Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, estime que les nouveaux garde-fous budgétaires du gouvernement fédéral, dévoilés dans son énoncé économique de l’automne, sont utiles pour la politique monétaire.
Lors d’un point de presse mercredi, Tiff Macklem a commenté la mise à jour des projections budgétaires du gouvernement fédéral ainsi que les nouvelles règles visant à limiter les déficits.
« Du point de vue de la politique monétaire, la déclaration économique d’automne suggère que le gouvernement n’ajoutera pas de pressions inflationnistes nouvelles ou supplémentaires au cours des deux prochaines années, qui est la période critique au cours de laquelle nous chercherons à réduire l’inflation et à la ramener vers l’objectif », a affirmé Tiff Macklem.
« La déclaration économique de l’automne comprend également de nouveaux garde-fous budgétaires au-delà du court terme et, du point de vue de la politique monétaire, je pense que c’est utile. »
L’énoncé économique de l’automne contient des engagements sur la façon dont le gouvernement fédéral abordera ses finances, y compris l’objectif de maintenir les déficits en dessous de 1 % du produit intérieur brut (PIB) à partir de 2026-27.
Les libéraux visent également à maintenir le déficit de l’exercice en cours à un niveau égal ou inférieur aux 40,1 milliards de dollars (G$) prévus dans le budget de printemps et à réduire le ratio de la dette au PIB en 2024-25 par rapport aux prévisions de l’énoncé économique de l’automne.
Les nouveaux objectifs budgétaires interviennent alors que le gouvernement fédéral est appelé à éviter d’alimenter l’inflation par de nouvelles dépenses et à tenir compte de l’impact du ralentissement de l’économie sur les recettes publiques.
Tiff Macklem a déjà demandé que la politique budgétaire aille dans le même sens que la politique monétaire, notant que, dans l’ensemble, les plans de dépenses de tous les niveaux de gouvernement pour l’année prochaine risquent d’alimenter l’inflation.
Un rappel des années 1970
Plus tôt dans la journée, le gouverneur a prononcé un discours devant la Chambre de commerce de la région de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, dans lequel il a averti que ce serait une grave erreur de lutter contre l’inflation de façon timide et d’en subir les conséquences.
Il a reconnu que les taux d’intérêt étaient peut-être déjà suffisamment élevés pour ramener l’inflation à son objectif cible, mais il a réaffirmé que la banque centrale était prête à relever encore les taux si l’inflation ne diminuait pas.
Son apparition publique a eu lieu au lendemain de la publication de nouveaux chiffres sur l’inflation, qui montrent que celle-ci a ralenti à 3,1 % en octobre au Canada.
Dans son discours, Tiff Macklem a comparé la lutte contre l’inflation d’aujourd’hui à celle des années 1970, en soulignant les similitudes et les différences entre ces deux périodes.
L’inflation des années 1970 a également été déclenchée par des événements mondiaux, a-t-il rappelé, entraînant des conséquences similaires à celles d’aujourd’hui: les gens se sentaient lésés parce que leurs salaires ne suivaient pas le coût de la vie et les grèves étaient longues et fréquentes.
Bien que les responsables politiques aient expérimenté le contrôle des prix et des salaires ainsi que le ralentissement de la croissance de la masse monétaire, le gouverneur a souligné que ces politiques étaient inefficaces.
« Et le gouvernement et la banque centrale n’étaient pas prêts à maintenir le cap, c’est-à-dire à restreindre les dépenses gouvernementales et à resserrer la politique monétaire suffisamment pour éliminer les pressions inflationnistes dans l’économie », a dit Tiff Macklem.
La conséquence, selon lui, est que les Canadiens ont vécu avec une inflation élevée pendant plus d’une décennie et que, lorsque les décideurs politiques ont réalisé qu’ils devaient faire plus, l’inflation était déjà bien ancrée dans l’économie.
« La plus grande leçon que nous avons tirée des années 1970 est que combattre l’inflation élevée de façon timide, et vivre avec le stress, les conflits de travail et l’incertitude, serait une grave erreur », a ajouté le gouverneur.
Des taux d’intérêt assez restrictifs
La Banque du Canada a réagi à la hausse de l’inflation à partir de mars 2022 en augmentant rapidement les taux d’intérêt, qui ont atteint leur niveau le plus élevé depuis des décennies. Les hausses de taux agressives ont ralenti les dépenses, car les gens sont confrontés à des coûts d’emprunt plus élevés, en particulier de nombreux propriétaires de maisons avec des hypothèques.
La banque centrale a choisi de maintenir son taux d’intérêt directeur à 5 % lors de ses deux dernières réunions de décision. Elle a déclaré qu’elle prenait également en considération le fait que de nombreux Canadiens devront renouveler leur hypothèque à des taux d’intérêt plus élevés, ce qui signifie qu’un nouveau ralentissement de l’économie est à prévoir.
« Le resserrement de la politique monétaire fonctionne, et il est possible que les taux d’intérêt soient maintenant assez restrictifs pour rétablir la stabilité des prix », a indiqué Tiff Macklem mercredi.
Le Canada présente aujourd’hui deux avantages par rapport aux années 1970 pour le gouverneur: les gens s’attendent à ce que l’inflation retombe à long terme et la Banque du Canada a réagi vigoureusement cette fois-ci en procédant à des hausses de taux énergiques.
« Et je sais que même si nos hausses de taux font baisser l’inflation, beaucoup de Canadiennes et de Canadiens les voient comme un coût supplémentaire », a-t-il dit dans son discours. « Mais ils atténuent les pressions sur les prix dans l’ensemble de l’économie. Si nous gardons le cap, les résultats vont en valoir la peine. »