, MoneyGaps propose une « analyse des lacunes ». Le logiciel attribue au client des notes, sous forme de lettres, en fonction de sa performance dans huit catégories financières préétablies, incluant une analyse de l’endettement, de l’assurance vie et de la gestion budgétaire.
« Beaucoup de gens ne veulent pas d’un plan complet jusqu’à ce qu’au moment d’arriver à une période clé de leur vie sur le plan financier, remarque Preet Banerjee. Jusque-là, ils veulent simplement vivre leur vie et faire les bonnes choses pour être en mesure de se qualifier éventuellement pour une planification plus complète. »
David O’Leary a également des clients ayant ce profil. Si environ la moitié des clients de Kind Wealth ont un engagement complet avec le cabinet, l’autre moitié ont des situations suffisamment simples pour justifier ce qu’il appelle un « plan de démarrage rapide ».
Un plan de démarrage rapide typique, qui est établi sur une période de trois à quatre semaines, comprend des réunions d’accueil et de révision et une analyse de toutes les questions touchant la planification financière du client. « Mais nous n’allons pas travailler sur ces questions au fil du temps ; nous n’allons pas aider à tout mettre en œuvre et effectuer des suivis ou des mises à jour comme c’est le cas pour les planifications traditionnelles, explique David O’Leary. Nous les orientons dans la bonne direction, puis la mission est terminée. » En général, ces plans coûtent environ 1 500 dollars.
Preet Banerjee dit avoir vu des conseillers effectuer une planification synthétisée pour le compte d’enfants de clients ; pour des prospects à fort potentiel qui n’atteignent pas encore le seuil d’actif minimum requis ; et pour des clients intéressés spécifiquement par ce type de service.
Il ajoute qu’une planification synthétisée peut également convenir à certains clients qui « ignorent à quoi ressemblera leur vie dans cinq ans, et encore plus dans 40 ans ». Pour ce type de clients, il est peu utile de consacrer beaucoup de temps et d’énergie à l’optimisation d’un plan financier, assure Preet Banerjee. Les conseillers disent souvent : « Je vais m’occuper de la composante humaine, de ce qui préoccupe le plus ces personnes, et je l’espère, cela les préparera à des opportunités de planification plus [complètes] par la suite. »
Darryl Brown, fondateur et planificateur d’investissement chez You&Yours Financial, une société à honoraires basée à Toronto, apprécie la philosophie derrière ce type de planification moins lourde, mais il estime que les conseillers devraient se méfier des rapports simplistes.
« Beaucoup de clients veulent que nous agitions notre baguette magique », précise-t-il, et que nous donnions une réponse simple à une question de planification classique comme « CELI ou REER ? ». Darryl Brown répond généralement en disant : « Nous ne pouvons pas répondre à certaines questions de manière isolée, car votre profil financier est interconnecté à travers ces différents domaines. »
Selon lui, un processus de planification financière complet a une « énorme valeur » même si un client ne suit pas entièrement le plan qui en résulte.
« Nous voulons évidemment une mise en œuvre [complète] du plan, mais si ce n’est pas le cas, cela ne signifie pas que la mission de planification financière n’a pas abouti. Je pense qu’il est utile d’avoir un point de vue impartial, affirme Darryl Brown. Le défi que nous devons relever en tant que profession est de faire comprendre aux clients qu’un plan financier complet est très utile, mais qu’il ne convient pas nécessairement à tout le monde et à tous les moments de leur vie. »
Preet Banerjee souligne que la planification synthétisée ne doit pas être interprétée comme une excuse pour rogner sur les dépenses – et même si c’est le cas dans les faits, il peut y avoir des avantages.
« Il y a tellement de gens qui ne bénéficient pas d’une planification, point final. Ils ne bénéficient ni d’une planification globale ni d’une planification synthétisée – ils ne bénéficient que de la vente de produits, note Preet Banerjee. Il y a beaucoup plus de gens qui bénéficieraient du passage d’une absence de planification à une planification partielle que d’une situation où la planification synthétisée n’est qu’une occasion pour un conseiller de fuir ses responsabilités. »