Pour assurer la transition vers une économie réduite en carbone, les entreprises minières doivent développer des cultures de travail propres à attirer et retenir une main-d’œuvre diversifiée et inclusive, selon un rapport présenté par l’Association minière du Canada (AMC) et Millani.
Ce rapport fait suite à une conférence sur les enjeux de main-d’œuvre dans le secteur, qui a réuni une quarantaine de représentants de l’industrie minière et des investisseurs en mai dernier à Montréal.
Les femmes et les communautés autochtones
L’industrie fait face à une pénurie de talents préoccupante. Statistique Canada indique que plus de 8 600 postes sont à pourvoir. Le Conseil des ressources humaines de l’industrie minière (Conseil RHiM) prévoit quant à lui que 80 000 à 120 000 travailleurs manqueront d’ici 2030, alors que plus de 25 % des employés partiront à la retraite.
Selon le rapport de l’AMC, une culture inclusive et respectueuse en milieu de travail peut influencer la capacité des entreprises à attirer et à conserver une main-d’œuvre diversifiée, notamment en incluant plus de personnes issues des communautés autochtones et de femmes.
En effet, selon les chiffres du dernier recensement, le nombre d’employés d’origine autochtone n’a augmenté que de 2 % entre 2011 et 2016, où ils représentaient environ 7 % de la main-d’œuvre de l’industrie au Canada.
Même phénomène pour les femmes. Leur proportion s’élève plus lentement dans les minières. Elle a augmenté de 12 % en 2016 comparativement à 31 % dans les autres industries, pour représenter 15,5 % de la main-d’œuvre du secteur.
Pour combler le retard, l’industrie favorise diverses initiatives. Une nouvelle norme sur l’équité, la diversité et l’inclusion a ainsi vu le jour récemment dans le cadre du programme Vers le développement minier durable (VDMD) de l’AMC.
Le géant Rio Tinto a pour sa part proposé un cadre d’action à la suite de la publication en février dernier d’un rapport interne sur la culture de travail faisant état d’intimidation systémique, de racisme et de sexisme au sein de l’entreprise.
Les investisseurs et les critères ESG
L’enjeu est de taille alors que l’industrie financière se concentre plus que jamais sur l’intégration ESG (environnement, social et gouvernance) dans l’analyse des investissements et la prise de décisions.
Dans cette mouvance, la réglementation et la divulgation sur les enjeux ESG deviennent de plus en plus strictes pour les sociétés émettrices qui gèrent leurs risques ESG et pour les investisseurs qui intègrent les facteurs ESG dans leurs stratégies.
Dans une récente étude, Millani a demandé à 37 investisseurs institutionnels le type de renseignements qu’ils aimeraient voir sur le capital humain et les divulgations en matière d’EDI.
La représentation des genres dans les conseils d’administration et dans l’effectif, le ratio de la rémunération des cadres supérieurs par rapport à la rémunération moyenne des employés, le taux de roulement et les politiques autochtones ont été les plus souvent cités par les investisseurs.
Éviter le piège de l’excès de confiance
Lors de la table ronde qui a nourri le rapport de l’AMC, les participants ont reconnu que les renseignements qualitatifs étaient nécessaires à la compréhension de l’EDI (équité, diversité, inclusion) et de la culture en milieu de travail.
Ils ont estimé toutefois qu’il fallait mettre les données quantitatives en contexte pour éviter le piège de l’excès de confiance après l’obtention d’une note qui semble « bonne ».
« Si le taux d’engagement des employés est de 85 %, c’est le 15 % qu’il faut examiner plutôt que de se féliciter pour le 85 %. Ce 15 % représente l’occasion d’amélioration », a déclaré Matthew Pike, ancien surintendant chez Vale.
Les participants ont aussi indiqué que la divulgation du processus informe les investisseurs sur la gestion du risque, tandis que la divulgation des résultats, qui utilise des données sur le rendement, peut mettre en lumière des risques ou des lacunes éventuelles qui nécessitent une action.
Le leadership des dirigeants
Ils ont souligné que le leadership des dirigeants est déterminant pour influencer la culture d’entreprise. « Pour que les travailleurs se sentent habilités, et que les comportements inacceptables soient dénoncés, il faut que les dirigeants fassent la démonstration des comportements souhaités et les encouragent », indique le rapport.
Enfin, la divulguer transparente des initiatives mises en œuvre par les entreprises pour construire leur culture EDI, faire évoluer une main-d’œuvre diversifiée et gérer leur bassin de talents a également été citée comme un aspect incontournable.
L’AMC mène actuellement des travaux en vue de définir des critères pour concevoir des politiques et des processus d’EDI plus efficaces, et pour favoriser des milieux de travail plus sécuritaires et plus respectueux dans l’industrie. Le projet de protocole touche également la collecte de données, la production de rapports et l’établissement d’objectifs d’EDI.