Accueillis avec scepticisme, les fonds négociés en Bourse (FNB) dont l’actif sous-gestion comprend une seule obligation ont fait leur apparition aux États-Unis. Voici ce qu’en disaient en août dernier Andres Rincon, chef des ventes et stratégies de FNB Valeurs mobilières TD et son équipe d’analystes.
Ainsi, en août, quelques FNB détenant une seule obligation ont vu le jour. Leur lancement a été tiède, notait alors Valeurs mobilières TD, même si le courtier le qualifiait de succès.
« Le lancement du FNB AXS TSLA Bear Daily (TSLQ US) a été largement reconnu comme un succès, le volume de transactions quotidiennes ayant atteint 50 millions de dollars (M$) au cours de la première semaine. Depuis sa création, le volume de transactions du TSLQ est resté supérieur à 50 M$ en moyenne. »
Cependant, d’autres FNB ne contenant qu’une seule obligation ont connu un peu moins d’activité. « TBIL US a enregistré un volume moyen de transactions de 4 M$ au cours des quatre premiers jours de bourse, tandis que UTEN US et UTWO US n’ont enregistré que des volumes inférieurs à 1 M$. Dans l’ensemble, les investisseurs ont montré moins d’intérêt pour les FNB d’une seule obligation que pour les FNB d’une seule action à effet de levier ou à effet de levier inversés », lit-on dans une note envoyée à des clients.
Valeurs mobilières TD note que les premiers FNB d’une seule obligation n’ont pas d’effet de levier, contrairement aux FNB d’une seule action qui eux, ont souvent un effet de levier.
Comparativement aux FNB obligataires traditionnels, les FNB d’une seule obligation perdent l’effet de diversification instantanée qu’on reconnaît d’emblée aux premiers. En clair, ils ne conviennent pas à tous les clients. Cependant, le fait d’offrir une obligation dans l’emballage d’un FNB offre certaines nouvelles possibilités pour des besoins spécifiques.
Prenons le cas des investisseurs qui souhaitent tirer profit des ajustements attendus à la courbe des taux de rendement découlant des multiples interventions des banquiers centraux.
« Comme les trois nouveaux FNB d’une seule obligation détiennent toujours les dernières émissions de leurs échéances respectives, ils sont conçus pour être un outil permettant de tirer profit des mouvements de la courbe des taux de rendement », lit-on dans la note de Valeurs mobilières TD.
Si un investisseur juge que l’obligation de Tesla va diminuer, alors il peut se procurer TSLQ US, car il tirera profit d’une baisse de la valeur de cette obligation.
« Ce type de FNB peut constituer une solution pour les clients de détail qui souhaitent s’exposer à la courbe des taux et prendre des profits. Ce sont également des outils puissants pour les négociateurs de la courbe des taux qui ne voient pas assez de volume pour négocier directement sur le marché obligataire », écrivent les auteurs de la note.
L’enveloppe du FNB en elle-même confère certains avantages. D’abord, elle peut parfois offrir aux investisseurs une plus grande liquidité que l’obligation sous-jacente elle-même. C’est le cas en particulier pour les ordres de négociation de petite taille où les particuliers peuvent interagir directement entre eux sur le marché secondaire en l’absence d’un mainteneur de marché, fait valoir Valeurs mobilières TD.
Rappelons qu’en mars 2020, le marché obligataire a connu un assèchement de la liquidité, faute d’acheteurs. Au même moment, les FNB obligataires continuaient de s’échanger, même s’ils étaient souvent à escompte par rapport à leur valeur liquidative.
« Les investisseurs de détails internationaux tirent également des avantages supplémentaires de ces FNB en obtenant un accès pratique au marché du Trésor américain par le biais des FNB. Au Canada, ces FNB peuvent être négociés par des courtiers en ligne avec des cotations en direct, alors que la plupart des clients de détail ne peuvent négocier les obligations sous-jacentes que par téléphone. La commodité des transactions et la transparence des prix peuvent largement faciliter l’investissement dans les taux américains pour les investisseurs internationaux », lit-on dans la note.
Pour les clients institutionnels, en particulier les boutiques et les gestionnaires d’actifs étrangers qui n’ont pas facilement accès au marché obligataire américain, ces FNB peuvent être des éléments utiles pour la gestion de portefeuille. Ceux-ci offrent en effet une exposition liquide et à faible coût à différentes parties de la courbe des taux américains, faisait valoir l’équipe d’Andres Rincon.
« Si un marché actif d’options sur ces FNB se développe, il peut également faciliter davantage l’expression de différents points de vue sur les taux américains », lit-on dans l’étude.
Quel impact aura l’arrivée de ces FNB dans le marché? Celui-ci est incertain pour le moment.
« À l’instar d’autres nouveaux produits, les FNB d’une seule obligation se heurtent aux doutes de la communauté des investisseurs. L’un des auteurs du célèbre « A Comprehensive Guide To Exchange-Traded Funds » pour le CFA Institute, Dave Nadig, a qualifié les débuts de ces FNB de « simple jour de plus dans le zoo des FNB » », rapportait en août Valeurs mobilières TD.
Le succès à long terme des FNB d’un seul titre à revenu fixe reste donc incertain, même si ce type de fonds « permet aux investisseurs nationaux et internationaux d’accéder facilement au marché du Trésor américain, ce qui peut également stimuler la liquidité du marché obligataire sous-jacent », d’après le courtier.
Cependant, si ces fonds rencontrent un certain succès, il ne serait pas surprenant que la communauté des investisseurs voie d’autres lancements dans ce domaine, y compris au Canada.
L’industrie des FNB bénéficierait possiblement aussi de ces innovations, car elle est reconnue comme une enveloppe appropriée pour toutes les catégories d’actifs.