Invoquant la complexité des régimes de pensions et la nécessité pour toutes les provinces et tous les territoires d’intervenir dans ce dossier, la ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, n’a pas fourni d’échéancier précis pour déterminer le montant auquel l’Alberta aurait droit si elle décidait de quitter le Régime de pensions du Canada.
Lors d’une rencontre avec ses homologues provinciaux et territoriaux, vendredi, Chrystia Freeland a reçu une mise à jour des experts qui se sont penchés sur cette question dans les derniers mois.
Chrystia Freeland avait en effet demandé en novembre à l’actuaire en chef de calculer ce qui serait dû à l’Alberta si elle décidait de se retirer du Régime de pensions du Canada.
Lors de leur présentation, les experts ont fait valoir qu’ils devraient se rencontrer à nouveau en janvier afin de faire le point sur l’avancement du dossier, et « tout le monde a convenu que c’était une bonne idée », a indiqué Chrystia Freeland.
Les ministres avaient tenu une réunion spéciale le mois dernier pour discuter de la volonté de la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, de quitter le Régime de pensions du Canada pour créer un régime propre à l’Alberta.
Danielle Smith a fait avancer son projet en septembre en publiant un rapport de Lifeworks qui a estimé que l’Alberta aurait droit à 334 milliards de dollars (G$), ou 53 %, du Régime de pensions du Canada si elle mettait en place son propre régime.
D’autres économistes, y compris ceux de l’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada, croient que la part de l’Alberta serait plus proche de son pourcentage de participants au régime, soit environ 15 %.
Pour mettre un terme à ce débat, Chrystia Freeland a demandé à l’actuaire en chef de statuer sur un chiffre. Mais lorsque des journalistes lui ont demandé si elle pensait qu’il faudrait attendre jusqu’au printemps ou à l’été pour en arriver à une estimation, la vice-première ministre n’a pas voulu s’avancer.
« J’ai appris pendant les négociations sur l’Accord de libre-échange nord-américain à ne jamais répondre à des questions hypothétiques. Ce n’est pas une bonne idée pour une politicienne élue », a-t-elle affirmé.
« Ce qui, je pense, était très clair dans la conversation d’aujourd’hui (?), c’est à quel point ce travail est technique. Nous avons convenu que nous allions faire le travail et définir les tâches très soigneusement, très délibérément et de manière vraiment transparente », a ajouté la ministre.
Interrogé sur les volets de la réunion qui ont porté sur les régimes de pensions, le ministre des Finances de l’Alberta, Nate Horner, a déclaré: « Je suis heureux que la ministre Freeland ait convenu que l’actuaire en chef devrait se fier à sa propre analyse juridique et non à ce que dit le gouvernement fédéral. »
« La décision d’aller de l’avant avec un régime de retraite propre à l’Alberta appartient aux Albertains », a-t-il soutenu dans une déclaration écrite.
À ce sujet, Chrystia Freeland a réitéré pendant son discours que n’importe quelle province ou n’importe quel territoire peut se retirer du régime de retraite fédéral.
« Il n’y a pas de débat là-dessus », a-t-elle dit.
L’exemple du Québec
L’Alberta veut ainsi emboîter le pas au Québec, qui possède son propre régime de pensions, à savoir le Régime de rentes du Québec.
Présent à la rencontre, le ministre des Finances du Québec, Eric Girard, a mentionné que le Québec joue un rôle « d’observateur extrêmement intéressé » dans ce qui se passe avec l’Alberta.
« Si une province quittait le Régime de pensions du Canada, il faudrait qu’il y ait une entente avec le Québec pour les travailleurs qui vont et viennent de cette province », a-t-il expliqué.
Une telle entente existe déjà entre le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec pour les travailleurs qui travaillent au Québec et ailleurs au pays pendant leur carrière.
En plus du dossier du régime de pensions de l’Alberta, Chrystia Freeland et ses homologues ont discuté du logement, de l’inflation et de l’économie.
Les provinces et territoires en ont aussi profité pour faire part à la ministre des Finances de leurs priorités en vue du budget fédéral de 2024-25.
« Je dirais qu’il y avait consensus pour un accroissement des dépenses en infrastructures et aussi pour une poursuite des transferts au niveau de la main-d’œuvre », a indiqué Eric Girard.
Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, était également présent pour faire le point sur les perspectives économiques du pays.