Une récente mise à jour effectuée par l’un des plus anciens et des plus importants assureurs du Canada constitue un développement bienvenu pour les conseillers qui sont de plus en plus nombreux à se « professionnaliser » et à devenir indépendants : les titulaires de contrats de la Financière Sun Life peuvent officiellement passer à un agent d’assurance vie indépendant.
« Les clients pourront désormais demander des changements de conseiller attitré et des conversions entre les conseillers de Distribution Financière Sun Life et les conseillers indépendants sous contrat avec la Sun Life », a expliqué Stéphane Vigneault, vice-président de la distribution d’assurance de la compagnie, dans un courriel adressé à Investment Executive (IE).
Le changement est entré en vigueur le 1er octobre et s’applique à tous les contrats d’assurance vie, y compris ceux qui sont en vigueur, mais qui ne sont plus offerts. Cette mesure vise à « faciliter encore plus le choix des clients quant au conseiller avec lequel ils veulent travailler », explique Stéphane Vigneault.
Lorsqu’un titulaire de contrat de la Sun Life passe à un conseiller indépendant, le nouveau conseiller recevra-t-il des commissions permanentes ?
« Nous suivons les lignes directrices et les procédures normales de l’industrie », répond Stéphane Vigneault.
Dans le cas d’une conversion (c’est-à-dire lorsqu’un contrat à terme est transformé en contrat permanent parce que la santé d’un client s’est détériorée), le nouveau conseiller obtient généralement une rémunération complète.
Avec le changement apporté par la Sun Life, les commissions sur les transformations seront partagées entre le conseiller indépendant (90 %) et le conseiller de la Sun Life (10 %) si la prime annuelle est de 50 000 $ ou plus et si la demande de transformation est faite dans les six mois suivant le changement de conseiller, selon un document de l’assureur. (Le document indique également qu’un nouveau barème de commissions est entré en vigueur le 1er octobre).
Lorsqu’un client soumet une demande de changement de zone de couverture, le conseiller de la Sun Life en est informé et dispose de cinq jours ouvrables pour communiquer avec le client avant que la demande ne soit traitée, indique le document. Les représentants de la Sun Life contactés pour cet article ont refusé de commenter ou n’ont pas répondu.
La Financial Advisors Association of Canada (aussi appelée Advocis) a déclaré qu’en général, elle n’a pas entendu de préoccupations de la part de ses membres au sujet des demandes de changement de conseiller liées au passage du canal spécialisé au canal indépendant, mais elle a salué la décision de la Sun Life.
Ce changement « semble être un développement positif qui reconnaît la prévalence croissante du canal indépendant, déclare Advocis dans un courriel. Il sera plus facile pour les clients du canal de vente dédié de trouver un nouveau conseiller s’ils peuvent accéder à la fois aux pools de représentants dédiés et indépendants. »
Scott Findlay, président de Valley-Wide Financial à Abbotsford, en Colombie-Britannique, et président du conseil d’administration des Courtiers indépendants en services (Independent Financial Brokers of Canada), a déclaré que ce changement était attendu depuis longtemps.
« Il était grand temps que la Sun Life le fasse », commente-t-il en précisant que d’autres assureurs ont déjà mis en œuvre un tel changement.
Harold Geller, un associé de la société MBC Law Professional d’Ottawa, a déclaré que la Sun Life s’était « distinguée » dans ses efforts pour « limiter la mobilité des clients ».
D’autres assureurs ayant des représentants captifs, contactés par IE, ont refusé de commenter la façon dont ils traitent les demandes de changement de conseillers.
Auparavant, si un titulaire de contrat de la Sun Life passait à un conseiller indépendant, le représentant de la Sun Life « était toujours le principal responsable du service, et le nouveau conseiller avait beaucoup de mal à obtenir des renseignements sur le contrat », rapporte Brian Shumak de Brian Shumak Financial Services à Toronto.
« C’était très frustrant » d’expliquer à un client qu’on ne pouvait pas accéder aux renseignements sur le contrat, se rappelle Scott Findlay, ajoutant qu’un représentant de la Sun Life qui devenait indépendant se trouvait confronté à la même difficulté.
Comme il est également difficile pour les assurés d’obtenir des renseignements complets sur le contrat dans de tels cas, « il n’y a aucun moyen pour un conseiller compétent d’évaluer si ce qui est en place est ce qui a été vendu, si cela répond au besoin prévu ou si les besoins ont changé », rapporte Harold Geller.
Auparavant, tout conseiller pouvait accéder aux informations sur la police de son client en faisant une demande, déclare Stéphane Vigneault. « Nous reconnaissons que ce processus n’était pas aussi facile qu’il aurait pu l’être » pour les conseillers et les clients, indique son courriel. « Une grande raison pour laquelle nous avons apporté le changement à notre processus, c’est de résoudre ce problème […]. »
Maintenant que je suis en mesure d’être le représentant autorisé, « je peux intégrer le contrat dans la planification globale [du client] », affirme Brian Shumak, et profiter des occasions qui se présentent avec le client. Ce changement me permet également « de mieux m’occuper des clients qui ont un contrat plus ancien à la Sun Life ».
En ce qui concerne les transformations, Brian Shumak décrit le changement de la Sun Life comme étant « pertinent et très avantageux » pour le client et le nouveau conseiller.
Auparavant, la transformation d’un contrat de la Sun Life vendu par un représentant captif « forçait le client à retourner chez le conseiller initial », explique Brian Shumak, car obtenir une couverture auprès d’un nouvel assureur aurait été prohibitif pour un client ayant des problèmes de santé. Maintenant, « le client peut transformer [le contrat Sun Life] avec le conseiller avec lequel il veut travailler », ajoute-t-il.
Brian Shumak rapporte ne pas avoir encore observé le changement de pratique de la Sun Life, « alors il peut encore y avoir des problèmes. »
L’un des problèmes qui se posent à l’échelle de l’industrie est celui des commissions à vie susmentionnées. Bien que les commissions permanentes soient relativement faibles et diminuent progressivement, lorsqu’un assureur empêche un nouveau représentant de les recevoir, il n’agit pas dans l’intérêt du client, dit Harold Geller. « Le représentant qui reprend la police n’a que peu d’intérêt à assurer le service de la police et est motivé pour la remplacer », précise-t-il.
Dans de nombreux cas, le représentant initial est à la retraite ou n’est plus en activité, et c’est l’assureur qui est responsable du service au client. Pourtant, il arrive souvent que le client ne reçoive pas de conseils ou d’évaluation de la pertinence, ce qui constituerait un manquement à l’obligation de l’assureur, selon Harold Geller.
Lorsqu’IE a contacté le Conseil canadien des responsables de la réglementation d’assurance (CCRRA) au sujet des restrictions relatives à ce changement, l’organisme de réglementation a cité le service à la clientèle et a souligné les questions connexes que les assureurs doivent évaluer, notamment la rémunération. « On s’attend à ce que les assureurs offrent un service approprié aux polices tout au long du cycle de vie du produit », selon les directives du CCRRA sur la conduite des affaires et le traitement équitable des titulaires de polices, a déclaré l’organisme de réglementation dans un courriel.
Lorsqu’un titulaire de police souhaite changer de conseiller attitré, « l’assureur doit s’assurer que le client a accès à un représentant capable de lui fournir un niveau de service approprié, selon le CCRRA. Cela peut inclure des considérations telles que la gestion des conflits d’intérêts potentiels, la détermination des modalités de rémunération pour tout conseil ou service que le nouveau représentant officiel pourrait fournir, et l’assurance qu’il a une relation contractuelle avec l’assureur. Il appartient à chaque assureur de déterminer la meilleure façon de gérer ces changements de manière à faire passer les intérêts de ses clients en premier. »
Stéphane Vigneault a déclaré que le volume des demandes de changement de conseiller attitré à la Sun Life a été jusqu’à présent « conforme à nos attentes ».
Conflits dénoncésDans l’ensemble, la structure de rémunération dans l’assurance est conflictuelle, affirme l’avocat Harold Geller.« À l’exception des fonds distincts, le secteur est passé de commissions nivelées, qui procuraient un revenu plus stable et incitaient à assurer le service après-vente des polices, à des commissions essentiellement initiales, qui motivent les ventes et n’encouragent pas le service », assure-t-il.
« Tout cela », ajoute-t-il, faisant référence à la rémunération conflictuelle ainsi qu’aux restrictions des conseillers attitrés, aux forces de vente captives et aux commissions à vie, « est lié au fait que [les acteurs du] secteur refusent de faire ce qui est dans le meilleur intérêt de leurs assurés. Il s’agit d’un manquement au devoir de « bonne foi » des assureurs ».
Pour les conseillers captifs, les commissions nivelées peuvent également être problématiques si elles empêchent le conseiller de quitter son entreprise.
Les commissions nivelées et les commissions initiales offrent toutes deux aux clients « des avantages différents », indique un courriel de Stéphane Vigneault de la Financière Sun Life. « La Sun Life est l’un des rares assureurs à offrir à la fois un système de rémunération « nivelé » pour son équipe de vente spécialisée et un système plus direct pour les conseillers indépendants. Nous continuons à surveiller l’impact pour nos clients afin de nous assurer qu’ils reçoivent le soutien et les conseils holistiques du conseiller de leur choix […]. »