Voilà les principaux défis en allocation d’actifs que des connaisseurs de haut niveau ont identifié lors d’un récent webinaire organisé par le CFA Québec.
Ces connaisseurs sont Hugues Bessette, chef des placements et de la gestion du risque chez Innocap; Marc-André Lewis, vice-président exécutif et chef de la gestion des investissements chez Gestion mondiale d’actifs CI; et Aurèle Storno, chef des investissements, Groupe multi-actifs chez Lombard Odier Investment Managers.
Intitulé L’allocation d’actifs : comment innover pour faire face à nos présents et futurs défis ?, le webinaire était animé par Mathieu St-Jean, consultant chez KPMG.
Rareté de main-d’œuvre
En poste depuis septembre dernier chez Gestion mondiale d’actifs CI, Marc-André Lewis a évoqué le passage chez son nouvel employeur d’un modèle de type multi-boutique vers une plateforme commune.
Cette plateforme commune aura pour effet d’enrichir le coffre à outils des gestionnaires de fonds, principalement par rapport à la collecte et l’utilisation des données, selon lui.
Mais comme le précise Marc-André Lewis, ce passage amène son lot de défis. « Le bassin de recrutement des spécialistes de données est limité. La demande est forte, notamment de la part des entreprises technologiques », dit-il.
Soulignant la nécessité d’expliciter tout ce qui est implicite dans les processus d’investissement, Marc-André Lewis a mis un bémol sur l’apport éventuel de l’intelligence artificielle. « L’investissement n’est pas un environnement clos comme les échecs ou le jeu de go », des domaines où, rappelle-t-il, l’intelligence artificielle a beaucoup de succès.
Risque d’embardée
Aurèle Storno a utilisé l’analogie de la Formule 1 afin de mettre en relief les risques de changements brusques en gestion d’actifs.
« Les ingénieurs de Formule 1 travaillent continuellement à améliorer la performance d’une même voiture de course », a-t-il dit.
En gestion d’actifs, le défi principal consiste à maintenir le cap et de gérer les priorités, signale Aurèle Storno. « Il y a toujours de fortes pressions au quotidien car les choses ne vont pas toujours bien. De plus, il y a un nombre incalculable d’idées qui viennent de partout ».
À l’image des ingénieurs avec leurs voitures de Formule 1, une philosophie d’investissement bien établie ne devrait être changée « qu’à la marge. »
Il en est de même des nouvelles technologies, à utiliser avec prudence. Leur intégration devrait se faire « lentement », en autant qu’elles font du sens et que leur efficacité soit raisonnablement prouvée.
Transformer la donnée brute
Le grand défi d’une organisation comme Innocap consiste « à transformer les points de données en connaissances utiles aux décisions d’investissement », a martelé Hugues Bessette, chef des placements et de la gestion du risque.
Ce défi de compréhension est d’autant plus grand qu’Innocap doit lire les indications de « plus de 60 000 instruments par jour ».
Hugues Bessette entend relever ce défi par l’emploi de langages communs entre les différentes équipes, l’optimisation des technologies existantes, le développement de meilleurs outils et la mise en commun d’expertises diversifiées.
Avancées technologiques incertaines
« Dans le passé, un fichier Excel supportait le cycle de données en investissement », rappelle Hugues Bessette. Évidemment, nous n’en sommes plus là. Toutefois, poursuit Hugues Bessette, l’industrie de la gestion d’actifs a encore beaucoup de chemin à faire.
« De façon globale, l’industrie ne valorise pas suffisamment l’innovation en gestion de portefeuille. Or, on sait tous qu’une mauvaise diversification de risques peut coûter cher ».
Marc-André Lewis a rejoint Hugues Bessette.
« Contrairement à ce qu’on voyait il y a dix ou quinze ans, l’industrie est très consciente de l’importance des données. Toutefois, les fondations technologiques sont trop souvent désuètes. Trop de projets technologiques ont été développés en silos, faisant en sorte que le tout est très instable », a signalé le vice-président exécutif et chef de la gestion des investissements chez Gestion mondiale d’actifs CI.