En septembre, le marché canadien des fonds négociés en Bourse (FNB) a vu apparaître un nouveau genre de FNB, soit les FNB de vente d’options d’achat couverte sur titres à revenu fixe.
Banque Nationale Marchés financiers (BNMF) notait cette première canadienne avec l’arrivée sur le marché du Hamilton U.S. Bond Yield Maximizer ETF (HBND). D’autres manufacturiers, dont Harvest, ont emboité le pas ou le feront, car une poignée d’émetteurs de fonds (Evolve, Horizons) avaient, en septembre, rempli un prospectus préliminaire dans le but d’ajouter ce type de fonds à leur gamme.
Jusqu’à présent, les premiers FNB lancés ont quelques traits communs. D’abord, comme bon nombre de fonds ayant comme actif sous gestion des titres à revenu fixe étrangers, on retrouve une couverture contre le risque change. De plus, des gestionnaires actifs tentent de dégager pour l’investisseur un revenu de prime supplémentaire en vendant des options d’achats couvertes sur les actifs qu’ils gèrent.
En raison de ces opérations, ces FNB ont des taux de distribution mensuelle plus élevés que les autres FNB obligataires.
Que peut-on s’attendre de ce nouveau genre de FNB? Deux équipes d’analystes ont tenté de répondre à cette question en regardant l’expérience américaine où ce type de fonds est offert depuis un an.
Celle de Banque Nationale Marchés financiers note que ces lancements font suite au succès récent de l’iShares 20+ Year Treasury Bond BuyWrite Strategy ETF (TLTW) aux États-Unis, qui a été lancé il y a un peu plus d’un an et qui a connu un énorme succès dans un marché obligataire en difficulté.
« Depuis son lancement, le TLTW a attiré plus de 740 millions de dollars d’entrées nettes et détient désormais 660 millions de dollars d’actifs. Depuis le début de l’année, TLTW a surperformé de 7,4 % son homologue TLT, qui n’est pas un FNB d’options d’achat couvertes, ce qui s’explique en grande partie par le rendement supplémentaire. Cela n’est pas surprenant puisque les stratégies d’options d’achat couvertes sont susceptibles de surperformer les versions d’options d’achat non couvertes lorsque les marchés sous-jacents sont à la baisse », écrivent les auteurs de la note de BNMF.
Il existe trois autres fonds obligataires d’options d’achat aux États-Unis, dont deux proposent une exposition aux obligations d’entreprises et un seul aux bons du Trésor américain, ajoutent-ils. Ils n’ont pas tous connu le même succès en termes de ventes nettes.
Les fonds iShares High Yield Corporate Bond BuyWrite Strategy ETF (HYGW US Equity, frais de gestion: 0,69%), et iShares Investment Grade Corporate Bond BuyWrite Strategy ETF (LQDW US Equity, frais de gestion de : 0,34%) ont eu des ventes nettes plutôt faibles.
Expérience américaine
La stratégie spécifique mise en œuvre pour les options d’achat couvertes a un impact important sur la performance et le rendement des options d’achat couvertes mise en œuvre, souligne l’équipe d’analystes de Valeurs mobilières TD. En effet, iShares a implanté une stratégie selon laquelle elle vend des options d’achat hors du cours (out of the money) de 2 % sur 100 % du portefeuille sous-jacent.
« Si iShares adoptait une stratégie différente de vente d’options d’achat, la performance pourrait être très différente », écrivent les auteurs de la note de Valeurs mobilières TD, dont entre autres Andres Rincon, directeur et chef des ventes et stratégies de FNB et Mary Jane Young, cheffe des négociations, ventes et stratégies de FNB. Ils notent que les FNB obligataires à option d’achat couverte ne vendent que des options sur des FNB obligataires, et non sur les obligations sous-jacentes. Ils ajoutent que Hamilton, contrairement à iShares, vend des options d’achats dans le cours (at the money).
Par ailleurs, TLTW a obtenu le plus de succès auprès des investisseurs, tandis que les flux vers HYGW et LQDW ont été relativement faibles.
Étant donné que ces FNB existent depuis plus d’un an, leurs données historiques donnent un aperçu du comportement de ces FNB par rapport à leurs FNB sous-jacents traditionnels. Les données montrent que le TLTW a offert un rendement stupéfiant de 18,66 % sur 12 mois, contre 3,39 % pour le TLT. La différence de 15,28 points de pourcentage correspond au revenu des primes d’options d’achat couvertes.
« Il convient de souligner qu’aux États-Unis, les primes des options d’achats sont imposées comme un revenu, alors qu’au Canada, elles sont généralement imposées comme des gains en capital. Les primes d’option d’achat sont largement déterminées par la volatilité du prix du sous-jacent, qui a évolué de manière significative tout au long de l’année. En fait, le rendement indiqué sur la base de la distribution la plus récente a déjà baissé à 13,21 %, ce qui suggère des primes moins élevées pour la vente d’options d’achat en raison d’une moindre volatilité des prix du TLT », lit-on dans la note de VMTD. La même tendance est observée pour HYGW et LQDW.
Dans l’ensemble, les niveaux de rendement des FNB d’obligations à option d’achat couverte peuvent varier considérablement d’un moment à l’autre. Cette variabilité est probablement la raison pour laquelle les FNB cotés au Canada visent un rendement de 10 %, malgré la possibilité de rendements plus élevés, selon Valeurs mobilières TD.
Par ailleurs, les FNB obligataires de vente d’options d’achat couvertes peuvent surperformer ou sous-performer leur FNB sous-jacent en fonction de l’environnement, soulignent les auteurs de VMTD : « Il n’y a aucune certitude que le FNB d’options d’achat couvertes affichera une performance supérieure ou inférieure à celle des FNB sous-jacents au cours d’une période donnée. » Cette performante dépend largement de la volatilité des prix et des mouvements des FNB sous-jacents.
Notons que les TLTW et HYGW ont surperformé leurs FNB sous-jacents (TLT et HYG) sur une période de 12 mois, tandis que le LQDW a légèrement sous-performé.
Potentiel à la hausse limité
Même si les FNB d’options d’achat couvertes présentent un taux de distribution élevé, ce qui peut être attrayant pour certains, les investisseurs devraient bien les comprendre avant d’y investir. Ces FNB ont des défauts, dont le principal est de perdre le potentiel à la hausse de ces fonds. En effet, le potentiel à la hausse de ces FNB est limité par l’option d’achat. Si le prix du FNB sous-jacent monte rapidement, l’acheteur de l’option d’achat va exercer son option ce qui nuit au potentiel d’appréciation de l’actif sous-jacent à long terme.
Les investisseurs achètent des FNB d’obligations gouvernementales à long terme pour se protéger de la récession, car on s’attend à ce que ces FNB montent en flèche si les taux à long terme chutent pendant une récession, ce qui pourrait servir de couverture contre les pertes du marché des actions, souligne VMTD : « Les FNB de vente d’options d’achats sur obligations gouvernementales peuvent se comporter différemment en cas de récession, car le potentiel de hausse des prix est quelque peu limité par la vente d’options d’achat. Les investisseurs doivent tenir compte de cette limite. »
Par ailleurs, en raison de la popularité des FNB d’obligations totales (aggregate bond ETFs) et des FNB d’obligations à court terme parmi les investisseurs canadiens, VMTD ne serait pas surpris qu’ils deviennent l’actif sous-gestion de FNB canadiens de vente d’options d’achats sur titre à revenu fixe.